La rénovation énergétique, première préoccupation des bailleurs sociaux en région
Au total, c'est entre 120 et 170 000 logements sociaux qui sont considérés comme de véritables passoires thermiques dans les Hauts-de-France. Chaque année, les bailleurs investissent afin de rénover leurs parcs immobiliers. Cependant, ils vont devoir accélérer la cadence d’ici à 2035 puisque la loi Climat et Résilience a rebattu les cartes.
La rénovation énergétique dans les Hauts-de-France n’est pas une mince affaire. Aux alentours de 120 à 170 000 logements sociaux sont classés E, F et G. Les bailleurs sociaux doivent donc s’organiser. «Il faut savoir que les bailleurs sociaux investissent déjà chaque année dans la rénovation énergétique de leurs parcs immobiliers. Ce sont des plans prévus sur plusieurs années. Nous considérons qu’entre 9 000 et 12 000 logements sont rénovés par an dans la région», introduit Emma Desette, responsable du pôle stratégies urbaines et patrimoniales de l’Union régionale de l’habitat Hauts-de-France.
À ces rénovations récurrentes, s’ajoutent certains programmes qui viennent octroyer quelques enveloppes aux bailleurs sociaux pour appuyer, voire accélérer, cette transition énergétique. «Dans les Hauts-de-France, par exemple, 57 projets ont été retenus par l’ANRU, ce qui équivaut à la réhabilitation de plus de 9 000 logements d’ici 2024, en plus des démolitions et reconstructions»,
explique Jean-Louis Cottigny, président de l’Union régionale de l’habitat Hauts-de-France.
Point noir au tableau : la loi Climat et Résilience
À cela, s’ajoute également le plan France relance qui a permis, en 2021, la réhabilitation de 6 400 logements pour une enveloppe totale de 65 millions d’euros dans la région. Pour 2022, 1 800 logements seront réhabilités grâce à une enveloppe de 18 millions d’euros. Enfin, les bailleurs des Hauts-de-France ont aussi profité du programme «Massireno» qui prévoit la rénovation de 352 logements pour un total de 6 millions d’euros. Dans la région, la rénovation énergétique va bon train.
Mais la loi Climat et Résilience est venue rebattre les cartes dans le domaine. Cette loi édicte que, pour être loués, les biens doivent satisfaire à un niveau de performance énergétique minimal. À partir de 2025, la signature d’un bail sera donc conditionnée à un DPE suffisamment bien noté : les logements classés G seront d’office exclus du marché. En 2028, il en sera de même pour les logements classés F et, en 2034, pour les logements classés E. Un réel défi à relever pour la région qui est désignée comme ayant le parc de logement social le plus ancien de France.
Trouver des entreprises disponibles
Ainsi, d’ici 2035, les 120 à 170 000 logements classés E, F et G devront être rénovés, soit 30% du parc locatif social de la région. «D’un point de vue déontologique, la loi Climat et Résilience, c’est très bien. Mais ce qui inquiète les bailleurs sociaux, c’est que les délais sont très courts et ils pourraient risquer de ne plus réussir à louer toute une partie de leurs parcs immobiliers. De plus, rien que dans les Hauts-de-France, cela représente, selon l’ambition de la rénovation, 5 à 9 milliards d’euros pour la rénovation de toutes ces passoires thermiques. Il va falloir trouver des financements»,
souligne Emma Desette.
Mais une autre inquiétude pointe. «Un autre enjeu pour les bailleurs est de trouver des entreprises disponibles pour ces rénovations. Tous les secteurs souffrent du manque de main-d’oeuvre, et cela se ressent aussi dans la rénovation immobilière», s'inquiète Jean-Louis Cottigny, président de l’Union régionale de l’habitat Hauts-de-France. Pourtant, les bailleurs sociaux ont décidé d'agir : que ce soit dans le Nord, le Pas-de-Calais, la Somme ou l’Aisne, ils innovent.
Deux initiatives régionales
Dans le Nord, les bailleurs veulent aller plus loin avec EnergieSprong
Plusieurs bailleurs sociaux, à l’image de Vilogia, ont décidé de viser plus loin que les critères imposés par la loi Climat et Résilience. Leurs constats : «S'il faut rénover notre parc pour atteindre les critères de la loi Climat et Résilience de 2035, il vaut mieux anticiper la loi zéro émission carbone qui sortira en 2050, afin d’éviter des investissements supplémentaires par la suite.»
Ainsi la rénovation EnergieSprong se base sur trois aspects. Premièrement, le logement doit produire autant qu’il consomme d'énergie. Ce qui passe, par exemple, par l’installation de panneaux solaires sur les toits. Ensuite, les façades isolantes, posées à l’extérieur des bâtiments, doivent être préfabriquées en usine, ce qui réduit les coûts et répond à la pénurie de main d’oeuvre. Enfin, les constructeurs garantissent, pendant 30 ans, que la consommation énergétique du bâtiment sera égale à zéro. Une rénovation à long terme afin d’éviter de se faire rattraper par de nouvelles lois.
Dans le Pas-de-Calais : industrialiser pour rénover en masse
Parmi les initiatives régionales, se trouve celle du bailleur social Maisons & Cités, propriétaire d’un large parc de "Camus" bas, ces petites maisons plain-pied typiques du Pas-de-Calais et du bassin minier. Nombreuses sont les habitations qui doivent être rénovées pour répondre aux critères de la loi Climat et Résilience. Afin d’atteindre l’objectif fixé en 2035, le bailleur social a décidé de rénover l’ensemble de ces habitations en une fois. L’idée est de standardiser les chantiers et de les industrialiser. Les coûts devraient ainsi baisser pour la rénovation des 1 412 logements concernés.