«Nouvelles Routes de la soie»

La Chine ouvre ses comptoirs commerciaux dans les Hauts-de-France

Les ports intérieurs des Hauts-de-France sont devenus une sorte de comptoirs commerciaux de la Chine, grâce aux «nouvelles Routes de la soie», lancées par Pékin en 2013.

Le 2 février dernier, le port de Valenciennes a reçu 40 conteneurs en provenance de Chine, via le port allemand de Duisbourg. (@Aletheia Press  / Benoît Dequevauviller)
Le 2 février dernier, le port de Valenciennes a reçu 40 conteneurs en provenance de Chine, via le port allemand de Duisbourg. (@Aletheia Press / Benoît Dequevauviller)

«Le projet du siècle». Voilà comment Xi Jinping, avait présenté son rêve de connecter l’Asie au reste du monde. A l’époque, le président chinois promettait l’établissement d’une «ceinture économique de la Route de la soie», afin d’améliorer les moyens de communication et les réseaux de transports par de nouvelles voies terrestres et maritimes.

Huit ans après, c’est une réalité, notamment dans notre région. «Tout a démarré par une visite de Xavier Bertrand en Chine en 2018», raconte Franck Dhersin, vice-président des Hauts-de-France en charge des infrastructures de transport. En 2019, un partenariat est signé entre les Hauts-de-France et la province du Zhejiang, quatrième région économique de Chine. «Et un autre entre le port de Dunkerque et celui de Ningbo», ajoute l’élu qui est aussi maire de Téteghem. Depuis, la Chine tisse sa toile afin d’écouler la production de son «plus grand atelier du monde», autoproclamé par ses dirigeants…

Expédier aussi vers la Chine

Pour Franck Dhersin, l’objectif des élus locaux est clair : «renforcer l’attractivité de notre région». Selon lui, ces «nouvelles Routes de la soie » ne sont pas qu’une porte ouverte afin d’inonder l’Europe de marchandises chinoises. «Il doit y avoir réciprocité. Notre objectif est aussi d’expédier nos produits vers la Chine.» De la bière, du malt ou encore de la ferraille empruntent déjà régulièrement le chemin retour. «Les grandes industries de notre région, comme Lesaffre, ne peuvent que bénéficier de cette nouvelle donne», explique un autre élu.

Franck Dhersin y voit aussi un autre intérêt : «Les Chinois, mais aussi les Américains, les Indiens ou les Brésiliens ont compris qu’il fallait de plus en plus produire sur place. On veut donc les attirer chez nous. Cela participera à la réindustrialisation de notre pays.» Et l’élu du Littoral prêche pour sa paroisse : «Cela tombe bien, au port de Dunkerque, nous avons 2 000 m² à exploiter.»

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Pour Franck Dhersin, l’objectif des élus locaux est clair : «renforcer l’attractivité de notre région». (@Aletheia Press / LB)


Une ligne directe entre la Chine et Dourges

D’autres ports régionaux ne sont pas en reste. Le 2 février, l’entreprise Contargo a réceptionné, pour la première fois sur son terminal fluvial de Valenciennes, une barge comptant une quarantaine de conteneurs en provenance de Chine. «La partie centrale de la Chine est moins développée que les zones côtières, souligne Gautier Hotte, président du syndicat mixte qui gère Ports de l’Escaut. Ils cherchent d’autres moyens d’acheminement.»

En fait, les trains chinois arrivent par centaines à Duisbourg, devenu un des hubs les plus énormes d’Europe. Les marchandises sont ensuite acheminées par voie fluviale vers leurs destinations finales. Mais pas que… Depuis peu, une ligne ferroviaire relie directement la province de Jinhua à la plateforme multimodale de Dourges. En 19 jours, les conteneurs sont acheminés sur plus de 10 000 kilomètres. Une solution louée par les industriels nordistes, surtout depuis que le prix du transport maritime a explosé avec la crise sanitaire…

Des réticences

Mais ces nouvelles Routes de la soie ne plaisent pas à tout le monde. Elles ne peuvent être celles d’une nouvelle «hégémonie»  plaçant les nations en «vassalité» face à Pékin, alertait Emmanuel Macron en janvier 2018. Une position réfutée par des acteurs nordistes. «Cela va aider à consolider l’industrie dans notre pays, assure Franck Dhersin. Prenez la Yaris, même si là, on parle du Japon. Elle vient d’être élue meilleure voiture d’Europe. Or, c’est un véhicule 100% Made in Hauts-de-France. De toute façon, nous sommes en concurrence avec les ports polonais ou néerlandais. Ce que nous n’attirons pas chez nous, partira ailleurs…» Une fatalité partagée par Gautier Hotte : «Si les gens acceptaient de payer leur ordinateur 300 euros de plus, il serait fabriqué en France. On ne répond qu’à la demande des consommateurs.»