Fives Nordon, Nouvelle stratégie en marche

La manutention de l’imposante pièce s’effectue dans un calme nécessaire à la bonne exécution de l’opération avant son traitement dans l’un des ateliers de production de Fives Nordon (groupe Fives d’ingénierie industrielle international affichant 2,395 milliards d’euros de CA l’an passé) sur son site de l’avenue du XXe corps en plein cœur de Nancy. Dans leurs zones de travail hyper protégées histoire d’éviter tous risques face aux champs électromagnétiques, les soudeurs allument leur flamme et mènent à bien leurs interventions savamment inscrites sur un tableau de poste où chaque opérateur est identifié pour une traçabilité optimale. 

Les points de soudure sont d’une minutie d’orfèvre et l’ensemble des pièces passe par la case vérification où la moindre imperfection révélée par de multiples contrôles est détectée. Un savoir-faire certain et unique et de plus en plus recherché. Dans une autre partie, les imposantes cintreuses s’occupent dans un process précis d’éléments de tuyauterie dont certains viendront prochainement équipés le futur programme nucléaire étatique des réacteurs EPR 2. 

Une toute nouvelle cintreuse par induction est en cours d’installation et devrait tourner prochainement à plein régime afin de répondre à ce programme énergétique ambitieux. L’un des moteurs de développement et de croissance pour l’industriel spécialiste de la tuyauterie et chaudronnerie industrielles de haute technicité qui vient de fêter ses 120 ans. L’imposante machine fait partie de la première phase d’investissement, de 15 M€, lancée par l’industriel pour renforcer son parc machines et optimiser et moderniser son site de production. Au total, le plan d’investissement affiche les quelque 40 M€.

© Johann Marin-Thiery Jean-Jacques Depuydt, le président de Fives Nordon, devant une nouvelle cintreuse à injection, l’un des premiers investissements du vaste plan de 40 M€ annoncé par l’industriel.

Nouvelle cintreuse à induction

«Ces investissements sont nécessaires pour mener à bien notre programme de modernisation pour anticiper les besoins de l’industrie nucléaire qui demeure l’un de nos segments de marché principal.» Devant la toute nouvelle cintreuse à induction, Jean-Jacques Depuydt, le président de Fives Nordon sait que l’anticipation demeure la clé pour répondre aux enjeux énergétiques liés à la filière nucléaire. 

La nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour la période 2025-2035 et la stratégie nationale bas carbone (SNBC), aujourd’hui en consultation publique jusqu’à la mi-décembre, devrait, en toute logique, permettre la continuation et la réalisation du nouveau plan nucléaire national. 

«Cela semble être en bonne voie même si cela a pris un certain retard», constate Jean-Jacques Depuydt. Ces documents de programmation sont attendus depuis plusieurs mois par toute la filière. Ils ont été notamment freinés par l’épisode politique de la dissolution de l’Assemblée nationale et des changements politiques qui en ont découlés. L’ouvrage semble donc bien être remis sur le métier même si l’adoption des textes par décrets ne devrait pas intervenir avant la fin du premier trimestre 2025. 

Le plan stratégique étatique vise à prolonger le parc nucléaire actuel et le développement du nouveau nucléaire avec la construction de six nouveaux réacteurs de type EPR2 (d’ici 2035-2050) et huit autres possibles. Ces réacteurs sortiraient de terre sur les sites déjà existants du parc. La région possède aujourd’hui 3 CNPE (centrale nucléaire de production d’électricité) et huit réacteurs : Cattenom (4 réacteurs), Chooz (2 réacteurs) et Nogent-sur-Seine (2 réacteurs) pour une puissance installée de 10 800 MW. Quoi qu’on en dise, le nucléaire s’affiche comme un des éléments phares du mix-énergétique visant à atteindre la neutralité carbone en 2050.

© Johann Marin-Thiery L’ensemble des pièces réalisées passent un contrôle drastique histoire de déceler la moindre imperfection.

Doubler la capacité de production

«Il nous faut être prêt pour faire face à ce défi du nucléaire. L’investissement que nous réalisons est indispensable pour le relever. Ce développement est dans la lignée de l’histoire de notre groupe qui est fait d’innovation perpétuelle. La réindustrialisation, la décarbonation de l’industrie et la digitalisation et l’automatisation sont les trois principales tendances actuelles qui portent notre développement», assurait début octobre, Frédéric Sanchez, le président du groupe Fives à l’occasion des 120 ans de Fives Nordon sur le site nancéien. 

Au cœur des ateliers, cette transformation est palpable et surtout en marche. Un nouvel atelier de tuyauterie de 3 000 m² est en cours de réalisation pour permettre à l’industriel de doubler sa capacité de production. Le tout additionné par l’acquisition de nouvelles machines comme l’une permettant de souder en double couche. Ce redimensionnement de l’outil de production s’additionne à une vaste politique de recrutement. 600 recrutements sont programmés dans les dix années à venir principalement à des postes de tuyauteur, chaudronnier, soudeur ou encore chef d’équipe, conducteur de travaux et ingénieurs calculs et de projets qualité. «

Il existe aujourd’hui une véritable tension sur nos métiers. Nous devons garder nos compétences surtout dans un contexte où nos propres clients sont également en recherche de ces mêmes compétences. C’est une tendance générale à l’ensemble de la profession», assure Jacques Depuydt, qui est également président depuis juin dernier de France Chaudronnerie, le syndicat national de la chaudronnerie, tuyauterie et maintenance industrielles. Une nouvelle donne à également anticiper...