Entreprises de proximité
L'U2P appelle à alléger le coût du travail
L’Union des Entreprises de Proximité, U2P, qui représente 3,7 millions d’entreprises en France, dresse un état des lieux de leur situation. Pour l’organisation patronale, deux sujets majeurs sont à l’ordre du jour : la sécurité des commerces et le pouvoir d’achat des Français.
Moins 1,4% de volume d’activité, sur un an. La baisse de chiffre d’affaires des entreprises de proximité s’est accentuée au cours du second trimestre 2024. Parmi les secteurs les plus impactés, le bâtiment (-3%) et l’alimentation (-1,9%). Outre « des carnets de commandes qui commencent à se tasser », prévient Michel Picon, président de l’U2P, la trésorerie des entreprises de proximité s’est davantage fragilisée, avec 22% des chefs d’entreprise qui ont déclaré une détérioration au deuxième trimestre, contre 16%, trois mois auparavant. « La situation économique, particulièrement pour les TPE, nous inquiète beaucoup, a affirmé Michel Picon, lors de la conférence de rentrée de l’U2P. Cette situation pèse sur l’inquiétude des chefs d’entreprise, sur leur anxiété et sur le manque de visibilité. Ce n’est pas encore catastrophique mais cela pourrait le devenir si le gouvernement ne répond pas à un certain nombre d’injonctions qui se posent aujourd’hui ».
Évoquant les quelque 70 000 défaillances d’entreprises prévues en 2024, il rappelle que celles-ci étaient en hausse de 22% entre juin 2023 et juin 2024 et que les dernières statistiques de la Banque de France sont « inquiétantes ». S’il explique ces défaillances en partie par la fin de l’après Covid et des aides de l’Etat, il ne met pas pour autant de côté la situation économique devenue « préoccupante. La maison ne brûle pas encore, mais ça chauffe ». Pour lui, le nouveau gouvernement doit s’attaquer à deux sujets majeurs, l’ordre et la sécurité et la question du pouvoir d’achat et des rémunérations. « Il y a urgence de se préoccuper des maux de ce pays », a-t-il asséné.
De la sécurité au pouvoir d’achat
« J’entends tous les jours des commerçants qui sont braqués, des vitrines qui sont taguées, […] des artisans qui se font voler leur camionnette avec tout leur matériel, des pharmaciens obligés d’employer des vigiles dans leur officine pour ne pas se faire piller, confie Michel Picon. Le sujet de la sécurité et de l’ordre pèse sur les plus faibles et les plus fragiles, et donc sur les petites entreprises ».
Autre axe de travail, le pouvoir d’achat. Ecartant une augmentation des rémunérations « brutale qui fera fermer des entreprises et sera préjudiciable à l’ensemble des salariés », il appelle de ses vœux à faire en sorte que le travail soit « plus rémunérateur ». Remettant en cause le système français actuel où « la protection sociale pèse trop sur le travail », il appelle de ses vœux à mener une réflexion pour alléger le coût du travail et transférer les charges qui pèsent sur ce dernier. Pour lui, c’est à la fois « la structuration même de la rémunération du travail qu’il faut revoir et le financement de la protection sociale ». Et de citer plusieurs pistes : une TVA ciblée, un relèvement de la CSG ou encore une réévaluation de la taxation des retraites, des héritages ou des dividendes. « Il est urgent de se mettre au travail […] Sinon il y aura des mouvements sociaux. Je suis très inquiet ».
Parmi les attentes de l’organisation patronale, figurent également les aides accordées aux entreprises, et notamment celles à l’apprentissage, et MaPrimeRénov', cette aide de l'État à destination des particuliers pour réaliser des travaux de rénovation énergétique. « Rogner sur l’aide [à l’apprentissage, NDLR], est une erreur stratégique, car c’est un investissement social », a justifié Christophe Sans, président de l’UNAPL (Union nationale des professions libérales). Michel Picon, a, lui, remis en cause cette aide pour les grandes entreprises qui n’en auraient pas réellement besoin : « C’est un effet d’aubaine », clame-t-il. Jean-Christophe Repon, président de la Capeb (Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment) fustige, de son côté, une éventuelle baisse de MaPrimeRénov' : « Ce n’est pas entendable. C’est une aide au pouvoir d’achat des particuliers qui donne de l’activité aux artisans […] La décarbonation et la rénovation énergétique, c’est une priorité ».
Au-delà de l’enjeu sur l’aide à l’apprentissage, Christophe Sans déplore les « incertitudes qui pèsent sur l’économie » et engendrent un « attentisme sur l’emploi ». Un attentisme qu’observent également Michel Picon, qui appelle à « y mettre un terme », et Laurent Munerot, président de la CNAMS (Confédération nationale de l'Artisanat des métiers et des services). « A cause des atermoiements du gouvernement qui ne donnent pas de bonnes perspectives, tout le monde attend pour investir et embaucher ».
Commission d’indemnisation pour les JOP
Même le souffle des JOP ne semble pas avoir profité à tous. Si Michel Picon a qualifié les JOP24 de « grand moment de fraternité », il déplore néanmoins qu’« un certain nombre de professions aient été malheureusement victimes de leur organisation. Les petits commerces n’ont pas trouvé le chiffre d’affaires et n’ont pas bénéficié de la manne touristique que cela représentait ». Et de citer, pêle-mêle, les bars, restaurants, et les chauffeurs de taxi qui se sont retrouvés « en grande difficulté, contrairement à ce que l’on pensait » ou encore le commerces de bouche « mis à mal » avec la suppression des marchés ou la fermeture de leurs commerces.
De fait, l’U2P a poussé à la mise en place d’une commission d’indemnisation pour les entreprises victimes d ’« un préjudice direct ». Celle-ci devrait se réunir début 2025. Pour être indemnisées, elles devront apporter la preuve de causalité entre la baisse de leur CA et l’organisation des JO. Michel Picon salue, à ce titre, l’annonce par le gouvernement des reports de charge pour les entreprises qui se sont retrouvées «fermées depuis plusieurs semaines ». Joël Mauvigney, président de la CGAD (Confédération générale de l'Alimentation en détail) confirme ces difficultés : « Cela n’a pas été euphorique. Certains secteurs ont travaillé plus que d’autres, en fonction des zones », mettant en avant la fermeture de certains et le manque de clientèle parisienne. Ce dernier prévient que les trésoreries des entreprises de l’alimentation sont « en zone rouge-orange », les entreprises ayant rogné sur leurs marges avec la hausse des salaires et du prix des denrées alimentaires.