La Dares alerte sur la viabilité des structures d'insertion par l'économie
Les structures d'insertion par l'activité économique ont subi durement les effets de la pandémie, montre une étude de la Dares. Ces difficultés touchent des publics déjà très fragiles et un dispositif dont le rôle pourrait s'avérer crucial alors qu'un chômage de masse menace.
Fait exceptionnel, en mai dernier, Emmaüs France, association qui promeut la réinsertion par l’activité économique, a sollicité la générosité publique. Ce n’est là qu’un exemple des difficultés que connaissent aujourd’hui les quelque 4 000 structures de l’insertion par l’activité économique (IAE). Leur modèle : elles fournissent du travail et un accompagnement à des publics très fragiles (136 000 individus environ) et sont financées pour partie par des subventions. Elles ont été frappées de plein fouet par la pandémie, montre une «enquête flash Covid-19» réalisée du 22 avril au 4 mai par la Dares, direction de l’Animation de la recherche, des études et des statistiques, au ministère du Travail.
Durant le confinement, près d’une structure sur trois a fermé ses portes, et la quasi-totalité d’entre elles ont stoppé leur activité. Toutes n’ont pas été touchées de la même manière : les entreprises d’insertion et les ateliers et chantiers, qui accueillent les salariés dans leurs propres locaux, ont le plus souvent fermé. En revanche, les associations intermédiaires et entreprises de travail temporaire d’insertion, qui proposent des missions auprès d’entreprises ou de particuliers, (comme l’entretien d’espaces verts), sont plus nombreuses à avoir poursuivi une activité. Celle-ci a néanmoins été réduite de plus de moitié. En termes d’emploi, «la situation majoritaire pendant le confinement est devenue le chômage partiel, qui concerne désormais plus de 80% des effectifs en insertion», note l’étude. Activité interdite durant le confinement, baisse de débouchés, impossibilité d’assurer des mesures de sécurité sanitaire, quasi impossibilité de recourir au télétravail… expliquent l’importance de ce taux.
La moitié des structures vont solliciter plus de subventions
Et la suite s’annonce difficile. Pour la reprise, les acteurs de l’IAE identifient de multiples obstacles, en tête desquels des difficultés d’ordre logistique ou organisationnel (86%), une disponibilité limitée de leurs salariés (51%) ou un problème de débouchés (29%). Certains redoutent également de devoir faire face à des problèmes humains tels que démobilisation, stress, ou autres problèmes psychologiques, pour leurs salariés en insertion, une population déjà fragile, mais aussi pour les encadrants.
Quant aux finances, le panorama est sombre : 98% des structures anticipent un impact négatif sur leur résultat net de fin d’année, avec des baisses supérieures à 20%, pour 43% des cas. Pour autant, ces acteurs entendent faire face en augmentant leur activité, plutôt qu’en diminuant leurs effectifs : 68% d’entre eux veulent accentuer leurs efforts de démarches commerciales, 49% prévoient de solliciter des subventions supplémentaires, et 37% se repositionner sur de nouvelles activités. A contrario, ils ne sont que 11% à vouloir réduire leurs effectifs de salariés en insertion et 9% leurs permanents.
Leurs pronostics pour l’avenir demeurent prudents : la majorité des structures pensent que l’activité mettra deux à trois mois (37%), ou plus de trois mois (34%) à revenir à la normale. Pis, elles sont même 6% à estimer que leur activité a été affectée durablement et ne reviendra pas à la situation antérieure. Une perspective alarmante, à l’heure où les conséquences indirectes de la pandémie fragilisent encore plus les populations déjà précaires. En 2019, un rapport de la Cour des comptes jugeait les résultats de l’insertion par l’activité économique «encourageants».