La région fait le dos rond sans se fermer au monde

L’Insee vient de publier son bilan annuel socio-économique du Nord-Pas-de-Calais. En 15 chapitres, l’institut fait le point sur tous les secteurs marchands en s’appuyant notamment sur la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, le Comité régional du tourisme ainsi que sur le rectorat. Tour d’horizon.

Echanges de la région Nord-Pas-de-Calais.
Echanges de la région Nord-Pas-de-Calais.

 

Echanges de la région Nord-Pas-de-Calais.

Echanges de la région Nord-Pas-de-Calais.

La synthèse ne surprendra personne : “des difficultés économiques en pleine crise européennes des dettes souveraines”. Voilà sous quel angle il convient de lire cette étude de 69 pages, répartie en 15 chapitres. Mais le pire n’est pas encore arrivé : en 2011, la croissance française avait atteint 1,7%, soit 0,2% de plus que dans la zone Euro. Pour autant, ce n’est pas suffisant pour arriver à un solde positif entre création et destruction d’emplois. On compte 2,7 millions de demandeurs d’emploi dans le pays en 2011. “Le bilan économique et social du Nord-Pas-de-Calais en 2011 reflète largement les incertitudes liées aux perspectives de l’économie européenne” lit-on sous la plume de Hicham Abbas, rédacteur en chef du service études et diffusion de l’Insee. Le constat n’est pas positif : contraction de la production industrielle, de l’automobile, de l’agroalimentaire, des équipements… Peu d’indicateurs sont au vert, hormis celui du secteur des matériels de transport et de la construction qui a connu “une année dynamique en Nord- Pas-de-Calais (+20% pour la construction !). Mais les lendemains déchanteront avec un recul de l’investissement immobilier locatif. L’agriculture tire également son épingle du jeu grâce notamment au rééquilibrage du cours du lait. Côté emploi, les difficultés ne cessent pas pour la région : “L’emploi salarié privé s’est presque stabilisé à son niveau de la fin de l’année 2010 mais au prix d’un recours intensif à l’intérim dans le commerce et les services marchands.” En outre, l’emploi reste en berne dans l’industrie qui continue de perdre inexorablement des postes.

Un choc d’incertitude. C’est le plus haut niveau depuis 15 ans : 331 200 personnes sont demandeuses d’emploi dans la région en 2011. “Un record” inquiétant dixit Hicham Abbas. D’abord, l’enquête resitue le bilan régional dans le contexte national et mondial : “Les économies européennes ont enregistré une croissance vigoureuse au premier semestre 2011, dans la lignée de la bonne tenue de l’activité tout au long de l’année 2010. Toutefois, la crise de la dette grecque s’est traduite à l’été 2011 en un mouvement de défiance généralisée vis-à-vis des dettes souveraines de l’Ancien Continent au point de créer un choc d’incertitude qui a affecté les décisions d’investissements et de consommation. La dégradation des notes des dettes publiques est venue entériner un nouveau contexte financier pour la France, l’Italie et l’Espagne. Ce choc d’incertitude s’est traduit dans l’économie réelle par un ralentissement puis une contraction du PIB sur les deux derniers trimestres de l’année.” Voilà résumé le contexte international dans lequel s’inscrit la région, même si la France a échappé à une baisse de son PIB. Elle n’a pas pu éviter une nouvelle hausse du chômage avec 54 000 pertes de plus au bout de l’année 2011, et ce, malgré 121 000 postes crées au premier semestre 2011. L’Insee se risque alors à une perspective assise sur une analyse rétrospective des dix chocs d’incertitude qui ont eu lieu ces 25 dernières années (krach d’octobre 1987, guerre d’Irak, attentats du 11 septembre 2011…). Après ce type de choc, il faut compter une décennie pendant laquelle la production industrielle subit un impact négatif. Mais il faut attendre en moyenne le 20e mois pour que cette production retrouve son niveau de long terme. “Si l’on transpose ces jalons dans le cas de la crise de la dette publique, démarrée à l’été 2011, la tendance à la contraction de l’activité pourrait prendre place sur le second semestre 2011 et le premier semestre 2012, avant d’enregistrer un retour progressif vers des niveaux de long terme sur la fin 2012 et le début 2013”, expliquent les experts de l’Insee.

