Conjoncture

L’écosystème de la formation se confronte à la quête de sens

Dans une conjoncture où les difficultés de recrutement, le besoin en compétences s’affiche comme l’une des préoccupations majeures des entreprises, la formation inter et intra-entreprises se révèle être un levier à actionner et vite. Reste que l’univers sociétal a changé, les codes apparaissent tout simplement bouleversés. En local, l’écosystème de la formation s’adapte et tente de répondre à cet enjeu crucial pour le maintien du tissu entrepreneurial.

«Il nous faut opérer un changement de postures pour répondre aux attentes en compétences des entreprises et aujourd’hui au souhait de développement personnel des collaborateurs et futurs collaborateurs. Nous devons mettre en place une offre pédagogique qui fait sens. Il est nécessaire pour les organismes de formation, de toutes tailles, de s’adapter aux mutations et transformations aujourd’hui irréversibles.» Par cette phrase, ce directeur régional de l’innovation et de l’ingénierie d’un important organisme de formation régional, résume les nouveaux enjeux que les professionnels de la formation doivent relever. Après une adaptation sous forme de résilience opérée suite à la réforme de la loi Avenir professionnel de 2018 et le passage mouvementé par une crise sanitaire qui a chamboulé la quasi-totalité des codes sociétaux, l’écosystème de la formation doit faire face à une demande pressante de la part des entreprises en matière de compétences, le tout dans un climat où les difficultés de recrutement n’ont jamais été autant légion. D’après une enquête de l’Apec (Association pour l’emploi des cadres), 56 % des entreprises estiment que les difficultés de recrutement sont dues à un manque de candidature pertinente. Même si certaines commencent à revoir leur stratégie de recrutement dans l’espoir de voir aboutir leur process d’embauche, il n’en demeure pas moins que le marché du travail à l’horizon 2030 pourrait manquer de plus d’un million de talents (source : cabinet de conseil Korn Ferry). «Nous constatons que les métiers en tension et les besoins en compétences sont présents à tous les étages», continue le directeur régional de l’innovation et de l’ingénierie. Face à cette donne, les entreprises commencent à tenter à trouver des solutions en activant certains leviers. «Quand les entreprises n’arrivent pas à recruter, elles développent des stratégies en remettant la formation en interne au centre de leurs priorités», assure un responsable de CFA.

Former pour fidéliser

Certaines vont même beaucoup plus loin en créant leur propre CFA d’entreprise. La loi de septembre 2018 le permet et une petite centaine sont aujourd’hui présentes dans l’Hexagone à l’image en Lorraine du tout récent créé par le Groupe Mentor. «Suite à de nombreuses problématiques en termes de recrutement de collaborateurs et de fidélisation de ceux déjà présents au sein de l’entreprise, l’univers entrepreneurial commence fortement à s’orienter vers ce concept de CFA d’entreprise. Aujourd’hui, on remarque que bon nombre s’intéresse de plus en plus à cette alternative certaine en matière de formation», assure le directeur commercial d’un cabinet de conseils des acteurs de la formation. La formation inter et intra-entreprises ne semble jamais avoir été aussi importante qu’à l’heure actuelle. «En formant en interne, les salariés en place se voient dotés de compétences supplémentaires en phase avec les besoins de l’entreprise. Les formations internes permettent également de fidéliser les salariés en leur offrant des perspectives d’évolution professionnelle», assure un responsable des ressources humaines d’une ETI régionale. L’entreprise semble aujourd’hui devoir être «apprenante» comme l’assure certains spécialistes. «Ce modèle d’organisation apprenante se doit de se développer car il permet le développement des compétences individuelles et collectives. La formation, si elle est bien ciblée et menée, permet la mise en place d’une culture où les salariés collaborent et réfléchissent ensemble pour que l’organisation s’améliore constamment afin de devenir saine et agile», peut-on lire dans certaines enquêtes sur ce concept d’entreprise apprenante.

