GRTgaz s'inquiète pour le sort du biométhane

Ce devait être un classique bilan de la consommation de gaz dans les Hauts-de-France en 2018. GRTgaz se félicite du développement du biométhane et de la démocratisation de son utilisation. Pourtant, un projet de Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), publié le mois dernier, est susceptible d'inverser cette courbe de progression.

Le projet de Programmation pluriannuelle de l’énergie du 25 janvier dernier risque de ralentir la production de biométhane.
Le projet de Programmation pluriannuelle de l’énergie du 25 janvier dernier risque de ralentir la production de biométhane.

Lille s’était mise à la mode des transports au gaz naturel (ou GNV) dès 2013. C’était la première métropole à mettre en place des bus roulant au biométhane, rejetant alors 10 à 20% de CO22 en moins que les véhicules diesel. Depuis, la tendance a prit de l’ampleur. Aujourd’hui, l’Hexagone enregistre une augmentation de 78% du nombre de poids lourds roulant au GNV. La région compte d’ailleurs huit stations GNV publiques.

Un
développement remarquable

Selon le bilan 2018 de GRTgaz, onze sites de biométhane seraient raccordés aux réseaux gaziers dans les Hauts-de-France, représentant une capacité totale de 188 millions de kilowattheures (kWh) par an, soit la consommation de 16 000 foyers. Entre 2017 et 2018, les projets de biométhanisation ont doublé, si bien que 2,4 milliards de kWh pourraient être produits chaque année d’ici 2021. Pour le moment, le gaz naturel représente 3% du gaz consommé en Hauts-de-France. «C’est autant d’énergie qu’on n’achète pas à l’étranger», se satisfait Thierry Daniel, délégué Nord-Est GRTgaz. À terme, la filière régionale pourrait représenter 11 000 emplois non délocalisables.

Un leadership
fragilisé ?

Mais, depuis le 25 janvier, une ombre vient obscurcir le tableau. Son nom : le projet de Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). La dernière PPE datait de 2015. Elle prévoyait que 10% du gaz consommé en France serait naturel pour 2030, ce qui aurait permis de tendre vers les 100% en 2050. Mais le nouveau projet, en consultation depuis le mois dernier, revoit son objectif de production à la baisse, en passant de huit à six térawattheures pour 2023. Autre mauvaise nouvelle, le prix de rachat du biométhane va lui aussi diminuer. «Le mégawattheure vaut actuellement entre 80 et 120 €. La PPE prévoit une baisse des prix à 67 €. Ça peut réjouir le consommateur, mais une telle mesure pourrait décourager les porteurs de projet à produire du biométhane, explique Thierry Daniel. En plus, ils seraient sélectionnés selon un appel d’offres.» Ce projet de PPE n’engage pour l’instant qu’une discussion qui débouchera sur une loi au mois d’avril. «Comme la FNSEA et d’autres distributeurs énergétiques, nous allons entrer dans une campagne de communication contre cette PPE. C’est aussi le monde agricole qui en dépend.»

Thierry Daniel, délégué Nord-Est GRTgaz.

Bilan de la consommation en 2018

En 2018, la consommation brute de gaz dans les Hauts-de-France a représenté 70,5 milliards de kWh, soit un recul de 4% par rapport à 2017. «Cette évolution s’explique par des températures plus clémentes et une moindre sollicitation des trois centrales de production électrique fonctionnant au gaz, en raison d’une meilleure disponibilité du parc électronucléaire, éolien et photovoltaïque», justifie GRTgaz. Pourtant, la demande de gaz dans l’industrie a progressé (+2%), tout comme celles des clients raccordés aux réseaux de distribution (plus de 1 500 communes dans la région). Deux nouveaux sites industriels ont converti leurs installations, passant du fioul au gaz. Il s’agit de la sucrerie Cristal Union dans la Somme et du verrier Saverglass dans l’Oise.