Européennes: Amine Kessaci, 20 ans, la voix écolo des quartiers nord de Marseille

Amine Kessaci a toujours su qu'il voulait faire de la politique, même avant la mort barbare de son frère dans un narchomicide. A 20 ans à peine, il espère porter la voix de la jeunesse et...

Amine Kessaci, candidat sur la liste de l'écologiste Marie Toussaint aux européennes, le 27 mai 2024 à Marseille © Nicolas TUCAT
Amine Kessaci, candidat sur la liste de l'écologiste Marie Toussaint aux européennes, le 27 mai 2024 à Marseille © Nicolas TUCAT

Amine Kessaci a toujours su qu'il voulait faire de la politique, même avant la mort barbare de son frère dans un narchomicide. A 20 ans à peine, il espère porter la voix de la jeunesse et des quartiers populaire à Bruxelles, pour les écologistes.

Estampillé "société civile", ce minot des quartiers nord de Marseille est 10e sur la liste de Marie Toussaint. Et si son élection est loin d'être acquise selon les sondages, sa candidature aura permis de revigorer la campagne des Verts.

"Il est très serein pour un jeune homme qui a été confronté à des situations très complexes dans sa vie, il attire les gens", s'enthousiasme Christine Juste, adjointe écologiste au maire de Marseille.

Comme à Aubagne (Bouches-du-Rhône), un samedi de mars, où il a effectivement rempli une (petite) salle, débarquant en bus avec des habitants de son quartier, la cité Frais Vallon: "La République s'est peut-être construite sans nous, sans les quartiers populaires, mais il est hors de question que l'Europe se construise sans nous", lance-t-il alors devant un public pas forcément acquis à la cause écologiste.

"Les gens des quartiers ont envie de manger bio", assure l'étudiant en droit, avec son visage poupon, son grand sourire et sa carrure imposante, "mais pour cela, il faut que ce soit accessible". Ils "ont envie de lâcher leur voiture, mais pour cela il faut des transports, et bon marché".

Les Ecologistes comptent conquérir l'électorat des quartiers déshérités avec cette idée qu'écologie et justice sociale sont liées. 

Et avec la jeunesse, comme Amine, plus jeune encore que la Danoise Kira Marie Peter-Hanser, plus jeune eurodéputée de l'histoire, 21 ans lors de son élection en 2019.

"J'ai plein de gens dans les quartiers qui me disent +on va voter Bardella+, c'est terrible. Et les gens qui me disent qu'ils vont voter LFI, parce que Rima Hassan et parce que la Palestine": mais "on a une guerre dans nos quartiers", on se doit aussi "d'avoir un discours social" sur ça.

Face à Macron

Il raconte comment sa cité, la seule de Marseille reliée au métro, lui a permis d'aller dans une école du centre où il y avait beaucoup de mixité. Et quand certains regardaient les dessins animés, lui préférait déjà Public Sénat. 

Ce goût de la chose publique est donc arrivé avant le triple assassinat barbare qui a notamment touché son grand frère, dont le corps a été retrouvé carbonisé dans un véhicule près de Marseille fin 2020. Brahim, le seul à être tombé dans la drogue sur une fratrie de six, insiste-t-il.

Alors il crée l'association Conscience, pour aider les familles, juridiquement et psychologiquement, et changer le regard sur ces morts qu'il considère comme des victimes. Quelques mois plus tard, en septembre 2021, il rencontre Emmanuel Macron, venu lancer son plan "Marseille en grand", destiné à rattraper les retards historiques de la deuxième ville de France. 

Face au président, sur un petit canapé d'un local associatif, il lance, du haut de ses 17 ans: "ça ne sert à rien de venir avec un plan qui vient de Paris", il faut le construire "avec nous": "tant qu’on ne combattra pas cette misère, on n’éradiquera pas ces trafics de drogue". 

Le quotidien régional La Provence titre alors: "Le gamin des cités qui a parlé à l'oreille de Macron".

Amine Kessaci avance ses solutions: police de proximité, coopération internationale, pour "aller chercher les têtes de réseaux à Dubaï, en Thaïlande", et légalisation du cannabis, comme l'Allemagne vient de le faire.

Mais ses ambitions suscitent des crispations. 

"C'est bien que notre jeunesse des quartiers s'intéresse à la politique, mais c'est important que la cause reste apolitique", s'inquiète un acteur associatif marseillais, anonymement. Même chez les Ecologistes, sa désignation a pu agacer. 

Et chez ses adversaires, certains essaient de lui savonner la planche en portant de sévères accusations, infondées selon des vérifications de l'AFP.

"On prend beaucoup de coups, je savais dans quoi je m'engageais. Quand ça ne va pas, j'appelle les mamans de Conscience, et je me souviens pourquoi je m'engage, et pour qui". 

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