Le pouvoir d’achat fait du Yo-Yo. En France, les productions de l’ensemble des biens et des services ont tout de même enregistré une hausse de 2,2%. La production manufacturière fait mieux avec une croissance de 3%. On le doit aux secteurs aéronautique et spatial ainsi qu’à l’automobile qui a pu profiter à plein du soutien du gouvernement de l’époque, annihilé aujourd’hui à l’annonce de la fermeture du site de Peugeot à Aulnay. Les mauvaises nouvelles de l’an dernier viennent de la consommation des ménages qui décélère: +1,3% en 2010 et +0,3% en 2011, dans un contexte inflationniste mesuré (+2,5%). Paradoxe, le pouvoir d’achat a augmenté ! “Les revenus d’activité perçus par les ménage ont augmenté de 2,9% après une augmentation de 2% en 2010.” Mieux, les ressources des ménages ont crû de 3,1% et l’Insee a également mesuré des hausses de salaires conséquentes dans le secteur marchand. Les ménages ont en fait épargné dans ce contexte d’incertitude et les hausses d’impôts n’ont pas poussé à la consommation… Conséquence, pour 2012 “les premiers indicateurs laissent attendre un recul du pouvoir d’achat par unité de consommation de l’ordre de 0,6%, annulant tout ou partie du gain de l’année 2011”. C’est ainsi que l’on peut décripter l’augmentation du Smic le 1er juillet dernier : 1,4% pour absorber l’inflation et 0,6% de coup de pouce pour redonner un peu de souffle à la consommation des ménages…

Déficit du commerce extérieur. Pour la région, l’une des solutions au rétablissement d’une croissance durable réside dans le commerce extérieur. Le Nord-Pas-de-Calais est la troisième région exportatrice de France. Pourtant, elle souffre d’un “déséquilibre persistant de sa balance commerciale malgré une croissance significative de ses exportations”. La région a exporté en 2011 pour 32,2 milliards d’euros (soit 7% des exportations totales françaises) contre 34,2 en 2008. Ces exportations sont concentrées vers l’Union européenne (75,8%) et en particulier vers la Belgique (21,9%), l’Allemagne (14,2%), le Royaume-Uni (8%), l’Italie (6,9%) et l’Espagne (6,2%). Hors Etats-Unis, neuf des dix premiers clients de la région sont européens. On note une augmentation des exportations en direction du Moyen- Orient (+31,6%), des Amériques (+11,7%) et de l’Asie (+10,6%). A ce titre, les Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) importent de plus en plus en provenance du Nord-Pas-de-Calais : le Brésil fait un bond de 47,5% par exemple.
Côté produits, la sidérurgie reste toujours massive avec 14,4% des exportations régionales, suivie par l’agroalimentaire (13,9%) et la chimie (10,5%). Tous ces secteurs sont en augmentation en 2011 (sauf l’automobile). De l’autre côté, les importations font un bond de 15% en 2011 qui efface les baisses constatées depuis 2008 (hors hausse de 3% en 2010). Logiquement, ces importations viennent de Belgique (16,4%), d’Allemagne (13%), des Pays- Bas (5,6%) et du Royaume- Uni (5,2%). La Chine, troisième fournisseur de la région, représente près de 10% des importations. Au final, le solde régional est, comme celui de la France, largement déficitaire avec -5,5 milliards avec l’Asie et -2,4 milliards avec les Amériques. Nos importations concernent essentiellement le textile (articles d’habillement), les produits pétroliers raffinés et le coke, les matières plastique pour la chimie, les produits de la construction automobile…

A suivre : emploi, travail et démographie d’entreprise.