École de production
La Prod'Factory forme les jeunes à l'usinage
Depuis le mois d'octobre dernier, une école de production a ouvert ses portes à Épaux-Bézu, dans le sud de l'Aisne. La Prod'Factory - c'est son nom - forme les jeunes aux métiers de l'usinage avec une approche professionnelle et une pédagogie innovante. La formation met en lien des candidats décrocheurs scolaires ou en réorientation mais motivés avec un métier dont les besoins de recrutement sont larges.
Les métiers de l'usinage ont besoin de bras. Forte de ce constat partagé, l'UISA (Union des industriels du sud de l'Aisne), présidée par Luc Larratte, dirigeant de la société 3 Axes (usinage de pièces à destination du bâtiment), a décidé de monter la Prod'Factory. Il s'agit d'une école de production privée hors contrat ayant un modèle économique et une pédagogie propres. Cette école, l'une des 67 implantées sur le territoire national, est orientée sur les métiers de l'usinage.
Une école gratuite pour les élèves
« Notre école fonctionne un peu comme une entreprise avec un modèle renversé par rapport à ce qui se passe dans l’Éducation nationale, c'est-à-dire que nous sommes sur le faire pour apprendre, relève Mélanie Daudé, directrice de la Prod'Factory. Nos jeunes travaillent 60% du temps en atelier sur de véritables commandes de clients, ils génèrent du chiffre d'affaires qui va venir supporter la partie fonctionnement de l'école et sur le reste du temps, ils ont des enseignements généraux. Ils préparent un diplôme reconnu par l’État à savoir un CAP Conducteurs d'installation de production (CAP-CIP) puis ensuite un bac pro Technicien en réalisation de produits mécaniques (TRPM). »
Une douzaine d'élèves âgés de 15 à 19 ans constitue la première promotion de la Prod'Factory. Ils ont tous été recrutés sur le critère de leur motivation et ont des parcours scolaires et de vie variés. Certains sont de grands décrocheurs scolaires, d'autres sont en réorientation. « Nous les recrutons en effectuant un entretien avec les parents puis nous les prenons une semaine en immersion à l'école pour évaluer leur motivation et leur intérêt pour ces métiers et savoir si le rythme qui sera proposé ici va leur convenir, explique la directrice. Ils vont effectuer 35 heures par semaines dont plus de 20 en atelier et les cours généraux sont orientés par rapport à l'application professionnelle. On redonne du sens à ces matières générales. »
Les
jeunes sont en effet formés en mode entreprise et s'ils n'ont pas de
rémunération puisqu'ils ne sont pas en alternance, cette école
privée est totalement gratuite pour eux. « On finance tout,
les cahiers, les stylos, les bleus de travail, les caisses à outils,
ce qui est important puisque nous voulons être ouverts à tous les
publics et faire en sorte que l'environnement social et familial ne
soit pas un frein à la formation », précise Mélanie Daudé.
Cela semble fonctionner puisque tous les élèves accueillis depuis
octobre expriment le souhait de poursuivre leur cursus jusqu'au bac
pro.
14 promesses d'embauches
Il faut dire que la Prod'Factory n'hésite pas à se démarquer des formations scolaires classiques, sous la houlette de Jean-Paul Clerbois, retraité de l’Éducation nationale. « Nous cassons un peu les codes de ce qui existe dans l'enseignement : notre professeur de sport est une coach sportive, notre professeur d'anglais est un steward qui enseigne aussi dans les prisons, notre professeur de français, histoire-géographie est professeur de théâtre, détaille-t-elle. Nos maîtres professionnels en atelier sont d'anciens usineurs de plus de 20 ans d'expérience. »
Dans
les ateliers, les jeunes bénéficient de machines à la pointe de la
technologie, financées par des mécènes comme la fondation Total
Énergies. Certaines de ces machines peuvent coûter jusqu'à plus de
150 000 euros. Les entreprises se montrent très intéressées par
cette école. « Mon rôle est aussi de trouver des partenaires,
ce que j'ai dû faire au début mais maintenant ce sont les
industriels qui me contactent, par exemple en région parisienne,
parce qu'ils vont être confrontés à des départs en retraite et
qu'ils se retrouvent coincés pour recruter, précise la directrice.
J'ai aujourd'hui 14 promesses d'embauches pour 12 élèves, c'est
révélateur du besoin de recrutement. »
Si la Prod'Factory se centre aujourd'hui sur les métiers de l'usinage, elle n'exclut pas à l'avenir d'élargir son panel de formation. « Nous referons une étude mais nous avions déjà décelé deux autres métiers en tension, à savoir ceux de la chaudronnerie et de la soudure, souligne Mélanie Daudé, ancienne responsable qualité pour des industriels, ravie de relever ce challenge de la Prod'Factory. Il est possible que dans les 3 ans, nous ouvrions une nouvelle filière dans ces secteurs. Ce qui se passe aujourd'hui avec nos jeunes qui sont très motivés, retrouvent du sens dans ce qu'ils font, s'entraident, nous donne beaucoup de motivation. »