La Région veut changer d'échelle
La question de la rénovation devient une priorité absolue pour le territoire, qui souffre d'un parc de logements anciens et détérioré. Entre 2009 et 2017, le secteur du logement en région a réduit de 22% son impact en termes d'émissions de CO2 – contrairement aux chiffres nationaux qui restent stables depuis 10 ans – : au-delà des chiffres, la Région enclenche la vitesse supérieure pour devenir leader.
«La crise actuelle ne doit pas écraser la crise énergétique.» Frédéric Nihous, conseiller régional délégué à la transition énergétique et à la rénovation énergétique des logements à la Région, veut clairement passer un cap, sous l’impulsion de Xavier Bertrand. D’ici 2030, la Région se fixe comme objectif la rénovation de 70 à 80% des logements anciens, soit entre 940 000 et plus d’un million de logements. D’autant plus que le territoire coche plusieurs mauvais critères : une consommation énergétique plus importante qu’ailleurs (40% de passoires thermiques), une énergie importée à 72% (contre 45% pour la moyenne nationale), un taux de précarité élevé et un parc de logements vieillissant, avec des factures salées pour leurs habitants. Néanmoins, les Hauts-de-France peuvent se targuer d’être la première région de la transition énergétique, impulsée par la dynamique rev3. Avec 165 opérations – soit 16% des opérations françaises – la Région se veut exemplaire. Qu’il s’agisse des éco-matériaux, du bois d’œuvre ou encore de la construction paille pour laquelle nous sommes parmi les trois régions leaders en France, c’est toute une industrie qui se met en place, créatrice d’emplois et de valeurs. «Le bâtiment est en première ligne face aux crises et au cœur d’une transformation plus que nécessaire. Nous devons être prêts à répondre aux enjeux, à diminuer les impacts environnementaux et à monter les formations en compétence pour créer des emplois durables» détaille Benoît Loison, président de la FFB Nord-Pas-de-Calais et président du Conseil d’orientation Bâtiment durable. Priorité est donc donnée sur la rénovation de logements et l’engagement des entreprises dans des démarches de bâtiment durable avec une approche globale de qualité. Pour accélérer le mouvement, le Conseil d’orientation du bâtiment durable du cd2e vient de remettre à Xavier Bertrand un rapport sur le bâtiment durable, autour de neuf propositions. Sa mission est claire : partager des informations sur le secteur, développer une vision prospective et formuler des propositions concrètes, en lien avec les organisations professionnelles et les acteurs du territoire.
La priorité absolue : les logements
Avec un parc immobilier très ancien – 1,5 million de logements dont les dernières rénovations datent d’avant les années 1970 –, les Hauts-de-France ne font pas figure de bons élèves, d’autant plus qu’une bonne partie du parc immobilier est détenue par des propriétaires modestes ou très modestes, dont les conditions ne permettent pas de réaliser ces travaux. Et pourtant, une rénovation peut faire baisser la facture énergétique de l’ordre de 40 à 50%. «L’enjeu, c’est la massification avec une approche durable et globale. On ne travaille pas de façon ‘hors sol’ mais avec toutes les filières» ajoute Benoît Loison, s’appuyant sur le succès d’une première nationale, impulsée en Région depuis 2013 : le SPEE (Service Public de l’Efficacité Energétique), soutenu par la Banque Européenne d’Investissement et présenté comme un exemple en Europe. Initié en Picardie, ce SPEE permet un accompagnement des ménagers via la réalisation d’audits énergétiques, un suivi des travaux et le tiers financement du projet. En cinq ans, 1 643 logements privés ont ainsi été rénovés pour 40 M€ de travaux. Il se déploie depuis 2020 à l’ensemble des Hauts-de-France avec l’ambition de 10 000 logements privés rénovés en cinq ans.
«Il faut aller vite»
Alors que la Région vient de voter un plan de relance d’1,3 milliard d’euros pour soutenir les entreprises dans la crise, Xavier Bertrand veut passer à la vitesse supérieure : «Tout cela n’avance pas assez vite. Il ne faut pas que le reste à charge soit un problème : pour les petites collectivités, nous allons simplifier les procédures. Ce n’est plus qu’un objet de colloque, il faut aller vite car derrière, c’est de l’emploi. Nous sommes tous d’accord sur ces sujets mais nous avançons avec le frein à main.» Le cd2e estime qu’en sept ans, 35 000 emplois peuvent être maintenus ou créés. Pour mettre en place ces propositions, 800 M€ seraient nécessaires. La Région compte mettre sur la table 100 M€ dans le nouveau fonds d’investissement rev3, doté à terme de 500 M€ – le reste sur fonds d’investissements privés – et qui pourra donc donner un coup de boost au développement massif du bâtiment durable et faire de la Région un leader dans cette transformation incontournable.
Les neuf propositions
– Instaurer une prime incitative «Bâtiment durable»
– Mobiliser les bailleurs et les collectivités
– Accompagner les petites collectivités
– Favoriser les rénovations basse consommation des logements des particuliers
– Déployer les énergies renouvelables liées au bâti
– Santé-qualité de l’air : prioriser les établissements accueillants les plus jeunes
– Mieux prévoir le marché futur et renforcer l’adéquation de l’offre de formation avec les besoins
– Faciliter les recrutements et améliorer l’attractivité des métiers du bâtiment durable et le recrutement
– Mobiliser les éco-systèmes de l’économie circulaire