Huit migrants meurent dans la Manche, 46 morts depuis le début de l'année
Une embarcation surchargée, peu de gilets de sauvetage, et un bateau qui se déchire sur les rochers à peine arrivé en mer: huit migrants sont morts dans un naufrage dimanche, portant à au moins 46 le nombre de candidats à l'exil...
Une embarcation surchargée, peu de gilets de sauvetage, et un bateau qui se déchire sur les rochers à peine arrivé en mer: huit migrants sont morts dans un naufrage dimanche, portant à au moins 46 le nombre de candidats à l'exil vers la Grande-Bretagne décédés dans la Manche en 2024.
Les victimes de ce drame survenu en début de nuit au niveau d'Ambleteuse (Pas-de-Calais) sont des "hommes manifestement majeurs", a déclaré le préfet du Pas-de-Calais, Jacques Billant, lors d'un point-presse. Six rescapés ont été hospitalisés en urgence relative, dont un nourrisson de dix mois en hypothermie, a-t-il ajouté.
Parmi les huit personnes décédées, six sont "d'origine africaine, une personne d'origine moyen-orientale et une personne d'origine asiatique", a précisé à l'AFP Patrick Leleu, procureur adjoint de Boulogne-sur-Mer. Des examens sur les corps avant autopsies doivent avoir lieu mardi.
L'embarcation clandestine comptait près de 60 passagers, "originaires d'Erythrée, du Soudan, de Syrie, d'Afghanistan, d'Egypte et d'Iran" et "seule une personne sur six était équipée d'un gilet de sauvetage", a souligné M. Billant.
Parti depuis "le secteur de la Slack", fleuve côtier dont l'embouchure est située entre Wimereux et Ambleteuse, le bateau est "venu s'échouer" sur une pointe rocheuse et "s'est manifestement déchiré sur les rochers", a-t-il expliqué.
Ce drame survient moins de deux semaines après le pire naufrage de l'année dans cette région, qui avait fait douze morts, dont six mineurs, le 3 septembre.
Il porte, selon le préfet, à 46 le nombre de décès dans de telles traversées clandestines depuis janvier, confirmant que 2024 est de loin l'année la plus meurtrière depuis le début du phénomène des bateaux de fortune pour traverser la Manche en 2018.
Le parquet de Boulogne-sur-Mer a ouvert une enquête pour "aide à l'entrée et au séjour d'étrangers en situation irrégulière en bande organisée, avec la circonstance aggravante de mise en danger de la vie d'autrui", a indiqué à l'AFP Patrick Leleu. Aucune interpellation n'avait eu lieu dimanche en début de soirée, a-t-il précisé.
"Les Etats français et britannique doivent repenser leur politique migratoire immédiatement", a réclamé sur X l'Auberge des migrants, une association d'aide aux exilés, qualifiant la Manche de "frontière meurtrière".
Traversées périlleuses
A la faveur d'une fenêtre météo favorable, de nombreuses tentatives de traversée ont eu lieu ces derniers jours.
En 24 heures entre vendredi et samedi, "200 naufragés ont été secourus", avait signalé samedi soir la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord (Prémar).
Sur l'ensemble de la journée, "18 tentatives de départs d'embarcations ont été suivies" par le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage du cap Gris-Nez, a-t-elle précisé.
A Ambleteuse, après le naufrage de la nuit, un second départ a eu lieu vers 07H30 dimanche, a rapporté à l'AFP Christel Leclair, bénévole dans une association locale. Les départs, "c'est tout le temps, hiver, jour, nuit, été", (...) dès que la mer est calme", a-t-elle noté.
"Les embarcations sont de plus en plus chargées, ils n'ont pas de gilet de sauvetage, éventuellement une chambre à air, il y a des enfants, des femmes enceintes, des nourrissons", a-t-elle déploré. "On est tristes, démunis."
Selon les chiffres des autorités britanniques, les embarcations arrivées sur les côtes britanniques depuis le 1er janvier comptent en moyenne 52 passagers chacune, contre seulement 13 en 2020.
Cette année, dans le Nord et le Pas-de-Calais, "20 filières d'immigration irrégulière ont été démantelées (...), entraînant l'interpellation de 77 personnes et le déferrement de 59", a assuré le préfet Billant.
"Il est important de lutter contre les trafiquants, mais les voyages dangereux seront réduits en s'attaquant aux causes profondes et en créant des opportunités et des voies sûres sur les routes migratoires", a réagi le Haut Commissaire des Nations unies pour les réfugiés (HCR), Filippo Grandi, sur X.
Faute de voies sûres, "les gens continuent et continueront à prendre les mêmes risques, peu importe la quantité de contrôles et de moyens déployés à la frontière", a abondé Charlotte Kwantes, coordinatrice nationale d'Utopia 56, association d'aide aux migrants. "Les passeurs ne font que profiter et abuser d'un système qui leur laisse toute la place".
Après le naufrage du 3 septembre, le ministre démissionnaire de l'Intérieur, Gérald Darmanin, avait appelé à la signature d'un "traité migratoire entre la Grande-Bretagne et l'Union européenne".
Depuis le début de l'année, plus de 22.000 migrants sont arrivés en Angleterre après avoir traversé la Manche, selon les autorités britanniques.
Élu en juillet, le gouvernement britannique du travailliste Keir Starmer a promis de s'attaquer à l'immigration illégale en augmentant le nombre d'expulsions de migrants et en luttant contre les passeurs.
Quelques heures après le naufrage, il a annoncé dimanche la mise en place d'un commandement d'élite chargé de la sécurité des frontières.
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