Aspirations des collaborateurs

«Aujourd’hui, les entreprises les plus performantes sont celles qui bâtissent la capacité d’apprendre plus vite que leurs concurrents», explique un responsable de développement. «Le modèle apprenant doit permettre de développer le niveau d’autonomie au travail, l’esprit critique et l’aptitude à résoudre des problèmes complexes, autant de compétences cognitives, organisationnelles et sociales de plus en plus demandées sur le marché du travail», peut-on lire dans un rapport de France Stratégie sur les organisations du travail apprenantes : enjeux et défis. Reste que cette aujourd’hui nécessité, tout simplement vitale pour que l’écosystème entrepreneurial continue à se développer, se doit également de prendre en compte les réelles aspirations des principaux concernés : les collaborateurs et futurs collaborateurs. Dans une enquête, parue en décembre dernier du cabinet de recrutement Hays, on apprend que 68 % des actifs se déclarent ouverts à l’apprentissage de nouvelles compétences tandis que seuls 23 % des employeurs pensent que c’est le cas. 35 % des employés contre 43 % des employeurs estiment que l’entreprise met à disposition des ressources de formation et d’apprentissage adaptées aux besoins des collaborateurs. «Il est essentiel que les responsables RH, ainsi que leurs employeurs, adaptent leurs méthodes et solutions de formation afin d’autonomiser au mieux leurs collaborateurs en rendant le développement des compétences plus efficace et plus accessible pour leurs employés», notent les auteurs de cette enquête. «Il faut ouvrir le dialogue pour déterminer les méthodes d’apprentissage préférées des employés.» À l’instar aujourd’hui des stratégies de recrutement, où la donne semble s’être inversée avec une quasi-nécessité d’adaptation des entreprises face aux potentiels candidats, l’approche de la stratégie de formation semble donc devoir suivre les nouveaux codes sociétaux en place. Cette prise en compte de l’évolution sociétale devrait être un des fils rouges de la future loi travail en cours de gestation où le chapitre formation devrait être conséquent. À l’occasion des Assises territoriales du travail dans le Grand Est, fin février sur le campus du Pôle formation UIMM Lorraine à Maxéville, Carole Grandjean, ministre déléguée à l’Enseignement et la formation professionnels a assuré qu’un nouveau projet de loi devrait émerger à l’été (le calendrier parlementaire pourrait être modifié) sur la formation et l’accompagnement des travailleurs. L’écosystème de la formation a son rôle à jouer pour permettre de répondre à ces changements présents et anticiper ceux à venir. À la fin du mois dernier, à l’occasion du Printemps de la formation professionnelle, organisé au siège de la Région Grand Est, la notion de sens était omniprésente parmi les différents acteurs présents. «Il est nécessaire de redonner du sens au travail en le considérant comme un moyen au service d’une autre finalité», a assuré la conférencière Julia de Funès lors de son intervention sur le monde du travail : quelles perspectives ? L’introspection de l’univers de la formation ne fait que commencer…

Campus XXL pour CCI Formation EESC

Près de 10 000 m² pour un investissement estimé entre 20 et 40 M€ ! Le nouveau campus formation de CCI Formation EESC devrait voir le jour à l’horizon 2026 du côté de la plaine Flaguel de l’agglomération nancéienne. C’est l’un des vastes projets annoncés par la CCI Grand Nancy Métropole Meurthe-et-Moselle. Ce futur campus regroupera les huit sites actuels pilotés par la chambre consulaire.

Transitions : Képos lance son centre de formation

Se former aux transitions écologiques et solidaires ! La SCIC Képos de Vandœuvre vient d’obtenir la certification Qualiopi pour proposer aux entreprises et organismes publics des formations sur le sujet vaste des transitions. Un cycle de formation est en cours de finalisation et il devrait débuter à la mi-mai. Le centre de formation se situe sur le tiers-lieu piloté par Képos dans l’écoquartier Biancamaria vandopérien.