Hervé Jourdan, artisan chocolatier

C’est la période, les Saint-Nicolas en chocolat sont le quasi quotidien de l’artisan chocolatier portois.
C’est la période, les Saint-Nicolas en chocolat sont le quasi quotidien de l’artisan chocolatier portois.

Enfant, Hervé Jourdan enchaînait les gammes. Élève au conservatoire de Metz, il passait du piano au basson puis à la flûte sans perdre le la. Mais un jour, comme une symphonie inachevée, les notes se sont envolées une à une. Hervé a dû alors ranger ses instruments pour entrer de plain-pied dans la vie active. Apprenti pâtissier puis chocolatier, il compose aujourd’hui ses propres œuvres à grands coups de ganache et de praliné.

 Période oblige, il faut jouer des coudes pour se faire une petite place dans le laboratoire d’Hervé Jourdan à Saint-Nicolas-de-Port. Depuis le mois d’août, l’artisan chocolatier ne vit plus…  «il survit» comme il aime dire un petit sourire au coin des lèvres. Il consacre en effet tout son temps à la production des chocolats des fêtes de fin d’année. En coulisse, tout le monde s’active. Pendant que l’une met en sachet les dernières fabrications de chardons lorrains, une autre baigne un par un des chocolats dans un glaçage d’un vert élégant. Le geste se veut net et précis. Du coin de l’œil, le maître l’observe… Hervé Jourdan est comme ça. Perfectionniste, il ne néglige rien. Sa vie parfois difficile a laissé peu de place à l’improvisation.

Du conservatoire au fournil

 

Hervé Jourdan a dès son plus jeune âge aimé la musique. Alors qu’il grandit dans la maison familiale à Bouxières-aux-Dames, sa mère l’envoi au conservatoire à Metz. Il y apprend à jouer de la flûte, du basson et du piano. À cette époque, son avenir est tout tracé. Plus tard, il sera musicien ! Pourtant, le rêve se brise. Alors qu’il n’a que 15 ans, sa mère lui annonce qu’elle ne peut plus lui payer ses leçons de musique. Hervé décide alors de tout envoyer balader. L’annuaire en main, il fait un par un le tour des patrons susceptibles de le prendre en apprentissage. La lettre «B» est la bonne. Alain Batt à Nancy l’embauche.  Il quitte Bouxières et la maison familiale, sans se retourner. «J’ai été très bien accueilli par Alain Batt. Il m’a tout appris» se souvient-il. Il passe son CAP de pâtissier, chocolatier, glacier avant de se consacrer uniquement au chocolat, synonyme de créativité pour lui. Mais après dix-sept ans de bons et loyaux services, Hervé Jourdan, devenu alors maître chocolatier, décide de voler de ses propres ailes.

Artisan et patron à la fois

 Il trouve boutique à son pied à Saint-Nicolas-de-Port, à quelques minutes de chez lui. La transition est difficile. Le costume de patron n’est pas facile à porter. Aujourd’hui encore, alors qu’il gère son entreprise depuis vingt ans, il est souvent confronté au doute. «J’ai eu du mal à changer de statut. J’ai perdu certains amis», regrette-t-il. Heureusement, son imagination et sa créativité balayent le reste. «J’ai des clients qui viennent me voir pour que je leur crée un personnage ou un objet pour un évènement précis» raconte-t-il. Il se souvient notamment du jour où on lui a commandé une alpine Renault tout en chocolat. Pourtant à cinquante-deux ans, Hervé Jourdan pense de plus en plus à raccrocher. «Je me donne encore sept ans», précise-t-il. Ensuite il profitera pleinement de son petit-fils (son bonheur) et de ses filles (ses fiertés). Un jour peut-être reprendra-t-il ses instruments, rien que pour lui, histoire de ne pas finir sur une fausse note.