Groupe Lhotellier : « Faire changer nos métiers, en intégrant les composantes environnementales »
Créé en 1919 à Blangy-sur-Bresle, le groupe Lhotellier étend son activité sur un large territoire et se diversifie. Entretien avec Jean-Philippe Lemesle, tout nouveau directeur général du groupe. Interview.
Créé en 1919 à Blangy-sur-Bresle, le groupe Lhotellier étend son activité sur un large territoire et se diversifie. Entretien avec Jean-Philippe Lemesle, tout nouveau directeur général du groupe.
1 670 collaborateurs (y compris intérimaires) et 330 M€ de chiffre d’affaires… Vous venez de prendre les rênes d’un groupe centenaire. Quelle est la feuille de route qui vous est fixée ?
J-P Lemesle : Le groupe s’est inscrit depuis 2019 sur un plan stratégique qui s’appelle « En route pour 2026 ». Il s’appuie sur trois axes : bétonner, bouger et explorer. Bétonner nos activités historiques, bouger de façon à engager de nouvelles méthodes dans ces métiers historiques et explorer de nouveaux métiers. Depuis 2019, le groupe a déjà travaillé sur ces sujets. Nous allons mener à bien ce plan, et en préparer un nouveau, pour nous projeter au-delà de 2026…
Bétonner vos activités historiques, qu’est-ce que cela signifie ?
J-P. L. : Les travaux publics et le bâtiment représentent la plus grande part de notre activité : environ 70 % du chiffre d’affaires du groupe. Nous les avons développées et étendues sur de nouveaux territoires, notamment le nord de l’Île-de-France. C’est un marché dynamique sur lequel nous sommes arrivés par des opportunités de chantiers et d’hommes. Et nous pouvons nous appuyer sur un outil industriel : notre nouvelle centrale d’enrobés à Bruyères-sur-Oise. Celle-ci intègre de nouvelles technologies qui nous permettent de fabriquer des enrobés tièdes, en intégrant des taux de recyclés jusqu’à 50 %.
Mais vous explorez aussi de nouveaux métiers…
J-P. L. : Oui. Nous avons envisagé un nouveau métier qui est le béton, avec une entreprise que nous avons constituée qui s’appelle Révo Béton. Nous nous sommes aussi engagés dans la professionnalisation de certains métiers. C’est le cas, notamment, pour le transport, une composante très forte dans nos métiers du BTP, avec une filiale qui s’appelle Magma Transport. Mais la plus grosse exploration que nous ayons menée aujourd’hui, c’est avec le rachat de Terre Solaire et la constitution d’un gros bloc énergie au sein du groupe. Nous misons beaucoup sur les énergies durables : le photovoltaïque notamment ou l’éolien.
Une conséquence de la flambée du coût de l’énergie ?
J-P. L. : L’inflation que nous avons subie sur le coût de l’énergie a été catastrophique pour nos métiers. Cela a été une vraie claque. Mais tout nous pousse à changer, en intégrant les composantes environnementales et énergétiques. Nous avons de plus en plus souvent des indicateurs RSE dans les appels d’offres. Nous devons suivre cette tendance, nous adapter, l’anticiper. C’est un enjeu pour nos clients d’avoir de l’intégration de recyclés dans les enrobés ou du granulat fabriqué à partir de matières recyclées… Alors, forcément, nous avons pris le pas, avec par exemple la plateforme de recyclage d’Amiens, ou celle de Rouen qui ouvrira très prochainement. C’est aussi un moyen d’intéresser les nouvelles générations à nos métiers. C’est un vrai enjeu d’attractivité.
Un moyen de répondre aux difficultés de recrutement ?
J-P. L. : Tout à fait. Nous avons aussi déployé une grosse politique Ressources Humaines, avec des chargés de recrutement en veille permanente, qui chassent de nouveaux profils. Nous construisons aussi une forte relation avec les écoles et nous proposons aux nouveaux arrivants un parcours d’intégration. C’est important pour nous de conserver l’esprit familial du groupe. Et nous essayons aussi d’être plus inclusifs. Par exemple, j’espère voir monter à 30 % la part des femmes dans le groupe d’ici 2030. Elles représentent aujourd’hui 12 % du personnel.
Pour conclure, un mot sur le marché…
J-P. L. : Le contexte est dur pour nos métiers du TP et du bâtiment. Ce sont des marchés qui ont souffert de l’inflation. Les investisseurs ont pris peur et ont décalé un certain nombre de lancements de dossiers. Et avec des affaires compliquées à tenir en termes de prix. L’inflation nous a amenés à revoir nos considérations sur nos achats. Nous les avons restructurés, pour bien mesurer les impacts et bien les répercuter à nos clients. Nous avons toujours été attentifs et bienveillants avec nos fournisseurs, qui sont souvent locaux. Mais nous devons être aussi très vigilants sur nos coûts d’achats. Il nous faut être plus rigoureux et exigeants sur cet aspect « achats ». Nous n’y sommes est pas encore, mais nous y travaillons.
Pour Aletheia Press, Benoit Delabre