Intox contre Garrido et Corbière: Lagarde charge son chauffeur, un "pauvre gars"
L'ex-patron de l'UDI Jean-Christophe Lagarde a chargé en novembre devant les juges qui l'ont mis en examen son ancien chauffeur, un "pauvre gars" qu'il rend responsable de l'intox du Point mi-2022 selon laquelle sa concurrente LFI à la députation Raquel...
L'ex-patron de l'UDI Jean-Christophe Lagarde a chargé en novembre devant les juges qui l'ont mis en examen son ancien chauffeur, un "pauvre gars" qu'il rend responsable de l'intox du Point mi-2022 selon laquelle sa concurrente LFI à la députation Raquel Garrido exploitait une femme de ménage sans papiers.
Selon ses déclarations au fond du 13 novembre dont l'AFP a eu connaissance mercredi, M. Lagarde, mis en examen notamment pour escroquerie en bande organisée, estime que d'autres avaient bien plus d'intérêt que lui dans cette véritable "fake news".
Il a principalement ciblé son ancien chauffeur et homme à tout faire, Rudy Succar, un "pauvre gars" qui veut "se rendre intéressant" et "cherchait absolument à conserver son emploi" qu'il avait alors auprès de lui, et qui aurait donc orchestré la manigance.
L'affaire avait démarré juste après le second tour des élections législatives 2022, avec la publication par l'hebdomadaire de l'article signé par le journaliste Aziz Zemouri accusant indûment l'ex-Insoumise et son mari Alexis Corbière, qui avaient démenti, de cet emploi irrégulier.
Fait rarissime, l'article "faux" et "mensonger" avait été retiré le lendemain par l'hebdomadaire.
Le couple et M. Zemouri avaient porté plainte, et le parquet de Paris avait rapidement confié l'enquête à une juge d'instruction.
Début septembre 2022, M. Succar, M. Lagarde et Noam Anouar (de son vrai nom Noam Bouhadjela), ancien policier des renseignements, avaient été placés en garde à vue. Si le premier avait été mis en examen à l'époque, les deux autres l'ont été début octobre.
En garde à vue, M. Succar avait reconnu avoir "agi de sa propre initiative" mais pour "satisfaire son employeur, M. Lagarde", évoquant "une forme d'emprise psychologique".
Devant les juges d'instruction, il a ensuite indiqué avoir agi à l'orée des législatives sur demande pressante voire "obsessionnelle" de Jean-Christophe Lagarde, car celui-ci aurait voulu obtenir un élément compromettant contre Raquel Garrido.
Scoop
Pour Jean-Christophe Lagarde, ce sont des "mensonges les plus absolus et les plus absurdes".
Cette figure déchue du centre-droit assure que c'est son chauffeur qui est venu avec un tuyau sur cette femme de ménage et que lui, "dubitatif", l'aurait fait suivre à Noam Anouar afin qu'un journaliste "intéressé pour enquêter (...) vérifie" les informations.
Mais certainement pas, jure-t-il, pour torpiller la candidature concurrente de Mme Garrido, "une bonne nouvelle" pour lui "puisqu'elle était parachutée".
Mettre en place une telle "branquignolerie" aurait été forcément suicidaire, conteste-t-il encore: "Si j'avais été réélu, évidemment que le mensonge aurait éclaté et j'étais mort politiquement".
M. Lagarde s'en prend aussi à "monsieur (Aziz) Zemouri", considéré par la justice comme une victime dans ce dossier, ce que l'ex-maire de Drancy "ne croit pas": il visait le "scoop".
Noam Anouar, qui selon un rapport de la Brigade de répression de la délinquance (BRDP) de juin 2024 dont l'AFP a eu connaissance s'est présenté comme une simple courroie de transmission entre M. Lagarde et M. Zemouri, a lui aussi critiqué en garde à vue le journaliste, l'accusant de ne pas vérifier suffisamment ses informations.
La juge s'interroge au contraire sur l'intérêt qu'avait Noam Anouar de transmettre le tuyau percé de M. Lagarde, si ce n'est pour satisfaire son employeur, la mairie de Drancy, dirigée par Aude Lagarde, épouse de Jean-Christophe.
L'ex-maire de Drancy, condamné fin 2022 à deux ans d'inéligibilité pour avoir fourni un emploi fictif à sa belle-mère, le dédouane: "Cela a dû lui paraître normal de faire cesser un scandale" éventuel.
Pour l'avocat de M. Zemouri, Me David-Olivier Kaminski, l'enquête "établit deux faits graves: en premier lieu, la mise en œuvre d'un stratagème pour construire une fausse information afin qu'elle soit diffusée par un journaliste d'un grand média."
"En outre", ajoute ce conseil, "la volonté d'influencer" une élection locale.
Début décembre, Raquel Garrido avait indiqué sur X son espoir que la procédure "punisse cette manipulation immonde et cette grave atteinte à la démocratie".
Avocat de M. Lagarde, Gérard Zbili n'a pas répondu à l'AFP.
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