Retour sur le Congrès des maires de France
L’AMF plaide pour une autonomie majeure des élus locaux
Autonomie financière, évolution des relations entre l’État et les collectivités... Inflation, crise énergétique... La Première ministre, Élisabeth Borne, a joué la carte du dialogue avec les maires de France, lors du congrès de l’AMF. Mais sans céder sur la suppression de la CVAE.
Cette
année, Emmanuel Macron, président de la République, a choisi de se
rendre au Salon des maires, laissant à Élisabeth Borne, Première
ministre, le soin de participer à la séance de clôture du Congrès
des maires de France, organisé par l’AMF, Association des maires
de France, le 24 novembre, à Paris. Rituel annuel de confrontation
entre le gouvernement et les élus locaux, la séquence, qui s’est
tenue devant une assistance nombreuse, a revêtu une dimension
particulière, vu le «contexte
lourd et anxiogène»
de l’année 2022, a rappelé André Laignel, inamovible
premier vice-président délégué de l’AMF.
Parmi
les sujets abordés, les enjeux de l’autonomie financière des
collectivités et des relations de ces dernières avec l’État,
traditionnelles pommes de discorde, prenaient une acuité majeure
avec la flambée des prix de l’énergie et la nécessaire mise en
œuvre de la transition écologique. La France connaît actuellement
une «recentralisation
massive»
a dénoncé André Laignel.
Pour opérer un virage, l’AMF n’en
appelle pas à un «grand
texte»
- exclu par Emmanuel Macron dès sa première candidature - mais à un
changement de pratiques. Parmi ses préconisations, celle de donner
aux
communes et intercommunalités «le
soin d’écrire la norme locale», en
leur laissant la possibilité d’user du pouvoir réglementaire
d’application des lois.
L’Association des maires revendique aussi la réaffirmation de la
prééminence des communes, qui doivent rester maîtres de leurs
compétences, face aux intercommunalités.
Mais c’est aussi dans
les relations entre l’État et les collectivités que l‘AMF
demande un changement radical avec «l’abandon
des appels à projet et des contrats locaux»
qui donnent aux collectivités le sentiment d’être traitées comme
des «sous-traitants»,
a précisé André Laignel. A ce sujet, Élisabeth Borne a promis
l’arrêt des «contrats
de Cahors»
de régulation des dépenses de fonctionnement des collectivités
locales.
Quant
au «fonds
vert»,
destiné
à l’accélération de la transition écologique dans les
territoires,
doté de 2 milliards d’euros, auquel s’ajoute près d’un 1
milliard d’euros de nouveaux prêts de la Caisse des dépôts et
des consignations (CDC), «J’ai
bien entendu votre message : pas d’appel à projets, mais un
soutien en proximité à vos initiatives et à vos projets»
a déclaré la Première ministre.
L’abandon
de la suppression de la CVAE, c’est non
Autre
sujet majeur évoqué lors de cette séance de clôture, celui de
l’autonomie financière des collectivités et de leurs sources de
revenus. Là, le désaccord entre les deux parties demeure patent .
«Nous
n’avons quasiment plus de leviers fiscaux»,
a dénoncé David
Lisnard
président de l’AMF. «Fragiliser
les finances locales, c’est fragiliser l’économie nationale»,
a souligné André Laignel.
L’AMF a avancé plusieurs
revendications à commencer par une «réforme
structurelle»
de la DGF,
Dotation
globale de fonctionnement. Pour l’association des élus locaux,
l’ajustement
prévu par le projet de loi de Finances est «modeste»,
tandis que d’après la Première ministre, la hausse prévue (320 millions d’euros)
devrait
permettre à 95%
des communes de voir leur DGF se stabiliser ou augmenter. «j’ai
souhaité, à la demande de l’AMF et de plusieurs associations
d’élus, préserver le mécanisme d’évolution des bases
fiscales. Il permettra à vos recettes d’évoluer à hauteur de 7%,
l’année prochaine, à taux inchangé»,
a ajouté Élisabeth Borne.
Autre
cheval de bataille de l’AMF, l’abandon de la suppression de la
CVAE, Cotisation
sur la valeur ajoutée des entreprises, accusée de distendre le lien
entre les entreprises et le territoire. «Ce
choix vise à cibler au mieux cette baisse sur notre industrie»,
a justifié la Première ministre, qui a promis une compensation
par de la TVA, avec une répartition, dès 2023, qui tiendra compte
du développement de l’activité économique des territoires.
Et
pour faire face à la flambée des coûts, elle a également assuré
que 30 000 communes pourraient bénéficier du bouclier tarifaire,
mesure à laquelle s’ajoutent un «amortisseur
électricité»
et un renforcement du «filet
de sécurité»
pour
les collectivités les plus vulnérables. Une simplification des
dispositifs actuels, jugés inopérants par l’AMF, est prévue.
Autant
de déclarations qui ont été accueillies par un silence poli du
public des maires, qui attendent la concrétisation des annonces. Les
élus ont en revanche vigoureusement applaudi lorsqu’Élisabeth
Borne a évoqué le sujet de la lutte contre l’artificialisation
des sols. Si les objectifs globaux demeurent inchangés, «face
à des situations diverses, nous devons territorialiser et
différencier
nos objectifs»,
a-t-elle déclaré.