L’agriculture biologique en pleine croissance
Avec 300 exploitations en 2016 et 59% de terres en conversion supplémentaire par rapport à 2015, l’agriculture biologique progresse fortement en Picardie. Depuis cinq ans, un pôle entier de la Chambre d’agriculture régionale est d’ailleurs consacré à ce mode de production.
En 2016, plus de 60 diagnostics préalables à la conversion ont été réalisés en Picardie par des techniciens de la Chambre d’agriculture. La moitié a donné lieu à des études plus approfondies, ce qui est un très bon chiffre », indique Gilles Salitot, conseiller grande culture pour la chambre d’agriculture de l’Oise et référent régional du Pôle de conversion bio Picardie. Lancée il y a cinq ans, cette structure mène continuellement des actions de communication, propose des journées de formation et accompagne les agriculteurs du territoire dans leurs projets de conversion. « Au moment où il a été mis en place, la conjoncture agricole était plutôt bonne et il y avait peu de demandes. Mais depuis deux ans ce dispositif joue pleinement son rôle », note Gilles Salitot. Si les exploitations bio ne représentent que 1% de l’agriculture en région, la Picardie bénéficie d’une très grande diversité de production, où le maraîchage est fortement représenté (22%), suivi des grandes cultures, des exploitations laitières et des polycultures. En 2016, on comptait sur les trois départements (Oise, Somme et Aisne) 525 acteurs labellisés bio, employant 1 300 personnes et générant un chiffre d’affaires de 80 millions d’euros (chiffres Agriculture biologique Picardie). Au niveau national, le marché du bio est estimé à 5 milliards d’euros.
De l’information à la concrétisation
« Ce qui distingue probablement les agriculteurs bio des agriculteurs conventionnels, c’est qu’il faut être encore plus fin agronome pour pouvoir rendre son système de culture performant. On peut s’appuyer pour cela sur la diversification des cultures, le travail du sol, les précautions autour de l’implantation des cultures. Cela a une résonance chez tous ceux qui s’interrogent sur la façon de produire dans les années à venir », explique Gilles Salitot qui organise très régulièrement des journées de formation ouvertes à tous. « En tant que Chambre d’agriculture, il est tout à fait intéressant de pouvoir porter un message au plus grand nombre tout en essayant de ne pas opposer les agricultures. On se base sur les enjeux et sur les évolutions de la production nationale. Là, l’agriculture biologique a des choses intéressantes à montrer », ajoute-t-il. Au-delà de la curiosité, beaucoup de professionnels ont envie de s’engager dans un projet de conversion. Une volonté accompagnée par le Pôle de conversion Picardie, qui travaille en partenariat avec l’association Agriculture biologie Picardie (ABP). Dans un premier temps, un conseiller agricole se rend sur l’exploitation pour un premier état des lieux. Atouts et points à revoir sont recensés. Il est alors également question des motivations de l’agriculteur. Suite à ce diagnostic, une étude technico-économique est lancée pour visualiser la viabilité du projet. « Fréquemment, je me rapproche du centre de gestion qui travaille avec l’agriculteur et je leur donne des éléments précis pour qu’ils puissent aborder la question financière et des investissements », souligne Gilles Salitot. Après un temps de réflexion variable de quelques mois, l’agriculteur peut décider de se convertir en bio ou pas. « Il faut pouvoir avoir la vision la plus large possible sur son projet, ce qui peut conduire à aller voir d’éventuels partenaires commerciaux », poursuit-il. Deux ans seront ensuite nécessaires pour être labellisé bio.
Les motivations pour obtenir le label bio peuvent être très diverses. Si certains penchent pour l’argument financier, beaucoup expriment le besoin d’évoluer dans leurs pratiques. « L’usage pour la santé et l’environnement des produits phytosanitaires leur pose question, ils ont envie de faire une agriculture plus en adéquation avec les attentes de la société », assure Gilles Salitot. Si la Picardie est l’un des territoires du nord où ce mode de production est le moins implanté, l’intérêt est croissant. « Le bio participe au renouvellement de l’agriculture incarnée par cette nouvelle génération qui a des envies différentes », dit encore le référent régional. Une massification qui peut cependant effrayer les acteurs du bio installés depuis longtemps et qui craignent une baisse de rémunération.