L’aéroport de Lille-Lesquin veut faire décoller son projet de modernisation
Avec deux millions de passagers en 2019, l’aéroport de Lille-Lesquin était au bord de la saturation. L’exploitant maintient son projet de modernisation, malgré un écroulement du trafic pour cause de Covid-19. Pour mettre toutes les chances de son côté, Aéroport de Lille SAS a présenté les résultats d’une étude d’impact le 16 septembre.
Le 16 septembre dernier, dans le cadre du projet de modernisation de ses infrastructures, Aéroport de Lille SAS présentait les résultats d’une étude d’impact. Ce projet à 100,9 millions d’euros tourne autour de trois axes : adapter l’aéroport aux évolutions réglementaires, améliorer les conditions d’accueil des passagers - «pour accompagner le développement de la région», a insisté Marc-André Gennart, directeur général d’Aéroport de Lille-Lesquin SAS - et proposer des destinations adaptées aux besoins des personnes des Hauts-de-France, qui, aujourd’hui, vont souvent prendre l’avion à Roissy, Beauvais, Charleroi ou Bruxelles.
Les effets sur l’environnement humain, en termes de mobilité, de qualité de l’air, d’ambiance sonore et d’effets socio-économiques, ont été calculés par une batterie d’experts. Car le 15 juillet, Aéroport de Lille SAS (ADLSAS) a déposé une demande de permis de construire auprès des services de la Ville de Fretin, la commune sur laquelle se situe la majorité des terrains concernés. Le 20 juillet, ADLSAS a aussi déposé le dossier d’autorisation environnementale. L’exploitant veut donc mettre le maximum de chances de son côté pour voir son projet aboutir…
Un projet amputé de 9 hectares
L’avis de l’autorité environnementale est attendu pour la mi-novembre. Puis une grande enquête publique débutera début 2022. ADLSAS n’est donc pas resté dans l'expectative, d’autant qu’il a déjà dû revoir sa copie. Pour satisfaire aux demandes des pouvoirs publics, entrés depuis quelques mois dans une politique de sobriété foncière voulue par le Gouvernement, le projet initial a été amputé de 9 hectares.
L’implantation de nouveaux parkings (6 ha) et un projet immobilier (3 ha), en lieu est place de terres agricoles, ont été abandonnés pour des questions d’artificialisation des sols. Mais dans une période où les enjeux climatiques sont de plus en plus présents au cœur des préoccupations, l’extension d’un aéroport n’en reste pas moins difficile à défendre. D’où cette grande enquête sur l’impact d’un projet qui prévoit le doublement du nombre de passagers d’ici 2039.
De plus, l’écroulement du trafic en 2020, pour cause de crise sanitaire, laisser planer de sérieux doutes sur l’avenir du transport aérien, «qui retrouvera un rythme normal au mieux en 2024», selon Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie. Une position partagée par certains experts de l’aéronautique, mais pas tous. Toujours est-il que la fréquentation de l’aéroport de Lille-Lesquin a été divisée par trois en 2020 : 730 000 voyageurs contre 2 millions en 2019.
«Pas de concurrence avec le train»
Cette situation et le manque de perspectives n’ont pourtant pas découragé Eiffage, à qui le Conseil régional a confié l’exploitation de son aéroport en 2019, pour une durée de 20 ans. «Notre actionnaire n’est pas sur un projet de rentabilité à court terme», a assuré Marc-André Gennart. «Et à l’arrivée, nous récupérerons notre bien», a aussi précisé Christophe Coulon, président du Syndicat mixte des aéroports de Lille-Lesquin et de Merville. «Nous restons bien sûr propriétaires de l’infrastructure.» Avant de défendre l’enjeu de moderniser l’aéroport de la Métropole : «On croit que l’avion est réservé aux riches patrons du CAC 40. Mais c’est surtout le moyen pour les familles de se rejoindre, de partir en vacances, notamment, pour beaucoup de gens de notre région, grâce aux destinations vers leurs pays d’origine.»
Inauguré en 1996, l’aéroport de Lesquin a passé le cap du million de voyageurs en 2007, puis des deux millions en 2018. Les deux pistes sont utilisées par onze compagnies aériennes, pour la plupart low cost, qui affrètent des vols vers 12 pays, principalement la Grèce, l’Algérie et la Tunisie, mais aussi en France. «Pour une famille de cinq personnes qui part en vacances dans le Sud, comparez le prix de l’avion et celui des billets de train : il n’y a aucune mesure. Je ne suis surtout pas contre le train, mais c’est une réalité économique», a argumenté Christophe Coulon
Fin des travaux en 2025 ?
Aéroport de Lille SAS avait déjà organisé une concertation préalable volontaire, dont le bilan avait été dévoilé le 16 mars. Environ 500 personnes avaient participé à plusieurs réunions par visioconférence. Cette fois, le débat a été houleux. Plusieurs riverains de l’aéroport étaient présents dans la salle du Conseil régional. Marc-André Gennart et plusieurs experts ont répondu, parfois de façon très technique, sous l’œil d’un représentant de la Commission nationale du débat public (CNDP) très attentif.
Au-delà du projet de modernisation, plusieurs questions ont aussi tourné autour de la modification des couloirs aériens en 2016. Les échanges n’auront finalement servi à rien, puisque plusieurs habitants de Fretin et de Gondecourt ont obtenu une promesse de rendez-vous, de la part du représentant de la Direction de l’aviation civile. Vols de nuit, nombre et hauteur des avions, autant de sujets qui ont aussi été évoqués.
«Nous devons nous accorder sur le fait que cet aéroport public offre un service public», a martelé à plusieurs reprises Christophe Coulon, insistant aussi sur les 230 emplois prévus sur le chantier et la création de 1 900 emplois dans la région grâce au développement de l’aéroport, selon l’étude menée par Eiffage. Marc-André Gennart espère une fin des travaux et une inauguration en 2025.
Une forte activité estivale
L’aéroport de Lille-Lesquin a réalisé un bilan d’activité post-période estivale : 2021 voit une reprise plus importante que l’année dernière, mais toujours en-dessous des chiffres 2019.
Malgré de nombreuses perturbations liées aux restrictions sanitaires, le trafic passagers en juillet-août a été proche de celui de 2019 (-25% par rapport à 2019 environ). Deux destinations françaises ont tiré leur épingle du jeu durant l’été : la Corse (deux fois plus de passagers qu’en 2020) et Perpignan (2,8 fois plus de passagers qu’en 2020). Du côté de l’international, les voyageurs ont opté pour le Maroc (28%), l’Espagne (25%), la Grèce (23%), la Suisse et le Portugal (12% chacun).