La commande publique, un outil pour rebondir ?

Bercy publie un guide à la commande publique, qui s'adresse notamment aux PME. Avec une promesse : les marchés publics leur sont accessibles et ils peuvent les aider à rebondir dans cette difficile période.

© Animaflora PicsStock
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L'enjeu ? 11,4 milliards d'euros, dont 6,7 milliards consacrés à la rénovation des bâtiments publics, et 4,7 milliards dans le secteur ferroviaire. Le 10 mai, lors d'une conférence de presse en ligne, Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, chargée de l’Industrie, a présenté le guide «Les marchés publics au service de la relance économique des entreprises : rebondir avec les marchés publics». En cette période très incertaine, ces derniers peuvent représenter une véritable opportunité pour les PME, d'après Bercy. 

Le guide vise à faire tomber les barrières qui existent traditionnellement dans ce domaine. «Il se lit en cinq minutes», promet Pierre Pelouzet, Médiateur des entreprises. Ce dernier a contribué à la rédaction de l'opuscule avec la direction des Affaires juridiques de Bercy, et aussi, avec la participation d'organisations et d'instances patronales comme le Medef, la CPME et l'U2P, ainsi que des CCI et des CMA (chambres des métiers et de l’artisanat).

Téléchargeable sur le site Internet de Bercy, l'ouvrage liste par exemple les documents à fournir pour participer à un appel d'offres public et expose les avantages de répondre «en groupement», à plusieurs entreprises. Il donne également des pistes, pour se tenir au courant des opportunités. Par ailleurs, il récapitule de manière claire et synthétique, l'ensemble des mesures qui concernent plus spécifiquement les PME, et dont certaines ont été prises dans le cadre de la crise.

Gagner 45 jours de trésorerie

«Nous savons que la relance repose sur la trésorerie des entreprises (…). La commande publique permet d'obtenir immédiatement de l'argent», argumente Pierre Pelouzet. Plusieurs dispositifs de la commande publique vont dans ce sens : les PME ont la possibilité de bénéficier d’un préfinancement dès la prise de commande, sans attendre la livraison et l’émission des factures correspondantes. Ces nouveaux financements permettent de gagner en moyenne 45 jours de trésorerie par rapport à l’affacturage classique, promet Bercy. Ils sont garantis par l’État jusqu'au 30 juin 2021. Autre dispositif, le paiement fournisseur anticipé, promu par le Médiateur des entreprises, permet d’être payé plus rapidement à moindre coût.

Au delà de la question de la trésorerie, un ensemble de mesures est destiné à élargir ou faciliter l'accès à la commande publique. Par exemple, jusqu’au 31 décembre 2023, les entreprises ne peuvent être écartées en raison d’une baisse du chiffre d’affaires, liée aux conséquences de la crise sanitaire, dans l’appréciation de leur capacité économique et financière à exécuter un marché. Une autre mesure vise spécifiquement à rendre les marchés publics accessibles aux PME et artisans : une part minimale de 10% de tous les marchés publics globaux leur est réservée, qu'il s'agisse de marchés de partenariat, de marchés de conception-réalisation, de marchés globaux de performance ou de marchés globaux sectoriels. 

Par ailleurs, pour stimuler la relance, les procédures concernant les marchés de travaux ont été assouplies : depuis le 1er janvier 2020, les marchés inférieurs à 40 000 euros HT peuvent être passés selon une procédure «allégée», plus simple pour les acheteurs et les fournisseurs. Et le seuil en dessous duquel les marchés publics de travaux sont dispensés de mise en concurrence préalable a été relevé à 100 000 euros HT contre 40 000 euros HT précédemment , et ce jusqu’au 31 décembre 2022.

La commande publique, un outil pour changer de modèle

Plus globalement, le guide récapitule les règles d'une commande publique qui a beaucoup évolué en 2019. L'un des enjeux de cette transformation résidait précisément dans le fait de rendre les marchés publics plus accessibles aux PME. Actuellement, celles-ci représentent plus de 62% des titulaires et 75% des sous-traitants dans les marchés publics, d'après l'étude sur la sous-traitance de l’OECP, Observatoire économique de la commande publique (juillet 2020). La situation s'est donc améliorée, par rapport aux années précédentes. Entre 2014 et 2017, la part des PME dans la commande publique a en effet diminué : elle est passée de 62 à 57,5% en nombre de contrats et de 33 à 29,4% des montants (pour les marchés supérieurs à 90 000 euros HT), d'après l'OECP.

Mais l'objectif des réformes de la commande publique résidait aussi dans l'intégration de problématiques sociales et environnementales. A présent, une clause concernant ce dernier point est systématiquement intégrée dans les marchés publics. Et une clause sociale «pré-rédigée», optionnelle, peut être activée. «Il s'agit de permettre aux collectivités locales de mener une politique au service de la transition écologique et de l'inclusion sociale, en utilisant le levier de la commande publique», précise Agnès Pannier-Runacher. 

L’État montre l'exemple : en février dernier, il a ainsi inclus des contraintes sociales et environnementales dans le cadre d'un achat public de masques filtrants à filtration garantie (200 millions d'euros). Les entreprises se sont, notamment, engagées à utiliser du matériel recyclé, ou alors, à prendre en compte leurs émissions de gaz à effet de serre dans leur prestation de transport. En outre, «deux lots ont été réservés aux entreprises du secteur de l'inclusion sociale. 500 emplois en insertion ont été sécurisés dans le cadre de ce marché», témoigne Agnès Pannier-Runacher,