Travaux publics
Bernard Duhamel, président Hauts-de-France du secteur des Travaux publics : « Il faut que la commande publique reprenne…
Touché également par la crise sanitaire, le secteur des Travaux publics est prêt à travailler. Dans les Hauts-de-France, même si le secteur a repris l'activité, il subit la baisse des appels d'offres et des commandes publiques. Le président régional alerte sur l'avenir du secteur si les communes et les agglomérations ne retrouvent pas leur dynamique.
C'était en mars 2020. Premier confinement, premier arrêt brutal des chantiers. Un choc national, d'un point de vue sanitaire, social et économique. Un mois et demi après, la France se déconfine peu à peu, et les Travaux publics, dans la région, enregistrent une perte de 12,5% de l'activité... qui ne sera jamais récupérée.
"Si en 2021, la dynamique ne reprend pas, on va hypothéquer l'avenir du secteur"
« Nous ne stockons pas, ce qui est perdu est perdu, précise Bernard Duhamel, président Hauts-de-France du secteur des Travaux publics. Avant la crise, les professionnels possédaient un carnet de commandes de six mois. Aujourd'hui, il est plutôt passé à quatre ou cinq mois. »
De surcroît, durant ce premier confinement, les protocoles sanitaires n'étaient pas encore tout à fait en place qui a fait suite à un long débat sur ce sujet puis un appel au Gouvernement pour sécuriser la profession. Un appel entendu, quelques semaines après. Des semaines qui ont suffi à faire stagner le secteur, quitte à le mettre en péril.
Un an après, les professionnels du secteur ont sécurisé l'activité pour rassurer les collaborateurs qui travaillent désormais dans des conditions sanitaires strictes. L'activité a repris en majorité, le chômage partiel - comme pour le reste des secteurs – permet encore d'oxygéner les entreprises mais elles n'en restent pas moins fragilisées.
« Les PGE et l'activité partielle ont permis aux entreprises de garder la tête hors de l'eau, analyse le président régional. Nous sommes prêts à travailler, les entreprises sont prêtes mais le problème est la baisse de la commande publique qui ne permet pas de redynamiser l'activité. Oui, nous n'enregistrons pas de fermetures d'entreprises, c'est une bonne nouvelle mais l'activité stagne et ce n'est pas rassurant pour l'avenir du secteur et pour le dynamisme des territoires. »
Et cette baisse n'est pas anodine : en 2020, les appels d'offres ont baissé de 24% et les commandes des intercommunalités, quant à elles, de 40% au dernier trimestre. « En 2020, la situation s'explique mais c'était il y a un an. Il est temps de reprendre une certaine dynamique aujourd'hui, pour retrouver des niveaux de commande d’avant la crise ; si en 2021, la dynamique ne reprend pas, on va hypothéquer l'avenir du secteur », s'inquiète Bernard Duhamel.
Le message du président régional des Travaux publics est clair : il faut que les communes et les agglomérations reprennent leurs chantiers. « Les Départements, les opérateurs privés, les partenaires sociaux mais aussi les chefs d'entreprise et les collaborateurs ont joué le jeu il y a eu une grande solidarité pour que l'on continue à travailler et je leur rends hommage, continue-t-il. Il faut aujourd'hui que les pouvoirs publics se mobilisent. » Dans les Hauts-de-France, les commandes publiques représentent deux tiers des carnets de commandes du secteur.
Un secteur en danger ?
Début 2021, c'est un paradoxe que vit le secteur. « Il y a de l'argent, les entreprises sont prêtes et veulent travailler, mais les commandes ne reprennent pas. Il est préférable, à mon sens, d'utiliser l'argent à entreprendre des travaux que d’indemniser nos collaborateurs à ne pas travailler. Au-delà de l'impact pour le secteur, les travaux à prévoir dans les communes devront être faits et peut-être qu'ils coûteront plus chers car nous ferons du curatif plutôt que du préventif », alerte encore le président régional.
Pour Bernard Duhamel, l'avenir du secteur se joue cette année. Alors qu'avant la crise les Travaux publics enregistraient une dynamique « sur le long terme » - notamment avec une hausse de l'activité, le renouvellement des générations donc l'embauche des jeunes – cette courbe positive est aujourd'hui en jeu.
« Il faut se dire que nous faisons beaucoup d'insertion et nous prenons beaucoup d'apprentis, note Bernard Duhamel. Quand un maillon est défaillant, cette défaillance se répercute sur l'ensemble des activités et les intérimaires paie ce prix en premier. » Et c'est bien là tout l'enjeu.
En 2020, le taux d’intérimaire est passé à 8,4%, contre 13,4% en 2019. Une baisse significative qui pointe du doigt le possible engrenage : « Il y aura moins d’intérimaires, moins de jeunes, moins d'embauches aussi et donc moins de formation et nous n'allons plus attirer des profils vers nos métiers, continue-t-il. J'ai peur que la génération 2020/2021 soit sacrifiée. »
Mais aussi les compétences locales. « Le Canal Seine Nord est une véritable opportunité pour tous nos collaborateurs et ce serait dommage de faire appel à des compétences extérieures au territoire et de perdre les professionnels locaux », prévient encore Bernard Duhamel.
Les TP dans les Hauts-de-France en chiffres :
- 650 établissements.
- 25 000 employés.