La Fondation du patrimoine, un lien avec la dynamique économique territoriale
La Fondation du patrimoine contribue à la restauration du patrimoine rural. Un euro qu'elle investit dans ces chantiers en génère 21 contribuant à dynamiser l'économie locale. Étroitement liée au monde économique, la Fondation entend renforcer cette dimension de son action. Interview d'Alexandre Giuglaris, Directeur général de la Fondation du patrimoine.
La Gazette : Quel rôle joue la Fondation du patrimoine sur le territoire et quelles sont ses relations avec le monde économique ?
Alexandre Giuglaris : La Fondation du patrimoine est un organisme à but non lucratif, reconnu d'utilité publique, dont l'objectif réside dans la sauvegarde du patrimoine en France. Elle sollicite les dons des particuliers et le mécénat des entreprises. En 2023, la Fondation a aidé à la réalisation de plus de 2 000 projets de restauration pour un budget de 114,5 ou 86 millions d'euros, selon si l'on y inclut ou pas les sommes destinées à la reconstruction de Notre-Dame. Car pour l'essentiel, l'activité de la Fondation est tournée vers le petit patrimoine rural : moulins, petits théâtres, monuments aux morts.... Cette orientation remonte à la création même de la fondation : en 1996, le patron d'Air Liquide constatait qu'aucune institution ne prenait en charge la restauration de l'église de son village, en mauvais état. Il a eu l'idée de mobiliser les entreprises... C'est ainsi que la participation des acteurs économiques est dans l'ADN même de la Fondation. La FFB, Fédération Française du Bâtiment, est l'un de ses membres fondateurs ; les CCI (Chambres de commerce et d’industrie) ont aidé à la constitution du réseau des bénévoles. Aujourd'hui, ils sont 961 et parmi eux, on compte de nombreux chefs d'entreprises, cadres du secteur privé...
Connaît-on précisément l'impact de la restauration de ce patrimoine rural sur l'économie locale et cet impact constitue-t-il un objectif en soi pour la Fondation ?
Un euro apporté par la Fondation génère 21 euros de retombées économiques directes, indirectes et induites. Dans les territoires ruraux, ces nombreux petits chantiers – quelques dizaines de milliers d'euros, le plus souvent - procurent du travail aux entreprises locales du BTP, aux artisans, couvreurs, charpentiers, plombiers, aux artisans d'art avec les vitraillistes... Ils nourrissent aussi le commerce de proximité. En outre, ces projets favorisent l'activité touristique dont le patrimoine constitue le principal levier. Pour ces territoires, il s'agit d'une véritable opportunité. Par son action, la Fondation participe donc à la dynamique économique territoriale. Prendre en compte cette dimension fait partie de son ADN, mais c'est une démarche que nous approfondissons. C'est ainsi qu'en 2020, nous avons fait réaliser l'étude qui nous a permis de mesurer cet impact. Dans le même sens, nous avons mis en place le prix « Patrimoine et tourisme local », dont Airbnb est mécène. Il vise à soutenir des projets de développement de l'offre touristique, musées, théâtres, mais aussi embellissement de propriétés privées, dans des territoires ruraux. Le montant total de ce mécénat s'élève à 5,6 millions d’euros sur trois ans et nous souhaitons le pérenniser.
Quelles sont les orientations d'avenir pour la Fondation, en ce qui concerne l'impact économique de son action ?
La prise en compte de la dimension de l'impact économique dans nos projets va être confortée suivant différents axes. Déjà, elle est formalisée dans nos processus de sélection de projets, par exemple, pour ceux financés par le Loto du patrimoine : nous avons accru l'importance accordée au critère de l'impact social et économique territorial. Il est à présent déterminant pour choisir entre deux dossiers d'intérêt patrimonial égal. On sait, par exemple, que lorsque l'on restaure une halle, une activité économique va s'y implanter... Par ailleurs, nous souhaitons renforcer notre soutien aux filières locales et à l'artisanat d'art. Déjà, nous abritons la Fondation Belle Main, consacrée à cette cause, et pour le compte de laquelle nous trouvons des projets de marqueterie, taille de pierre, ferronnerie d'art... Actuellement, nous sommes en discussion avec les pouvoirs publics pour mettre en place un dispositif complémentaire dans le cadre du Plan national pour les métiers d'art. En plus de ces projets, la Fondation nourrit la volonté de renforcer son action dans l'éco-rénovation du patrimoine bâti. J'en fais une priorité stratégique pour l'avenir. Il est logique que le patrimoine et la Fondation, à la place qui est la sienne, participent de la transition écologique.