Guimerville : Pochet du Courval a inauguré son four électrique

Fonctionnel depuis le 17 février, il permet de décarboner la production d’un tiers du verre produit chaque jour. Malgré les incertitudes, le groupe familial entend rester positif. Il annonce le recrutement de 150 personnes en deux ans sur le site qui occupe 1 650 salariés.

Benoît Marszalek, directeur des opérations, Eric Lafargue, directeur commercial et Xavier Gagey, président du directoire. (Photo I.Boidanghein)
Benoît Marszalek, directeur des opérations, Eric Lafargue, directeur commercial et Xavier Gagey, président du directoire. (Photo I.Boidanghein)

« Un évènement majeur dans l’histoire de notre groupe ». Ancienne présidente du directoire du groupe familial Pochet du Courval, représentant la huitième génération, Irène Gosset ne cachait pas joie le 14 mars dernier lors de l’inauguration sur le site de Guimerville du premier four électrique français dédié au flaconnage de luxe dont elle est la marraine. L’évènement s’est déroulé à peine un mois après son démarrage, sur deux jours, le premier étant réservé aux clients. Une soixantaine étaient présents.

Compétitivité économique et exemplarité écologique

Au total, il est doté d’une capacité de 66 tonnes de verre par jour à 1 550 °C contre 50 pour un four au gaz. Le reste du process comme le passage dans l’arche de cuisson à 550°C est toujours alimenté par du gaz. Le site de Guimerville produit un million de flacons de parfums de luxe, des plus épurés aux plus audacieux, et de pots cosmétiques.

Cet investissement de 40 millions d’euros a été soutenu à hauteur de près de 6 millions d’euros par l’Etat via le plan France 2030, l’agence du développement de l’emploi (ADEME) et la région Normandie. Préfet de Seine-Maritime, Jean-Benoit Albertini salue un projet qui allie « compétitivité économique et exemplarité écologique participant au développement local par des emplois directs. L’Etat est au côté des entreprises qui prennent des mesures concrètes pour l’environnement. Quand on agit ensemble, on peut avancer vers un avenir plus durable ».

Dès 2014, l’entreprise de 1 650 salariés s’est engagée dans une feuille de route exigeante et ambitieuse portant sur l’optimisation des matières premières (35% sont recyclées en interne et 15% proviennent du verre blanc des ménages), des projets engageants sur les émissions indirectes comme par exemple la rationalisation des emballages et, donc, la diminution d’énergie fossile. En 2033, à l’issue de ce plan de décarbonation, qui regroupe 40 actions, les émissions seront réduites de 50 %. Il devrait s’achever par la construction d’un deuxième four électrique. Ce plan de décarbonation représente un investissement global de plus de 100 millions d’euros.

Un flacon particulier a été fabriqué pour l’évènement. (Photo I.Boidanghein)

12 000 heures de formations internes et externes

Concrètement, la construction du four 2, a duré sept mois. 4 000 tonnes de béton ont été utilisées. 100 km de câbles ont été tirés. La charpente pèse 500 tonnes. 10 km de tuyaux ont été posés. 130 entreprises ont été mobilisées soit 750 intervenants sans compter une centaine de salariés de Pochet du Courval. 12 000 heures de formations internes et externes ont été déployées à destination des équipes techniques et fusion en collaboration avec le verrier SGD Pharma situé à Saint-Quentin-Lamotte-Croix-au-Bailly dans la Somme qui possède lui aussi la technologie de fusion électrique pour l’industrie pharmaceutique.

En amont, le Groupe Pochet et ABO Wind avaient annoncé la signature d’un contrat d’achat d’électricité verte sur vingt ans dans le cadre de la mise en service du plus grand parc photovoltaïque du développeur en France, d’une puissance d’une vingtaine de MWc. Ce qui permet au groupe de de réduire son impact sur la planète, en majorité aux beaux jours, et en sécurisant une prix d’achat de l’électricité à long-terme.

Alors que les incertitudes mondiales sont importantes, le groupe s’affiche à contre courant : « Ce projet est le fruit de la confiance et de la capacité de la famille à se projeter dans le futur, pointe Xavier Gagey, président du directoire du groupe Pochet, qui a fêté en 2023 ses 400 ans. J’adresse un message aux politiques. Nous avons besoin d’un cadre législatif stable sur les prix de l’électricité. Aux Etats-Unis ou en Asie, ils sont deux à quatre fois moins chers ».

30 % de production consacrée à de nouveaux produits

Expertise, compétitivité, innovation technologique, agilité, passion, motivation… sont quelques un des maitres mots du groupe. Depuis trois ans déjà, il recourt avec succès à l’intelligence artificielle pour notamment épauler les régleurs sur les machines de fabrication et stabiliser le process. Il peut compter sur la confiance de ses donneurs d’ordre, qui sont les grandes maisons de luxe à la française.

« La décarbonation pour nous va au delà de la compétitivité, ajoute Xavier Gagey. Nous avons la volonté d’accompagner nos clients. On se sent soutenus par l’Etat. Le Covid a été un accélérateur de l’industrie française ».

Lors de la pandémie, la Glass Vallée, qui regroupe plus de 70 % des entreprises spécialisées dans le flaconnage de luxe, avait connu une baisse de son activité d’environ 30%. Elle avait ensuite enregistré une forte croissance avant que l’année 2024 ne soit en demi-teinte car les clients avaient préféré déstocker.

Si 6 000 références sont comptabilisées, 30 % de la production est consacrée à des nouveautés qui sortiront en moyenne neuf mois après : « Le marché du parfum est volatile, reconnait Eric Lafargue, directeur commercial du Groupe Pochet. On sent qu’on arrive au bout de la période de destockage. La visite de nos clients a été positive. Nous participons aussi à leur plan de décarbonation qui s’inscrit dans la durée ». « On en gagnera de nouveaux », prévoit déjà Benoît Marszalek, directeur des opérations.

Le groupe se veut donc rassurant. Il a annoncé la création d’environ 150 postes sur deux ans sur son site de Guimerville, notamment pour des emplois de choisisseurs ou dans la maintenance. Afin de séduire ses futurs collaborateurs, le groupe ouvre de plus en plus ses portes aux scolaires.