Bilan 2024 de la CRESS Hauts-de-France

L'économie sociale et solidaire, un pilier de l'économie régionale

L'économie sociale et solidaire représente un poids économique majeur dans les Hauts-de-France. Malgré un contexte national tendu, la Chambre régionale de l'ESS et la région entendent créer une nouvelle impulsion en faveur du développement de ce modèle économique sociétal. Rencontre avec Peggy Robert, présidente de la CRESS Hauts-de-France et Olivier Cordier, directeur.

L'insertion professionnelle, un des champs d'action de l'ESS. © CRESS HDF
L'insertion professionnelle, un des champs d'action de l'ESS. © CRESS HDF

L'économie sociale et solidaire (ESS) est désormais bien implantée et structurée dans la région depuis une dizaine d'années, constituant une force économique vive et proposant un autre modèle de fonctionnement de l'économie et de la société. Portée par des valeurs humaines, le collaboratif et la circularité, l'ESS n'en reste pas moins un modèle économique solide. Avec 14 186 établissements (soit8,9 % des établissements de la région) - dont 85% sous statut associatif, 8% sous statut coopératif, 4% de mutuelles et 1% de fondations - et 233 683 emplois (soit l’équivalent d’un emploi salarié du privé sur dix en région), l'ESS représente 11,4% de l'emploi dans les Hauts-de-France.

Au sein des départements, cette économique pèse néanmoins différemment : le Nord représente un poids économique important (48,2% des emplois salariés) et le Pas-de-Calais regroupe un quart des emplois. Cette économie prend également des formes intrinsèques des territoires concernés : l'Oise est une terre de fondations et d’associations, l'Aisne de coopératives alors que le Pas-de-Calais et la Somme sont des terres de mutuelles. Du côté des secteurs, l'éducation ainsi que l'action sociale et de santé représentent les secteurs majeurs de l'ESS de la région. Dans les faits, cette économie pèse plus lourd que le secteur de l'automobile et de l'artisanat, c'est dire que l'ESS constitue un poids économique conséquent dans la région, en réponse à des besoins sociaux et sociétaux. «Nous avons une augmentation de l'emploi sur le dernier trimestre 2023 et le dernier trimestre 2024, nous avons longtemps représenté 10% de l'emploi et aujourd'hui nous sommes à 11,6%», note Peggy Robert, présidente de la CRESS Hauts-de-France.

Mais derrière ces chiffres, une partie de l'ESS ne se voit pas... et pourtant, l'impact sur la société est bien réel. «Cependant, à ce stade, nous n'avons pas une sécurité absolue des chiffres puisqu'il y a un certain nombre d'emplois qui respirent ESS mais n'émargent pas sur notre sphère. On peut évoquer les entreprises commerciales avec un agrément ESUS et ce collège des entreprises sociales qui pourraient éventuellement évoluer en intégrant des structures comme par exemple les bailleurs sociaux», ajoute la présidente.

Un secteur résilient à préserver

Si l'ESS affiche une belle dynamique, les différentes crises successives, les spécificités des modes de financement par les pouvoirs publics ainsi que les évolutions réglementaires et législatives impactent les modèles économiques des entreprises de l’ESS. «Nous pouvons interpréter ces chiffres de deux manières, analyse Julien Cordier. D'une part, cela veut dire que nous avons besoin de l'ESS en région et qu'elle répond à des besoins essentiels de la population. D'autre part, nous pouvons aussi voir ces chiffres comme une forme de désengagement de l’État et des acteurs publics qui, dans un contexte d'austérité, viennent s'appuyer sur l'ESS pour faire ce qu'ils ne sont plus en capacité de faire».

Cette analyse présage le paysage de l'ESS en 2025, construit sur une période incertaine avec des risques de perte d'emplois. L'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (UDES) a chiffré cette perte, au niveau national, à 186 000 emplois, conclue autour des premiers débats de la première loi de finance du gouvernement Barnier. «L'alerte demeure, en corrélation avec les derniers chiffres de liquidations judiciaires de structures de l'ESS, note Peggy Robert. De plus, il y a un désengagement de l’État vis-à-vis des collectivités qui doivent revoir à la baisse leur schéma de soutien au secteur de l'ESS. Puis le fait maintenant d'entendre une économie de guerre au détriment d'une économique sociale et solidaire ne nous rassure pas, notamment avec un risque de hold up de l’État sur les financements européens au détriment du soutien de la cohésion sociale». Une inquiétude portée notamment par un chiffre : 63% des emplois salariés dans la région sont de l'ESS dans l'action sociale.

Une économie, des valeurs

Dans ce contexte contraint et incertain,une précarité financière et des injonctions contradictoires, L'ESS regarde vers l'avenir. La CRESS Hauts-de-France entend garantir la pérennité économique des structures. Professionnaliser les organisations, s'adresser à la jeunesse et susciter des vocations, accompagner la transfomation écologique des entreprises de l’ESS, évaluer et valoriser l’impact social et soutenir les politiques locales ESS sont les enjeux de demain.

L’ESS est aussi un mode plus en phase avec les aspirations entrepreneuriales du temps (recherche de sens, économie locale et non délocalisable) et possède une agilité de son modèle. L'objectif final de la CRESS est de faire briller les bénéfices humains et les impacts sociaux de cette économie. «Pour un euro versé dans l'ESS, ce sont des insertions professionnelles, des actions contre des luttes et des centaines d'autres actions, argumente Peggy Robert. […] Il y a à prendre dans cette ESS, à travers les bonnes pratiques, la qualité de vie au travail, le fait d'avoir un sens en servant un intérêt général, et finalement c'est l'épanouissement des salariés».

L'ESS en chiffres dans les Hauts-de-France

14 186 établissements

233 683 emplois

65% des salariés sont des femmes

Part de l'emploi salarié par département

Nord : 48,2%

Pas-de-Calais : 28,2%

Oise : 10,9%

Somme : 9,2%

Aisne : 7,4%