L’utilité des pactes d'associés

Le pacte d’associés est un outil fondamental pour réguler les relations entre associés et compléter les statuts de la société. Bien qu'il ne soit pas obligatoire, il permet de prévenir les conflits potentiels et de clarifier les droits et obligations des parties. En ce sens, le pacte d’associés offre une plus grande sécurité juridique et permet de gérer efficacement les situations délicates, notamment les blocages au sein de la société.

Emilie Damoisy-Bertrand, notaire associée – Phi Law Avocats et Notaires à Marcq-en-Baroeul. ©Lena Heleta
Emilie Damoisy-Bertrand, notaire associée – Phi Law Avocats et Notaires à Marcq-en-Baroeul. ©Lena Heleta
  1. La rédaction du pacte d’associés en conformité avec celle des statuts

La jurisprudence récente, en particulier l’arrêt du 12 octobre 2022 (n° 21-15.382), a précisé que les pactes d’associés ne peuvent pas déroger aux statuts de la société. Les statuts prévalent sur les accords extrastatutaires, même si ces derniers les complètent. De même, certaines clauses sont moins efficaces dans un pacte, de sorte qu’il vaut mieux les intégrer dans les statuts.

Ainsi, il est crucial pour les dirigeants de réaliser un audit de leurs statuts afin de vérifier leur compatibilité avec les clauses du pacte d’associés. Si nécessaire, les statuts doivent être réécrits pour garantir leur cohérence et assurer que les deux documents – statuts et pacte – se complètent et fonctionnent en harmonie.

Par ailleurs, demander à son notaire de rédiger les statuts de la société et le pacte d’associés est la garantie que les actes soient confidentiels, conformes aux intérêts des parties, ainsi qu’aux normes juridiques et fiscales.

2. Le pacte d’associés dans une situation égalitaire

L'un des cas les plus évidents pour mettre en place un pacte d’associés est celui d'une société égalitaire. Le blocage est un risque majeur, car chaque associé détient le même pouvoir décisionnel, surtout quand la direction de la société est également partagée.

Cette situation peut mener à la nomination d’un administrateur ad hoc pour résoudre les différends, voire à la dissolution-liquidation de la société pour mésentente paralysant son fonctionnement.

Dans cette configuration, la clause "shotgun" permet à l’un des associés de proposer un rachat des parts de l’autre à un prix déterminé, avec l’obligation pour l’autre associé de vendre ses parts ou d'acheter celles de l'associé proposant la vente. Ce mécanisme permet de résoudre rapidement les blocages sans recourir à une dissolution ou à des procédures judiciaires longues et coûteuses.

3. Le pacte d’associés en présence d’un associé minoritaire

Un associé minoritaire n’a pas la possibilité de prendre les décisions importantes et peut être soumis à des décisions qui ne sont pas dans son intérêt. Cependant, un pacte d’associés peut être un outil puissant pour protéger ses droits.

L’associé minoritaire a ainsi tout intérêt à négocier un certain nombre de clauses pour protéger sa position :

  • Droit de retrait (ou promesse de rachat) : cela permet à l'associé minoritaire de quitter la société facilement en cas de conflit ou de blocage. Il peut ainsi forcer la vente de ses parts, le cas échéant à un prix déterminé à l’avance.
  • Clause anti-dilution : Elle garantit à l'associé minoritaire de maintenir son pourcentage de participation en cas d’augmentation de capital. Cela permet d'éviter que sa part ne soit diluée à chaque levée de fonds ou émission de nouvelles actions.


  • Politique de dividende : Le pacte peut définir des règles claires pour la répartition des bénéfices, garantissant que l’associé minoritaire bénéficie d'une part équitable des dividendes générés par la société.


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L’associé majoritaire ne doit pas craindre d’accorder des droits à l’associé minoritaire, car il peut solliciter la souscription d’obligations en contrepartie :

  • Une clause de rachat forcé (ou promesse de vente), qui permet au majoritaire de racheter les parts du minoritaire dans des situations spécifiques.

  • Clause de drag-along : Elle permet au majoritaire de forcer la vente des parts du minoritaire si un acheteur est trouvé, ce qui peut faciliter la cession de la société ou l’entrée d’un investisseur stratégique.

  • Clause de non-concurrence : Elle protège l'entreprise en empêchant un ancien associé de monter une société concurrente, ce qui garantit que les informations stratégiques et commerciales de la société ne soient pas utilisées contre elle après le départ de l'associé minoritaire.



    4. Le pacte d’associés pour les fonds d’investissement

Les fonds d’investissement ont des besoins spécifiques lorsqu’il s’agit de pactes d’associés. Ces investisseurs cherchent à protéger leur investissement tout en assurant une sortie rentable à terme. Certaines clauses sont donc particulièrement adaptées :

  • Droit d'information renforcé : Le droit d'information renforcé peut inclure la possibilité d'exiger une communication régulière de certaines informations essentielles sur la gestion de l'entreprise.

  • Clause de liquidité : Elle permet aux fonds d’investissement de planifier leur sortie, que ce soit par le rachat des parts, l’introduction en bourse ou la vente de la société, en prévoyant, le cas échéant une clause d’évaluation de la société.

  • Clauses de tag-along et drag-along : elles permettent aux fonds d’obtenir une sortie forcée en cas de vente de la société, ce qui garantit que les titres du fonds pourront être vendues dans les mêmes conditions que celles des majoritaires.


En définitive, les pactes d’associés, malgré leur caractère accessoire, se révèlent essentiels pour anticiper les défis liés à la gouvernance d’une entreprise et garantir une coopération harmonieuse entre les associés. Ainsi, le pacte d’associés se présente comme un réel outil pour renforcer la pérennité des projets entrepreneuriaux.


Par Emilie Damoisy-Bertrand, notaire associée – Phi Law Avocats et Notaires à Marcq-en-Baroeul