Grâce à Van Robaeys Frères, il y a du lin des Hauts-de-France dans les dollars américains !
Les billets américains sont composés de 30% de lin pour en assurer la solidité et la couleur. Depuis plus dix ans, l’entreprise Van Robaeys Frères, basée à Killem dans les Flandres, livre la Réserve fédérale américaine.
Qui sait qu’il a du lin entre les mains lorsqu’il manipule des dollars ? C’est même du lin des Hauts-de-France qui compose en partie le célèbre billet vert. En effet, le Nord de la France est extrêmement propice au développement de cette plante, à l’origine du plus vieux textile du monde.
«Les Américains n’en produisent pas», explique tout simplement Pierre D’Arras, PDG de l’entreprise Van Robaeys Frères, fondée en 1929 par des arrière-grands-parents belges ayant fui Ypres lors des combats de 1917. De fait, «leur climat est trop dur. Le lin a besoin de la douceur océanique pour se développer. Au-dessus de 30 degrés, il ne pousse plus !» Résultat, la Réserve fédérale américaine se fournit depuis plus de dix ans auprès de cette grosse entreprise des Flandres.
Les fibres de lin prennent très bien la teinture
Alors pourquoi ce choix ? «Les billets américains sont réputés indestructibles, explique Pierre D’Arras. Les 30% de lin qui entrent dans la composition du mélange qui sert à fabriquer le papier-dollar participe à sa solidité. Mais il assure aussi sa tenue en couleur car c’est une plante qui prend très bien la teinture.»
Dans le cahier des charges, rien n’est laissé au hasard. «Quand on a extrait les fibres courtes, qui se sont détachées au moment du battage, on les affine et on les ramène à la longueur du coton. On a un degré de propreté, une longueur et une couleur à respecter extrêmement précis.» Mais il ne peut pas en dire beaucoup plus : «Ils sont très réticents, même avec nous. C’est difficile d’aller visiter.»
Faner dans de bonnes conditions
La collecte du lin est une opération délicate. «Le lin a un cycle végétatif d’une centaine de jours», raconte Pierre D’Arras, ingénieur Arts et Métiers de formation, devenu un peu ingénieur agronome par la force des choses. «Quand il est à maturité, une fleur bleue sort. Elle ne dure que quelques heures.» C’est le début de l’arrachage, nous sommes alors début juillet. Puis le lin reste au sol et sera même retourné. C’est le rouissage. «Il doit faner pour avoir cette couleur bleue qu’on appelle le gris argenté. S’il n’a pas le temps de faner, il garde une couleur blonde.»
Enfin, il est enroulé à partir de la fin du mois d’août. Le temps très mitigé de cet été 2021 n’a pas facilité le travail des 113 salariés et des 50 saisonniers recrutés spécialement pour la récolte. «Cela n’a pas été trop gênant pour l’arrachage. En revanche, les process ont mis deux fois plus de temps. Il a eu beaucoup de mal à mûrir.»
40 000 tonnes de paille par an
L’entreprise Van Robaeys Frères travaille avec 600 agriculteurs. «Notre métier, c’est l’accompagnement du cultivateur, la récolte et l’extraction de la fibre», conclut Pierre D’Arras. Chaque année, ce sont 6 000 hectares de lin qui sont ainsi arrachés, ce qui représente 40 000 tonnes de paille qui sont ensuite traitées dans les usines de Killem et de Fortel-en-Artois, site inauguré en 2017.
Aujourd’hui, Van Robaeys Frères exporte, via le port de Dunkerque, aux quatre coins du monde, de la Chine à l’Inde, en passant par le Pakistan, le Mexique et le Japon, spécialement pour l’industrie textile. Mais l’Europe n’est pas en reste, principalement la Belgique et l’Allemagne. Les anas, provenant de la tige centrale de la plante, y finissent en panneaux thermiques ou en litière, et les graines en huile…