Immigration: Olivier Marleix, le chef de file LR renforcé sur le fil

Pari gagnant: le patron des députés LR Olivier Marleix, 52 ans, a joué gros lundi, en se prononçant pour la motion de rejet contre la loi sur l'immigration, dont l'adoption a assis sa...

Le patron des députés LR, Olivier Marleix, lors des débats sur le projet de loi immigration à l'Assemblée nationale, le 7 décembre 2023 à Paris © Ludovic MARIN
Le patron des députés LR, Olivier Marleix, lors des débats sur le projet de loi immigration à l'Assemblée nationale, le 7 décembre 2023 à Paris © Ludovic MARIN

Pari gagnant: le patron des députés LR Olivier Marleix, 52 ans, a joué gros lundi, en se prononçant pour la motion de rejet contre la loi sur l'immigration, dont l'adoption a assis sa crédibilité face à des troupes indisciplinées.      

"Est-il majoritaire dans son propre groupe?", ironisait il y a peu un cadre du parti Les Républicains, lassé d'entendre des voix dissonantes sur l'immigration au sein des 62 députés. Au final, quarante d'entre eux ont voté la motion de rejet, deux se sont prononcés contre et onze se sont abstenus dans l'hémicycle. Neuf députés LR avaient par ailleurs séché la séance.

Une victoire malgré tout pour Olivier Marleix: "Le gouvernement, s'il veut reprendre ce texte, est obligé de repartir de la version durcie par le Sénat. Et ça, ça nous va très bien", s'est-il félicité après ce coup de tonnerre.

Soutien d'Edouard Balladur en 1995, cet homme plutôt discret à l'élégance classique est élu pour la première fois en 2012 en Eure-et-Loir, loin de la circonscription du Cantal de son père, l'ancien secrétaire d'Etat Alain Marleix.

En 2022, il est propulsé à la tête d'un groupe parlementaire décimé par les défaites électorales et composé d'élus, souvent présentés comme des auto-entrepreneurs, qui considèrent devoir leur mandat de député à leur ancrage territorial davantage qu'à leur appartenance à un parti groggy, marqué par la déroute de Valérie Pécresse à la présidentielle.

La tâche d'Olivier Marleix n'est pas aisée, reconnaît l'influent sénateur LR Roger Karoutchi, qui lui accorde le mérite "considérable" de s'efforcer de conserver l'unité d'un groupe aussi disparate.

"Il a un job compliqué", explique à l'AFP celui qui a récemment demandé un "recadrage" du député Aurélien Pradié, l'un des trublions du parti qui s'est opposé à la version sénatoriale du projet de loi sur l'immigration, le jugeant "trop centriste".

Le député du Lot s'était déjà démarqué de la ligne de son patron lors de la réforme des retraites, soutenant avec 18 de ses collègues une motion de censure contre Elisabeth Borne.

Sur l'immigration, les brèches étaient apparues au grand jour fin novembre dans une tribune signée par 17 députés LR qui tendaient la main au ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

Pour éviter de donner une image de division sur l'immigration, un sujet de prédilection de la droite, M. Marleix a vite fait voter une motion, adoptée à l'unanimité, dans laquelle les députés se sont engagés à ne pas soutenir un texte "dégradé" par rapport à celui approuvé par la majorité de droite au Sénat. 

Après le passage en commission, qui a en partie détricoté le texte de la chambre haute, l'examen à l'Assemblée constituait l'heure de vérité pour M. Marleix. En jeu: le nombre de députés qui suivraient ses directives.

Un ténor de la majorité estimait ainsi qu'il aurait suffi de cinq députés LR soutenant le projet de loi pour qu'il fût adopté, entraînant alors "l'explosion du groupe qui se traduirait en tout premier lieu par le départ de Marleix".

Las: en soutenant cette inattendue motion de rejet portée par Europe Ecologie-Les Verts, M. Marleix a - pour l'instant - sauvé les meubles du groupe LR autant que sa peau.

Haine de Macron

Nostalgique du gaullisme et souverainiste assumé, père de deux filles, Olivier Marleix est un anti-macroniste farouche qui s'est illustré en saisissant la justice en 2019 après avoir présidé la commission d'enquête sur le rachat controversé de la branche énergie d'Alstom par l'américain GE, finalisé alors que le chef de l'Etat était ministre de l'Economie.

"Il a une véritable haine pour Emmanuel Macron", mais aussi pour les ex-LR partis rejoindre la majorité, tels Gérald Darmanin qu'il accuse régulièrement de mentir, ou l'ancien Premier ministre Edouard Philippe, explique une source du parti.

"Il est vertical, il a besoin de cheffer", déplore un député qui lui reproche des "erreurs", notamment des décisions prises sans concertation.

Un collègue socialiste le juge "irrité" par l'indiscipline de ses députés, même s'il l'exprime rarement en public, où il fait souvent preuve d'un humour sarcastique.

Pour Sébastien Chenu, vice-président du Rassemblement national et de l'Assemblée, il manque deux qualités au chef de file LR: "l'approche politique et une dose de courage". 

347B4YT