Etals garnis et bourses un peu moins remplies, la complexe équation du réveillon

Des étals regorgeant de mets fins, mais des bourses un peu moins remplies: sur le populaire marché de la place des Fêtes à Paris, on prépare le réveillon...

 © Anna Desmarais
© Anna Desmarais

Des étals regorgeant de mets fins, mais des bourses un peu moins remplies: sur le populaire marché de la place des Fêtes à Paris, on prépare le réveillon de Noël comme d'habitude, ou presque.

Le stand de boucherie-traiteur de Florence Rocha, 60 ans, bonnet blanc vissé sur la tête, attire la foule. Il faut dire qu'on y trouve de quoi saliver: ballotines de veau aux queues de morilles, tourtes aux noix de Saint-Jacques, verrines aux couleurs variées, escargots persillés à 7,90 euros la douzaine...

"Pour les fêtes, on défend votre porte-monnaie. Par contre, on l'allège", harangue l'un des vendeurs. Ici, c'est simple, "on a augmenté nos prix de 10% depuis dix ans, pas plus", jure la patronne. Avec des promotions intéressantes - une cassolette offerte pour deux achetées -, "on fait moins de marge, mais on se rattrape sur la quantité, il y a toujours du monde chez nous".

Les clients sont attentifs aux prix, car l'inflation est passée par là. En moyenne cette année, la hausse des prix atteindrait 5,7%, avant de tomber à 2,5% en 2024, selon l'indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH). Forcément, cela joue sur le pouvoir d'achat des Français.

Laurent Bellanger, quinquagénaire, est commerçant sur ce marché depuis 1990, où il vend plaids et nappes aux couleurs de Noël. Il dit avoir vu la différence: "Il y a moins de clients, les gens vont au marché de Belleville qui est moins cher. Ce n'est plus du tout comme avant", juge-t-il.

- "Moins de commandes"-

Quelques mètres plus loin, des centaines de poissons et crustacés font de l'oeil - morne - au passant qui s'est aventuré dehors par ce temps morose. 

Le homard canadien a quitté non sans regret ses froides eaux atlantiques pour ce quartier embrumé de l'est parisien, où il se vend désormais quelque 50 euros le kilo. Une dame le regarde à peine: "Ils sont à combien les couteaux? Je peux les garder combien de jours au frais?", demande-t-elle, pas convaincue.

Pour l'heure, ce sont les huîtres qui volent la vedette, tandis qu'un acheteur passe commande pour des numéros 1 et des numéros 3. La poissonnerie s'approvisionne à Rungis, à la criée en Espagne ou à celle de Boulogne-sur-mer. La demande est toujours là, malgré l'inflation, affirme Mohamed Dahmani, l'un des responsables.

"Les gens achètent toujours, en revanche ils passent moins de commandes. Ils préfèrent venir sur place, avec une idée de combien ils vont dépenser, pour choisir les produits", raconte le jeune homme entre deux clients.

A quelques pas, une queue s'est formée autour d'un étal de gâteaux. On y rencontre Alice Jacquemin, 33 ans, habitante du quartier, et son ami, venus chercher une brioche pour Noël. Manque de chance, celle qu'ils convoitaient vient de leur passer sous le nez. "On s'est fait briocher", rient-ils. Le couple est aussi venu acheter des crustacés pour leur Noël en famille. Côté finances, ils disent ne pas trop regarder les prix: "On devrait le faire plus!"

Même chose pour Andrea Beyhaut, élégante habituée qui repart avec deux petites parts de bûche. "Je suis assez accro à ce marché", reconnaît-elle. Si elle dit avoir bien constaté les effets de l'inflation, "il reste des possibilités de trouver des bons prix ici".

Véronique des Rotours, une autre habituée, hésite encore. Huîtres, saumon ou chapon? Sa liste du réveillon n'est pas bien définie. Dans tous les cas, "c'est le meilleur marché de Paris, même des gens du 1er arrondissement (au centre huppé de la capitale, ndlr) viennent ici", dit-elle, avant d'aller acheter... du miel.

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