L'entrepreneuriat reprend vie, d'après Initiative France
Bonne nouvelle, le réseau d'accompagnement Initiative France a vu affluer les demandes de nouveaux entrepreneurs en 2021. Sa priorité pour la suite : favoriser la monté en puissance des entrepreneuses.
Les résultats sont « extrêmement encourageants », estime Guillaume Pepy, président d'Initiative France. Le réseau de financement et d'accompagnement de jeunes entreprises présentait son dispositif d'encouragement à l'entrepreneuriat au féminin et le bilan de ses activités à la mi-année 2021, lors d'une conférence de presse, à Paris, le 6 juillet.
Au cours de l'année 2020, les platesformes locales d'Initiative France se sont avant tout mobilisées pour soutenir dans la crise les entreprises qu'elles accompagnaient déjà, notamment en les aidant à obtenir des aides et en en octroyant. Une activité qui s'est poursuivie decrescendo cette année, avec en moyenne, 1 350 soutiens d'urgence accordés chaque mois. Mais le fait marquant, pour les six premiers mois de cette année, ce sont les 9 821 accompagnements à la création d'entreprise réalisés par Initiative France. « Après le creux de l'an dernier, on se rapproche du niveau du premier semestre 2019. Pour l'ensemble de l'année, nous visons le cap des 18 000 entreprises accompagnées », explique Patricia Lexcellent, déléguée générale d'Initiative France. Cela représente 35 000 emplois créés, sauvegardée ou soutenus.
Autres indicateurs encourageants, le niveau moyen de création d'emplois par entreprise à leur lancement (2,8) n' a pas diminué. Et l'effet démultiplicateur du « prêt d'honneur » accordé par l'association auprès des banques n'a pas faibli. Mais la reprise du nombre d'entreprises accompagnées ne serait-elle qu'une bonne nouvelle en trompe-l’œil, résultant de l'initiative de personnes ayant perdu leur emploi durant la crise et qui se rabattraient sur l'entrepreneuriat par défaut ? Pas vraiment. « Nous n'accompagnons pas les auto-entrepreneurs mais des sociétés », signe d'une démarche élaborée, répond Patricia Lexcellent. Pour elle, la pandémie a engendré une « forte accélération des projets de changement de vie. Il y a eu un déclic chez des personnes qui avaient envie de changer de vie, de métier. L'an dernier, elles ont franchi le cap ». En témoignent des exemples d'entrepreneurs soutenus par Initiative France en 2021 : Léa Bernabeu, 31 ans, ex-salariée chez Airbus, a ouvert Léaline, une boutique-atelier de créateurs à Toulouse, axée sur le Made In France et les matières bio et recyclées. Et Yasmine Gheribi a abandonné le marketing à Paris pour ouvrir la Cabane du 12, boutique végan, à Nice. « Une tendance s'est accélérée de naissance de projets qui portent sur des besoins liés à la transition écologique, les circuits courts, la solidarité et le numérique », pointe Patricia Lexcellent. Déjà, Initiative France soutenait ce type de projets qui répondent à des enjeux sociétaux, avec son label « Initiative remarquable ». Cette année, quatre entreprises ont été distinguées, dans des domaines très divers. Les Franjynes propose des turbans dotés d'une frange, destinés à constituer une alternative aux perruques pour les femmes atteintes d'un cancer. Filaj réalise des pailles en seigle, pour remplacer celles en plastique. Lucile Viaud crée des collections d'art de la table à partir de ressources naturelles marines bretonnes. Et Opopop a déjà créé cinq emplois, en fabriquant des colis réutilisables et consignés pour le e-commerce...
Les plans de financement au féminin sous-dimensionnés
Parmi les priorités d'Initiative France, figure l'encouragement de l'entrepreneuriat au féminin. Pourtant, l'association n'est déjà pas si mal avancée. Alors que 29% des entreprises créées en France le sont par les femmes, c'est le cas de 41% des projets soutenus par l'association, soit 8 000 par an. Toutefois, « nous constatons qu'il existe encore des freins, alors qu'il y a des envies et que les projets des femmes sont aussi viables que ceux des hommes. Mais elles ont peut être un comportement plus mesuré. En moyenne, leurs plans de financement sont sous-dimensionnés », note Patricia Lexcellent. A l'avenir, l'association entend travailler davantage avec des réseaux d'entrepreneuriat comme Force Femmes et renforcer la part féminine de son propre réseau.
Dans le même sens, elle lance un dispositif, « Vis ma vie d'entrepreneuse » : celles qui désirent se lancer pourront aller passer une journée avec une cheffe d'entreprise. La démarche a été initié par le réseau Grand Est d'Initiative France. Lors de la conférence de presse, Patricia Lexcellent était entourée de quatre entrepreneuses, leur offrant une visibilité. Parmi elles, Karine Castagnet et Céline André ont créé ensemble « L'âge de Sagesse », une agence d'aide à domicile. Leur histoire, outre à être écrite au féminin, s'intègre pleinement dans les tendances sociétales constatées par Initiative France, et témoigne de l'importance de l'accompagnement dans la création d'une entreprise. A l'origine, les jeunes femmes travaillaient ensemble chez TUI France, voyagiste, lorsque la pandémie a provoqué l'arrêt des activités et le licenciement de 600 salariés. Dont elles deux. « C'était aussi l'’opportunité d'entamer une reconversion. Je souhaitais relever un nouveau défi, être chef entreprise », explique Céline André. Elle était déjà sensibilisée au sujet de l'aide aux personnes âgées, notamment par sa mère, infirmière en gérontologie. A toutes les étapes de leur démarche, l'accompagnement leur a permis de « ne pas se sentir isolée, comme novice dans l'entrepreneuriat », témoigne Karine Castagnet. Les deux associées ont fait appel à la CCI Essonne, qui les a mises en relation avec Initiative France Essonne. Au total, elles ont obtenu à elles deux un prêt d'honneur de 12 000 euros auprès de l'association. Ainsi qu'un prêt bancaire de 40 000 euros, pour l'essentiel garanti par Initiative France. A cela s'est ajouté l'aide de TUI à la création de l'entreprise. « Nous avons choisi d'adhérer au réseau de franchise Petits Fils, qui nous accompagne. Nous avons réalisé une formation complète », ajoute Céline André. Leurs motivations ? Rendre service aux personnes âgées. Mais aussi, « valoriser un secteur qui ne l'est pas à sa juste valeur », précise Karine Castagnet. A ce titre, les entrepreneuses prévoient, notamment, une rémunération supérieure à la moyenne et une souplesse dans les plannings, qui seront établis avec les salariés. Un enjeu qui est loin d'être un détail dans ce secteur. « L'âge de Sagesse » n'attend plus que l'agrément du département pour démarrer, en septembre prochain.