L'activiste gay Michel Chomarat, mémoire de la répression des homosexuels en France
"On a été très, très abîmé". Alors que le Sénat a adopté le 22 novembre en première lecture une proposition de loi pour réhabiliter les personnes condamnées pour homosexualité en France, Michel Chomarat se souvient de la répression qui visait les...
"On a été très, très abîmé". Alors que le Sénat a adopté le 22 novembre en première lecture une proposition de loi pour réhabiliter les personnes condamnées pour homosexualité en France, Michel Chomarat se souvient de la répression qui visait les homosexuels dans le pays jusqu'au début des années 80.
"Les pédés, ils avaient pas le droit d’exister. A tous les niveaux, je veux dire. Il y avait une répression vraiment organisée de la part de l’Etat. Il fallait pourchasser les pédés", se souvient le militant lyonnais de 75 ans.
Lui-même fut interpellé en mai 1977, lors d'une descente de la police dans le bar gay "Le Manhattan", à Paris, puis condamné pour "outrage public à la pudeur".
Grâce à la mobilisation autour de cette affaire devenue un symbole de la répression des homosexuels, celui qui se décrit comme un "activiste gay" avait finalement été condamné à une simple amende puis amnistié après l'élection en 1981 du président socialiste François Mitterrand.
La majorité de ceux qui ont été condamnés en France en raison de leur homosexualité "ont tout perdu. Ils ont perdu l’emploi, le logement. Ils étaient désociabilisés totalement, et certains vont se suicider. Parce qu’ils avaient une honte", se souvient cet ancien éditeur indépendant.
"Moi, raser les murs, ce n’était pas mon truc. Au risque de me faire contrôler, notamment à Lyon. Ça a été fréquent, les contrôles d’identité dans les commissariats, jusqu’à mon arrestation à Paris. Donc, c’était aussi prendre des risques", se souvient-il.
Même s'il est difficile de chiffrer les victimes des anciennes lois réprimant l'homosexualité, le ministre de la Justice a estimé, sur la base de travaux de recherche, que "plus de 10.000 personnes" étaient concernées entre 1945 et 1982, avec une peine de prison ferme pour 90% d'entre eux.
Pour réparer, qu’est-ce qu’il reste? "Il y a les symboles. Mais il peut y avoir un peu d’argent", dit le militant lyonnais en regrettant que le principe de réparation financière ait été rejetée en première lecture au Sénat.
En même temps, dans les pays qui ont mené un processus de réparation, comme l’Espagne ou l’Allemagne, "très peu de gens se sont manifestés": "il faut se mettre à leur place : il faut avoir un énorme courage pour dire +Attendez, j’ai été condamné, dans telles conditions+".
Le texte étudié au Sénat à l'initiative de l'opposition socialiste doit encore être inscrit à l'ordre du jour par l'Assemblée nationale pour être adopté définitivement. Le groupe socialiste a exhorté le gouvernement à s'en saisir lui-même.
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