La CMA Hauts-de-France inquiète pour l’avenir de l’apprentissage
Alors que la loi de finances 2025 se fait attendre, la Chambre des Métiers et de l’Artisanat (CMA) des Hauts-de-France alerte sur sa situation et anticipe des coupes budgétaires qui pourraient fragiliser un modèle pourtant éprouvé.

« Nous sommes tout à fait conscients que nous devons être solidaires face à la dette. Une partie de celle-ci a servi à sauver l’artisanat lors de la crise sanitaire. Cependant, la manière dont l’État gère la formation et, en particulier, l’apprentissage est incompréhensible », s’agace Laurent Rigaud, président de la CMA Hauts-de-France.
Ce dernier dénonce à la fois l’arrivée massive et non régulée d’acteurs privés dans le secteur, l’incertitude engendrée par l’instabilité politique ainsi que les réductions des dotations des CMA. Une perte sèche de 4 millions d’euros cette année au niveau régional. « On nous met la tête sous l’eau. Doit-on arrêter des filières ? Fermer des centres de formation ? Regrouper des classes ? », s’interroge Laurent Rigaud qui déplore la soudaineté des décisions. Aujourd’hui, la CMA Hauts-de-France, qui emploie 1 200 collaborateurs, forme chaque année près de 17 000 apprenants sur 35 sites.
Une baisse des candidats à prévoir ?
« Contrairement aux opérateurs privés, qui profitent pleinement des ressources de l’apprentissage, en tant qu’acteur public, nous répondons uniquement aux besoins de la population. Dans les Hauts-de-France, nous avons choisi de développer l’artisanat sur l’ensemble du territoire, y compris via de petits centres de formation comme ceux de Caudry, La Capelle ou Château-Thierry », explique Laurent Rigaud. Ce maillage garantit l’accessibilité des formations à tous les jeunes, y compris ceux qui rencontrent des difficultés de mobilité. « Si ces centres ferment, où iront-ils se former ? Et les entreprises, à qui s’adresseront-elles ? » questionne-t-il, rappelant les investissements réalisés pour équiper les sites de plateaux techniques de pointe et la pertinence des formations proposées.
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Après plusieurs années de forte croissance, le nombre de contrats d’apprentissage n’a progressé que de 2% en 2023. « Ce n’est que le début du recul » prédit Laurent Rigaud, sensible à l’inquiétude ambiante. « On démontre que l’apprentissage est une voie d’excellence : les jeunes obtiennent un emploi, un contrat, des compétences. Mais en même temps, des outils de formation ferment. Que vont faire ces jeunes ? Que décideront leurs familles ? », poursuit-il avant de critiquer la vision à court terme de l’État.
Une vision court-termiste
« Il faut arrêter de puiser dans les fonds de la formation. Nous risquons de sacrifier notre jeunesse », s’indigne-t-il. Sur le plus long terme, le président de la CMA des Hauts-de-France redoute une hausse des charges pour les employeurs d’apprentis. « Ce serait tout simplement la mort de l’apprentissage. Les artisans recruteront directement des gens qui seront formés à des tâche, alors que nous, nous enseignons un métier ».
Malgré tout, Laurent Rigaud refuse de céder au pessimisme. « Il faut rester combatif. L’artisanat est un secteur d’avenir, créateur d’emplois et de richesses locales. Nous devons nous battre pour pérenniser ces métiers », conclut-il.