La CMA Hauts-de-France inquiète pour l’avenir de l’apprentissage

Alors que la loi de finances 2025 se fait attendre, la Chambre des Métiers et de l’Artisanat (CMA) des Hauts-de-France alerte sur sa situation et anticipe des coupes budgétaires qui pourraient fragiliser un modèle pourtant éprouvé.

Le 31 décembre 2023, on comptait en France plus d’un million d’apprentis, contre 487 000 en 2019 (source : DARES). (© Pixabay)
Le 31 décembre 2023, on comptait en France plus d’un million d’apprentis, contre 487 000 en 2019 (source : DARES). (© Pixabay)

« Nous sommes tout à fait conscients que nous devons être solidaires face à la dette. Une partie de celle-ci a servi à sauver l’artisanat lors de la crise sanitaire. Cependant, la manière dont l’État gère la formation et, en particulier, l’apprentissage est incompréhensible », s’agace Laurent Rigaud, président de la CMA Hauts-de-France.

Ce dernier dénonce à la fois l’arrivée massive et non régulée d’acteurs privés dans le secteur, l’incertitude engendrée par l’instabilité politique ainsi que les réductions des dotations des CMA. Une perte sèche de 4 millions d’euros cette année au niveau régional. « On nous met la tête sous l’eau. Doit-on arrêter des filières ? Fermer des centres de formation ? Regrouper des classes ? », s’interroge Laurent Rigaud qui déplore la soudaineté des décisions. Aujourd’hui, la CMA Hauts-de-France, qui emploie 1 200 collaborateurs, forme chaque année près de 17 000 apprenants sur 35 sites.

Une baisse des candidats à prévoir ?

« Contrairement aux opérateurs privés, qui profitent pleinement des ressources de l’apprentissage, en tant qu’acteur public, nous répondons uniquement aux besoins de la population. Dans les Hauts-de-France, nous avons choisi de développer l’artisanat sur l’ensemble du territoire, y compris via de petits centres de formation comme ceux de Caudry, La Capelle ou Château-Thierry », explique Laurent Rigaud. Ce maillage garantit l’accessibilité des formations à tous les jeunes, y compris ceux qui rencontrent des difficultés de mobilité. « Si ces centres ferment, où iront-ils se former ? Et les entreprises, à qui s’adresseront-elles ? » questionne-t-il, rappelant les investissements réalisés pour équiper les sites de plateaux techniques de pointe et la pertinence des formations proposées.

La CMA Hauts-de-France forme à plus de 40 métiers, du CAP au Bac +3. (© Aletheia Press / DLP)

Après plusieurs années de forte croissance, le nombre de contrats d’apprentissage n’a progressé que de 2% en 2023. « Ce n’est que le début du recul » prédit Laurent Rigaud, sensible à l’inquiétude ambiante. « On démontre que l’apprentissage est une voie d’excellence : les jeunes obtiennent un emploi, un contrat, des compétences. Mais en même temps, des outils de formation ferment. Que vont faire ces jeunes ? Que décideront leurs familles ? », poursuit-il avant de critiquer la vision à court terme de l’État.

Une vision court-termiste

« Il faut arrêter de puiser dans les fonds de la formation. Nous risquons de sacrifier notre jeunesse », s’indigne-t-il. Sur le plus long terme, le président de la CMA des Hauts-de-France redoute une hausse des charges pour les employeurs d’apprentis. « Ce serait tout simplement la mort de l’apprentissage. Les artisans recruteront directement des gens qui seront formés à des tâche, alors que nous, nous enseignons un métier ».

Malgré tout, Laurent Rigaud refuse de céder au pessimisme. « Il faut rester combatif. L’artisanat est un secteur d’avenir, créateur d’emplois et de richesses locales. Nous devons nous battre pour pérenniser ces métiers », conclut-il.