L’industrie face à bon nombre d’incertitudes
Les récentes annonces de fermeture de sites de fleurons de l’industrie hexagonale entraînent un climat d’incertitude général. Si les adaptations, une grande résilience, le développement de nouvelles filières basées sur la nécessaire décarbonation du secteur, sont présentes, elles pourraient fortement se gripper. La région n’échappe pas à la règle.
La Lorraine, terre d’industries ! La maxime n’est pas nouvelle et l’adage «qu’il n’y a pas de territoires forts sans une industrie forte», comme aime le rappeler Nathalie Vaxelaire, la présidente de l’UIMM (Union des industries et métiers de la métallurgie) Lorraine, est bien connu.
«Pour la force de nos territoires et pour le financement de notre modèle social, il faut réindustrialiser. Un emploi industriel génère quatre emplois directs (…) Nous sommes devant de nombreux enjeux, il faut continuer à consolider nos acquis et à nous battre, notre avenir en dépend.» Reste qu’aujourd’hui les vents conjoncturels mauvais font souffler une vaste inquiétude. L’ensemble des notes conjoncturelles sont unanimes. Le climat général des affaires s’est fortement dégradé avec un repli de la confiance des chefs d’entreprise. En se basant sur la dernière note de l’Insee de début novembre, les observateurs du secteur résument la situation.
Baisse de la demande
«Ce repli est dû à une baisse importante du climat des affaires dans l’industrie, l’indicateur pour le secteur perdant 7 points sur un mois. Hors pandémie (avril 2020), il s’agit de la plus forte baisse mensuelle depuis novembre 2008. Les industriels font état d’une forte baisse des perspectives de production et des nouvelles commandes. Celles-ci sont désormais à leur niveau le plus bas depuis début 2021. Ils font état d’une hausse de l’incertitude économique et d’une baisse prévue des effectifs. Ils anticipent une forte baisse de la demande au cours des prochains mois et tablent sur des investissements beaucoup plus faibles au cours de l’année prochaine.»
Cet état de fait est corroboré par les annonces récentes de multiples plans sociaux. Le virage engagé de la réindustrialisation apparaît plus que compromis.
Dans son baromètre industriel de novembre, l’État stipule «qu’après une réindustrialisation forte en 2022 et 2023 avec respectivement 176 et 189 ouvertures nettes, le premier semestre 2024 a enregistré une hausse modérée des ouvertures et extensions de sites industriels.» Le tout avec de fortes disparités sectorielles. «L’industrie verte et celles des biens de consommation gardent un rythme soutenu en termes d’ouverture (…) Les secteur les plus énergo-intensifs connaissent une nette décélération à l’image de la plasturgie et du transport et plus particulièrement l’automobile.»
D’après ce baromètre, les territoires de l’Est accusent une baisse des ouvertures «mais demeurent attractifs avec des sites à forte valeur ajoutée ouverts.» Cette fameuse valeur ajoutée passe par ces filières d’excellence mises en avant liées à la sacro-sainte décarbonation engagée mais où les moyens ne semblent pas vraiment suivre (voir encadré). Le contexte est tendu. Les nouvelles adaptations à venir risquent d’être plus que délicates, voire impossibles pour certains.
Décarbonation : le compte est bon ?
Une industrie décarbonée ! L’objectif est brandi comme un étendard pour que le secteur contribue à cette neutralité carbone tant recherchée. L’État s’est engagé à soutenir le secteur dans ce domaine. Pour bon nombre de décideurs politiques et de présidents de Région, le compte ne semble pas y être. «L’État s’est engagé à mettre 10 milliards d’euros sur la table, rendant possible une baisse de 10 % des émissions du secteur. Aujourd’hui, seuls 4 milliards ont été programmés pour la décarbonation et, dans le projet de loi de finances pour 2025, le compte n’y est pas», assurent plusieurs signataires d’une tribune, dont Franck Leroy, le président de la Région Grand Est, chez nos confrères de la Tribune du dimanche début novembre. Le 13 novembre, le gouvernement présente un amendement prévoyant un soutien supplémentaire d’1.55 milliard d’euros.