Entretien avec Frédéric Salles, PDG et fondateur de Scop3
«Entreprises, ne jetez plus votre mobilier !»
Entreprise à mission, Scop3 propose aux sociétés de vendre ou acheter du mobilier d’occasion, améliorant au passage leur bilan carbone. Un créneau porteur.
Quel service propose Scop3 et quel est son modèle économique ?
Le but ultime, c’est de jeter le moins possible. La plateforme de Scop3 permet à des entreprises souhaitant se débarrasser de leur mobilier de le donner à des associations - avec lesquelles nous sommes partenaires - ou de le vendre à d’autres sociétés qui en ont besoin. Au départ, nous avions opté pour un modèle économique à la Vinted, qui se rémunère à la transaction. Depuis, nous avons évolué. Nous continuons à prélever un pourcentage sur la vente du mobilier : pour un bureau vendu 150 euros, 60% de la somme revient au vendeur, 40% à Scop3.
En parallèle, nous avons développé une offre de prestation. Les entreprises peuvent nous confier la gestion du réemploi de leur mobilier et nous sommes également aménageur de seconde main. En 2022, en un semestre, nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 220 000 euros. Cette année, nous devrions atteindre le million d’euros. C’est légèrement plus que le prévisionnel qui prévoit d’atteindre le seuil de rentabilité en 2024.
Qui sont vos clients, et quel est pour eux l’intérêt de s’adresser à vous ?
De nombreuses grandes sociétés ont redimensionné leurs locaux après la crise du Covid, avec le développement du télétravail. Elles se sont donc trouvées confrontées à la nécessité de se débarrasser de leur mobilier et de s’en procurer du nouveau, adapté à cette nouvelle configuration, comme des bureaux de plus petite taille. Les bureaux de plus grande dimension dont elles se défont vont intéresser une imprimerie, qui a besoin de grandes surfaces... L’un de nos premiers clients, par exemple, a été le Crédit Agricole de Nîmes. Il lui fallait vider 18 000 m² de bureaux, et ne souhaitait pas jeter les meubles pour des raisons de RSE, