Européennes: pour Marion Maréchal, tout reste à construire

Désignée mercredi tête de liste de Reconquête! pour les élections européennes de juin, Marion Maréchal doit désormais convaincre de son avenir politique, huit ans après sa défaite aux régionales et son...

Marion Maréchal, membre et tête de liste aux Européennes de Reconquête!, sur le plateau de TF1 à Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine, le 6 septembre 2023 © Thomas SAMSON
Marion Maréchal, membre et tête de liste aux Européennes de Reconquête!, sur le plateau de TF1 à Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine, le 6 septembre 2023 © Thomas SAMSON

Désignée mercredi tête de liste de Reconquête! pour les élections européennes de juin, Marion Maréchal doit désormais convaincre de son avenir politique, huit ans après sa défaite aux régionales et son départ dans la foulée du Rassemblement national.

Cela devait être l'image de son retour dans le combat électoral: une interview sur le plateau du journal de 20H00 de TF1 pour annoncer qu'elle sera la numéro un de la liste. Las: quelques minutes avant, Eric Zemmour a pris les devants dans une interview au Figaro, précisant qu'il avait "décidé" de lui confier cette responsabilité - une initiative "parfaitement coordonnée" entre les deux, jure-t-on chez Reconquête.

L'ex-députée du Vaucluse a en tout cas voulu s'affirmer : alors que son patron assimile le scrutin à un "référendum sur l'immigration", Mme Maréchal a assuré que "non, ça ne sera pas que ça", annonçant au passage qu'Eric Zemmour "sera notre candidat naturel, bien sûr, pour les élections de 2027", jusqu'alors une simple hypothèse.

Les deux doivent quoiqu'il en soit s'exprimer ce weekend devant plusieurs milliers de militants lors de l'université d'été du parti, à Gréoux-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence).

Au-delà, c'est l'avenir politique de Marion Maréchal que semblent interroger ces élections européennes, après une vraie-fausse cure d'abstinence politique qui s'est parfois révélée erratique.

La petite-fille de Jean-Marie Le Pen avait pourtant gagné ses galons dès le jour de son entrée au palais Bourbon en 2012, à l'âge de 22 ans, plus jeune députée de la République française.

Une défaite aux élections régionales en Provence-Alpes-Côte-d'Azur en 2015, son refus de concourir à nouveau aux législatives en 2017, puis son retrait de la vie politique pour se consacrer à l'ouverture d'une école à Lyon (les "diplômes" qui y sont délivrés n'ont jamais été reconnus par quelque université) ont fini par semer le doute quant à ses véritables intentions. Elle a par ailleurs longtemps répété ne vouloir s'intéresser qu'à la "métapolitique", soit la "bataille culturelle" qui doit imposer "les idées" avant de se consacrer à celle des urnes.

Un temps présentée comme dauphine putative de sa tante Marine Le Pen, elle avait finalement assumé de devenir sa rivale en soutenant Eric Zemmour à la présidentielle de 2022. Ce premier retour dans l'arène, présenté comme la botte de Nevers de l'ex-polémiste pour affaiblir le RN et prendre l'avantage à l'extrême droite, s'était en fait révélé vain.

Pacte de non-agression

Deux ans plus tard, Marion Maréchal demeure face à un chantier. Objectif des Européennes: "Rassembler les électeurs de droite autour d'une grande bataille civilisationnelle de défense de notre identité, de notre culture, de nos valeurs menacées par la submersion migratoire et par l'islamisation", a-t-elle avancé sur TF1.

Chantre de "l'union des droites", réputée libérale économiquement, conservatrice sur les mœurs mais moins anti-UE que la doxa lepéniste, Marion Maréchal vise ouvertement l'électorat de LR, alors que Reconquête! et le parti de droite sont pour l'instant à touche-touche dans les intentions de vote, autour de 7%.

C'est toutefois cette même stratégie de séduction des sympathisants de l'ex-RPR que semble vouloir adopter Jordan Bardella, tête de liste du RN pour le scrutin de juin, qui caracole déjà en tête des sondages.

"C'est Marion qui va devoir se positionner par rapport à nous, pas l'inverse: on ne joue pas dans la même catégorie", relève un stratège du Rassemblement national.

"Mais on veut que ceux qui ont voté Zemmour à la présidentielle se disent qu'ils ont intérêt désormais à se retrouver dans le camp des vainqueurs, c'est-à-dire nous, donc on n'a pas intérêt à taper sur eux, et eux non plus", poursuit la même source, alors qu'on confirme en privé un "pacte de non-agression" approuvé par celui qui a succédé à Marine Le Pen à la tête du parti et la nièce de la candidate malheureuse à l'Elysée.

Mme Maréchal jure "ne pas vouloir aller sur un terrain personnel", en reconnaissant qu'elle ne "pourrait jamais être candidate face à Marine Le Pen". Une manière d'acter les limites de ses ambitions?

Le 9 juin, son avenir politique pourrait brusquement s'assombrir si elle enregistrait un score inférieur à celui de son mentor à la présidentielle (7,07%) ou, pire, si elle ne dépassait pas la barre des 5% nécessaires pour envoyer des élus à Strasbourg.

Une performance ouvrirait a contrario d'autres horizons, à commencer par la succession d'Eric Zemmour. 

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