Huîtres: les producteurs inquiets devant la désaffection des consommateurs

L'inquiétude est vive chez les ostréiculteurs car les interdictions temporaires de commercialisation d'huîtres concernant quelques rares sites de production détournent les consommateurs de ce coquillage pour lequel les fêtes de fin d'année...

Tri des huitres sur une chaine de production dans une usine à Cancale, le 29 novembre 2019 © DAMIEN MEYER
Tri des huitres sur une chaine de production dans une usine à Cancale, le 29 novembre 2019 © DAMIEN MEYER

L'inquiétude est vive chez les ostréiculteurs car les interdictions temporaires de commercialisation d'huîtres concernant quelques rares sites de production détournent les consommateurs de ce coquillage pour lequel les fêtes de fin d'année constituent l'un des temps forts des ventes.

"C'est catastrophique (...) parce que les gens n'achètent plus (...) C'est la panique générale, alors qu'on n'est même pas à 10% de zones contaminées en France" par rapport à la totalité de la production nationale, a déclaré dimanche à l'AFP Philippe Le Gal, président de la Fédération nationale de la conchyliculture.

Les zones de production dont la commercialisation est interdite pour des raisons sanitaires depuis la fin de semaine sur décision préfectorale sont situées notamment dans le bassin d'Arcachon (Gironde) ainsi que sur deux secteurs très limités du Calvados et de la Manche.

Pour illustrer cette chute des ventes, y compris dans des secteurs non concernés, Philippe Le Gal développe: "Mes huîtres étaient en vente dimanche matin sur quatre marchés, un dans le Lot, un en Corrèze et deux dans le Morbihan" où il est installé. "On n'a rien vendu du tout", a-t-il déploré, estimant à "à peine 10%" les ventes réalisées pour cette journée de Réveillon, alors que les fêtes de fin d'année sont habituellement une des principales périodes de consommation du coquillage.  

Philippe Morandeau, président du Comité régional de la conchyliculture de Charente-Maritime, l'un des principaux bassins ostréicoles français, non concerné par les interdictions en cours, observe un phénomène similaire: "J'étais à un marché à La Pallice, à côté de La Rochelle, et j'ai subi une baisse de l'ordre de 25 à 30% de mes ventes par rapport aux années précédentes", explique-t-il à l'AFP.

Associer les collectivités

Les producteurs rappellent que la qualité sanitaire de leurs huîtres n'est pas en cause et qu'ils sont victimes de réseaux d'assainissement sous-dimensionnés.

"L’enjeu numéro un est en effet l’investissement des collectivités locales dans les systèmes de traitement (des eaux usées)", a reconnu dimanche, dans un entretien au quotidien Ouest-France, le secrétaire d'Etat à la mer, Hervé Berville.

"Ces interdictions temporaires ne sont pas du tout liées au travail des conchyliculteurs. Elles sont liées à des virus (provenant des eaux usées rejetées à la mer, ndlr), pas à la qualité des huîtres", a confirmé M. Berville.  

Pour Olivier Laban, président du Comité régional de la conchyliculture Arcachon Aquitaine (CRCAA) et ostréiculteur à Gujan-Mestras, cette situation est insupportable: "Ca fait deux fois en deux ans pour nous. Donc, ce n'est plus un accident. Ce n'est plus possible. A cette période de l'année, c'est inacceptable pour nous", a-t-il déclaré dimanche à l'AFP.

"Il faudrait dimensionner les réseaux (...) C'est du travail qui n'a pas été fait les décennies précédentes qui fait qu'on en arrive là maintenant", déplore aussi Philippe Morandeau.

"Nous allons faire des points avec les collectivités pour accélérer les investissements là où c’est nécessaire, car la conchyliculture est un secteur essentiel pour l’économie locale", a promis Hervé Berville,  évaluant à "375 le nombre de sites de production" d'huîtres en France.

Crainte pour l'image

Outre l'impact financier, rétablir l'image du coquillage est l'autre préoccupation majeure des producteurs. "Dès qu'il y a eu les annonces à la télé, il y a eu des décommandes (...) Les gens lisent les gros titres et ne vont pas retenir la géographie, seulement le mot +huître+", constate M. Morandeau.

"Les gens n'achètent plus, on leur raconte tellement de bêtises, on leur fait peur", estime de son côté Philippe Le Gal. "Le mal est fait, la confiance est rompue" avec les consommateurs, craint-il.

Oivier Laban résume la situation telle qu'il la voit: "Nous, le +quoi qu'il en coûte+, on compte dessus sur cette période-là. Et là, je ne chiffre même pas la détérioration de l'image, du produit, du métier..."

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