Indonésie: Prabowo Subianto, un long parcours vers la présidence

L'ex-général Prabowo Subianto, au passé militaire controversé sous l'ère Suharto, est devenu dimanche à sa troisième tentative le huitième président de l'Indonésie, dans la continuité de son successeur mais avec...

Le nouveau président indonésien Prabowo Subianto, le 16 août 2024 au Parlement à Jakarta © Bagus INDAHONO
Le nouveau président indonésien Prabowo Subianto, le 16 août 2024 au Parlement à Jakarta © Bagus INDAHONO

L'ex-général Prabowo Subianto, au passé militaire controversé sous l'ère Suharto, est devenu dimanche à sa troisième tentative le huitième président de l'Indonésie, dans la continuité de son successeur mais avec de plus grandes ambitions pour son pays.

Agé de 73 ans, le candidat malheureux à deux reprises aux présidentielles de 2014 et 2019 l'a emporté dès le premier tour le 14 février dernier face à deux autres candidats. 

L'ex-ministre de la Défense a prêté serment dimanche, succédant à Joko Widodo, surnommé "Jokowi", à la tête de la première économie d'Asie du Sud-Est, à l'issue d'une période de transition de huit mois.

"A 18 ans, j'ai fait un vœu: j'étais prêt à mourir pour le peuple et la nation. Je n'ai pas renoncé à ce vœu. Je suis prêt si Dieu m'appelle", avait-il déclaré lors d'un rassemblement électoral avant les élections, évoquant son engagement militaire.

S'appuyant sur une confortable fortune et le choix stratégique du jeune fils de Jokowi comme colistier, Prabowo Subianto a finalement accédé à la magistrature suprême après 15 ans passés à chercher à accéder au pouvoir. Dès 2009, il avait été candidat à la vice-présidence au côté de l'ex-présidente Megawati Sukarnoputri, finalement battue.

Mais son arrivée à la présidence ne manque pas d'inquiéter certains groupes de défense des droits humains qui rappellent son passé controversé et redoutent une possible remise en cause des avancées démocratiques. 

En tant que chef des forces spéciales, il a été accusé par des ONG d'avoir ordonné l'enlèvement de militants prodémocratie dans les années 1990, à la fin du régime de Suharto (1967-1998), dont une dizaine n'a jamais réapparu.

Mais grâce notamment à une large campagne sur les réseaux sociaux, l'homme a adouci son image auprès des jeunes Indonésiens, la moitié des électeurs, qui ignorent souvent les accusations portées contre lui et apprécient sa promesse de poursuivre la politique du très populaire Jokowi, selon les analystes.

"Nous nous battrons pour apporter la prospérité à tous les Indonésiens. Nous poursuivrons ce qui a déjà été construit par les présidents précédents", a déclaré Prabowo dans son dernier discours de campagne.

Retour en grâce

Né en 1951 au sein d'une famille aisée, Prabowo Subianto est le fils de Sumitro Djojohadikusumo, plusieurs fois ministre à la fois sous Sukarno, le père de l'indépendance, dans les années 1950, puis sous son successeur Suharto.

Alors que son père, impliqué dans un mouvement séparatiste, avait choisi l'exil, Prabowo Subianto a vécu enfant à l'étranger, à Singapour, en Suisse, ainsi qu'en Angleterre. A son retour en Indonésie, il a embrassé la carrière militaire en 1970.

Marié en 1983 à Siti Hediati Hariyadi, l'une des filles de Suharto, il a ensuite divorcé. Leur fils, Didit Hediprasetyo, créateur de mode, partage son temps entre Paris et Jakarta.

Entre 1997 et 1998, lorsque des enlèvements de militants ont eu lieu, Prabowo dirigeait la force militaire d'élite connue sous le nom de Kopassus, utilisée par Jakarta pour des opérations spéciales visant à apaiser les troubles internes.

Plus d'une dizaine de militants sont toujours portés disparus ou présumés morts et des témoins accusent également l'unité militaire de Prabowo d'avoir commis des atrocités au Timor oriental occupé alors par l'Indonésie.

L'ex-général a toujours rejeté ces accusations et n'a jamais été inculpé.

Démis de ses fonctions militaires en 1998, il s'était exilé en Jordanie avant de revenir plusieurs années plus tard pour se lancer dans les affaires, dans la pâte à papier, l'huile de palme ou encore l'énergie.

Longtemps privé de visa par les Etats-Unis et par l'Australie pour des allégations de violation des droits humains, il a connu un retour en grâce en tant que ministre de la Défense et a effectué de nombreuses visites à l'étranger dans l'exercice de ces fonctions, y compris à Washington et Canberra.

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