"Impasse", "chaos", "moratoire": la Nupes a-t-elle passé l'arme à gauche?
La guerre entre le Hamas et Israël a replongé la gauche française dans une crise profonde. Déchirés sur leurs valeurs, les partis de la Nupes s'accusent mutuellement de rompre leur fragile union. Mais...
La guerre entre le Hamas et Israël a replongé la gauche française dans une crise profonde. Déchirés sur leurs valeurs, les partis de la Nupes s'accusent mutuellement de rompre leur fragile union. Mais le point de non-retour a-t-il été franchi?
Les socialistes ont-ils rompu l'alliance?
C'est ce qu'ont affirmé Jean-Luc Mélenchon et sa garde rapprochée mardi, après la charge d'Olivier Faure contre le leader Insoumis qui "ne peut plus incarne(r) la gauche".
Mais le premier secrétaire du parti socialiste n'a pas demandé à son conseil national une sortie définitive de la Nupes, seulement un "moratoire".
Par cette résolution, adoptée de justesse (54%), le PS a donc décidé de suspendre "sa participation aux travaux de la Nupes", dans l'attente de "la construction d'un nouveau cadre commun".
Un pis-aller pour les opposants internes comme le patron des sénateurs socialistes Patrick Kanner, qui aurait préféré "une suspension claire et nette".
En pratique, les députés PS appliqueront la politique de la chaise vide à "l'intergroupe" mis en place à l'Assemblée nationale avec leurs alliés. Leur chef de file Boris Vallaud était d'ailleurs absent à la dernière réunion mardi.
Les rouges et les verts sont-ils encore dans l'union?
Les trois autres membres de la coalition étaient en revanche bien présents autour de la table de "l'intergroupe". Y compris les communistes, qui ont pourtant eux aussi voté une résolution dimanche appelant à "un nouveau type d'union".
Mais, bien que ce texte - voté par une écrasante majorité (93%) de leur conseil national - affirme que la Nupes "est devenue une impasse", le PCF n'a pas choisi d'en sortir. Ce malgré les invectives entre son leader Fabien Roussel et les dirigeants de la France insoumise.
Mardi, le député PCF Sébastien Jumel a souligné l'autonomie du groupe communiste à l'Assemblée (GDR) vis-à-vis du parti. "Nous considérons qu’il faut maintenir le lien nécessaire pour (…) travailler les chemins d’un combat commun", a-t-il dit à la presse.
Les écologistes de l'Assemblée se sont eux aussi attachés à faire redescendre la pression. Mais "il faut qu'on change quelque chose", a reconnu leur cheffe de file Cyrielle Chatelain, qui "refuse" de perpétuer un intergroupe amputé d'un seul de ses membres, car "la Nupes c'est quatre groupes".
Le sien, dans une lettre aux "151 députés de la Nupes", les exhorte "au sursaut pour éviter le chaos" et propose d’instaurer "une assemblée générale de l'ensemble des députés de gauche et écologistes" pour établir leurs "positions communes".
Les insoumis restent-ils soudés derrière Mélenchon?
Le premier cercle fait bloc autour du chef. Le coordinateur de LFI Manuel Bompard et la patronne des députés insoumis Mathilde Panot ont été parmi les premiers à relayer la parole de Jean-Luc Mélenchon, accusant eux aussi Olivier Faure de "rompre" la Nupes.
Déjà aux premières heures de l'attaque du Hamas, quand leur leader expliquait que "la violence ne produit et ne reproduit qu'elle-même", certains avaient aussitôt embrayé, à l'instar de la députée Ersilia Soudais affirmant que "la haine attire la haine" ou de son collègue Louis Boyard dénonçant "la colonisation et les exactions en Palestine".
Mais plusieurs insoumis "frondeurs", comme Jean-François Ruffin ou Clémentine Autain, ont pris leurs distances avec le refus de Jean-Luc Mélenchon et ses proches de désigner comme "terroriste" le mouvement islamiste.
Malaise aggravé par les déclarations de la députée Danièle Obono qualifiant le Hamas de "groupe politique" qui "résiste à une occupation". Des propos qui lui ont valu un signalement du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin pour "apologie du terrorisme".
"Le Hamas n'est PAS un mouvement de résistance", a écrit sur X le député Alexis Corbière, relayé par François Ruffin.
Des voix discordantes qui font néanmoins le choix de rester ancrées dans leur parti. "Il faut créer une perspective politique", assure sous couvert d'anonymat un député qui ne veut pas faire aux nouveaux fidèles de Jean-Luc Mélenchon "le cadeau de partir".
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