L’AOC des jeunes entrepreneurs français
Deux jeunes chefs d’entreprise de la région ont décidé de fonder le label «Jeunes Entrepreneurs en France», qui distingue ceux qui créent leur entreprise et de l’emploi en France. Un label qui se fait peu à peu connaître localement, avant de s’étendre à toute la France, porté par de prestigieux parrains.
La vingtaine à peine passée, Charles Desmarquoy et Nicolas Jeanne sont déjà des créateurs d’entreprise chevronnés. Séparément d’abord, puisqu’ils ont tous les deux fondé des entreprises au sein de l’incubateur de l’Edhec, où, à la fin de leurs études, ils ont suivi un stage de création d’entreprise. Et ensemble, au sein de Jef, lancé d’abord comme une activité annexe mais qui a pris de plus en plus de place, jusqu’à les occuper à plein temps. Jef, c’est l’acronyme de «Jeunes Entrepreneurs en France», une association qui mobilise dix jeunes entrepreneurs de la région, désireux de partager leur expérience et de ne pas rester dans leur coin. «Quand on crée une entreprise, et on s’en est rendu compte pour être tous passés par là, on se retrouve vite très seul, explique Charles Desmarquoy, l’un des fondateurs de Jef. Notre but, c’est de lutter contre cette solitude et d’apporter des solutions aux problématiques des entrepreneurs. Ce dont nous nous sommes aperçus, c’est que le plus souvent tous les problèmes rencontrés par l’un avaient déjà été posés à un autre. En mutualisant les connaissances, on peut donc répondre en peu de temps à un maximum de problématiques. Jef a été créé pour connecter tous les entrepreneurs, mutualiser leurs connaissances et leurs problématiques, étoffer leurs réseaux et développer leurs chiffres d’affaires.»
“Tunnel de la mort“. Mais pour être labellisé Jef, il ne suffit pas d’avoir créé et immatriculé son entreprise en France. Il faut aussi avoir moins de 30 ans et exercer son activité, quel qu’en soit le domaine, depuis moins de cinq ans. «Les cinq premières années d’une entreprise, c’est ce qu’on appelle le ‘tunnel de la mort’» : très peu y survivent. C’est dans ces cinq années-là que les entrepreneurs ont le plus besoin de conseils et de soutien, c’est aussi ce que nous voulons leur apporter avec Jef», détaille Charles Desmarquoy. Surtout, il faut que l’entreprise en question ait un aspect novateur et qu’elle ait vocation à créer des emplois sur le territoire. Le label entend ainsi mettre en avant la jeunesse des entrepreneurs et l’impact positif de l’entreprise sur son territoire, que ce soit en termes d’emplois ou d’innovation technologique, sociale ou environnementale. Car, si le label est un signal à destination des consommateurs, avec son macaron discrètement bleu-blanc-rouge, il se fait aussi réseau en s’accompagnant, pour les entrepreneurs concernés, d’une offre de contenus adaptés à leurs besoins et d’un espace de partage d’expérience. «Nous prévoyons des événements sous la forme d’un repas réunissant une dizaine de labellisés. Ce sera l’occasion d’échanger avec un chef d’entreprise plus expérimenté, sur un mode informel, à propos du quotidien du chef d’entreprise, de la gestion de la vie privée ou de l’étape, cruciale, des premiers recrutements. Nous envisageons des rendez-vous mensuels, par secteur d’activité. Il y aura aussi des apéros, qui sont l’occasion de sortir un peu la tête du quotidien, mais ils seront organisés autour de thématiques précises. Nous voulons que les gens viennent pour de réels échanges, pas juste pour récolter des cartes de visite», poursuit Charles Desmarquoy.
Ambassadeurs prestigieux. En gestation depuis un an et demi, Jef a été lancé officiellement en avril 2016 et compte pour le moment 52 labellisés, en grande majorité des entreprises hébergées dans les incubateurs régionaux, ainsi que quelques-unes, installées à Paris. Ils profitent déjà d’une «version bêta» du réseau et du label encore gratuite et appelée à évoluer selon les demandes et les besoins, avant un lancement national. Mais s’il est encore petit, Jef peut déjà compter sur le soutien de solides parrains, parmi lesquels Wilfrid André, le fondateur d’Alice Délice, Guillaume Leymonerie, créateur de H20 at Home, Denys Chalumeau, fondateur de SeLoger.com et de Promovacances.com, ou encore le Réseau Entreprendre, au travers du soutien de Frédérique Jeske, sa directrice générale. Autant d’ambassadeurs qui soutiennent le projet Jef et qui sont prêts à en faire la promotion et à participer aux rencontres thématiques organisées par le réseau.
Une rencontre avec Xavier Niel. Une belle équipe de porte-drapeaux pour Jef et sa mascotte en forme de petit poussin, tout frais sortis de l’œuf, mais déjà experts ès communication de choc comme ils viennent de le prouver. Pour s’attirer le regard – et les faveurs − de Xavier Niel, figure tutélaire des jeunes entrepreneurs français aujourd’hui, les équipes de Jef n’ont en effet pas hésité, ce printemps à lancer une campagne originale. Un colis, présentant le concept du label et sollicitant une rencontre avec le chef d’entreprise a ainsi été préparé dans les locaux roubaisiens de l’association, puis transporté de main en main jusqu’à Paris, où il a atterri directement dans celles du patron de Free. «C’est un super coup de com, sourit Charles Desmarquoy, fier de son joli coup. On voulait le rencontrer, mais il est tellement sollicité que ça ne sert à rien d’envoyer des mails ou d’appeler. On a donc décidé de mobiliser notre communauté de jeunes entrepreneurs pour faire transiter le colis de main à main. En tout, il a fait 350 kilomètres en 26 étapes, grâce à l’entremise de 50 personnes. Il est passé par plein d’entreprises, qui ont toutes ajouté un petit mot ou des goodies dedans à l’intention de M. Niel. Certaines nous ont même sollicités pour participer, et ça a parfois donné lieu à des happenings, comme chez Michel & Augustin où le colis a été accueilli par une haie d’honneur. Cela a permis de nous faire connaître de beaucoup d’entreprises dans toute la France et, par chance, Xavier Niel a pu recevoir le colis en mains propres. Il a été séduit par le message et la démarche, et donc on a obtenu une entrevue pour lui présenter Jef.»
Un entretien qui s’est déroulé fin août à Paris et qui, du quart d’heure initialement accordé, a débordé sur une quarantaine de minutes. Les deux fondateurs du label en sont ressortis ravis «On a pu lui présenter en détail Jef et il n’a pas manqué de nous donner ses conseils. Il a accueilli favorablement le projet, et nous verrons dans les semaines à venir avec lui et ses équipes son implication concrète !» Une affaire à suivre donc, mais qui s’annonce sous les meilleurs auspices. Pour accompagner sa montée en puissance, le label s’apprête par ailleurs à lancer une campagne de crowdfunding dans l’espoir d’obtenir 5 000€.