Fusionner pour viser l’international
Alors que le gouvernement s’apprête à baisser de façon drastique le nombre de pôles de compétitivité en France, la région se prépare à l’offensive en unissant les forces. Le pôle NSL – Nutrition Santé Longévité – et le réseau d’entreprises Clubster Santé ont décidé de fusionner pour créer un guichet unique.
Lancée fin octobre dernier, la quatrième phase des pôles de compétitivité (2019-2022), s’inscrit dans une dimension européenne avec une ambition forte du gouvernement : faire de la France la première nation la plus innovante en Europe. Principalement assuré par le Fonds unique interministériel (FUI), le financement des projets de R&D est aujourd’hui stabilisé autour des 50 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 125 millions d’euros des PSPC (projets de R&D structurants pour la compétitivité). Une somme que se partage la soixantaine de pôles de la phase III, qui ne devraient être qu’une trentaine dans les quatre ans à venir. Les sept pôles régionaux1 vont donc devoir faire leurs preuves pour prétendre au renouvellement de leur labellisation. Certains d’entre eux n’ont pas attendu la décision de janvier prochain pour unir leurs forces : le pôle de compétitivité Nutrition Santé Longévité et Clubster Santé ont décidé de fusionner. «Nous allons créer une association plus forte et plus présente auprès de ses membres. Finalement, c’est étonnant que nous n’ayons pas pensé avant à fusionner. Le regroupement est une nécessité», explique Thomas Buffin, président de Clubster Santé, qui espère atteindre les 350 membres, notamment en allant à la conquête des entreprises du sud de la région, encore trop peu impliquées. Le Clubster Santé compte 230 membres (des entreprises spécialisées dans les medtech, l’hospitech, la silver économie, la e-santé et la biotech) et le pôle NSL, 160 (biotech, pharma et nutrition), avec une quarantaine de membres communs.
«C’est dans les interpénétrations que l’on trouve les solutions»
Simplifier les démarches des entreprises
Avec des problématiques communes aux entreprises membres – un délai de maturation des dossiers de R&D très long, lié aux contraintes réglementaires, la nécessité de trouver des fonds, du temps et de l’expérimentation –, cette nouvelle association devrait voir le jour «le plus rapidement possible, en 2019». Avec 1 000 entreprises pour 30 800 salariés, la filière nutrition santé régionale pèse lourd, pour un chiffre d’affaires de 12 milliards d’euros. Autant dire qu’elle joue un rôle fondamental dans l’économie régionale. La région occupe la troisième place au rang national, après Paris et Lyon. «L’objectif de cette nouvelle association ? Avoir une bonne visibilité à l’international. C’est déjà le cas pour le pôle NSL, mais malheureusement pas assez pour le Clubster Santé», détaille Bruno Desprez, président du pôle NSL et directeur général de Florimond Desprez. «Dans un contexte où l’Etat se désengage des pôles, les PME restent en demande d’acculturation à la recherche et à l’innovation. C’est indispensable pour elles. Notre candidature à la labellisation a été présentée à la Région et à la MEL : c’est important que l’on s’inscrive dans les politiques régionales», poursuit-il. Concrètement, il y aura donc une gouvernance unique et un interlocuteur identifié pour les entreprises, qui s’y perdent parfois entre les missions d’Eurasanté, du Clubster Santé et du pôle NSL. «Sur les relations, cela ne changera pas puisque cela fait 20 ans que nous travaillons ensemble. Mais sur les moments d’animations comme les conventions d’affaires ou les networkings, on pourra associer les medtech, les biotech ou encore les pharma. C’est dans les interpénétrations que l’on trouve les solutions. Et quelle que soit l’issue de la labellisation, on fusionnera. L’appel de l’Etat a joué un rôle de prise de conscience», avoue Etienne Vervaecke, directeur d’Eurasanté. Avec pour thèmes prioritaires dès 2019, la e-santé et l’intelligence artificielle, la future association s’ouvrira aussi bien aux thématiques de la nutrition qu’aux biotech-pharma, offrant aux membres une nouvelle source de business, dans des domaines qui, parfois, ne se côtoyaient pas. «Les industries se réclament de la nutrition et de la santé. Prenez l’exemple de Lesaffre : quand on leur demande leur cœur d’activité aujourd’hui, ils se positionnent sur le ‘one health’ auprès des hommes, des animaux et des plantes. Il y a 10 ans, ils se disaient leader de la panification», poursuit Etienne Vervaecke. Sur un budget avoisinant les 1,2 million d’euros, le pôle NSL reçoit une dotation de l’Etat de 240 000 €, somme qui, dans les années à venir, pourrait diminuer. «L’ensemble des apports de la Région est déjà supérieur à ceux de l’Etat. La Région est sans aucun doute le plus gros contributeur aux pôles de compétitivité. À Paris, ils ne savent même pas que nous sommes la 3e région de France dans le domaine de la santé et la 1re en agroalimentaire», déplore Bruno Desprez. Ce rapprochement devrait donc nourrir des collaborations interentreprises, et aussi, au-delà, faire rayonner la R&D régionale à l’international.
- Matikem (matériaux, chimie et chimie verte), Team2 (environnement, matières et matériaux), UP-tex (matériaux textiles), Picom (technologies de l’information), NSL (nutrition, santé et longévité), Aquimer (produits aquatiques) et i-Trans (ferroviaire).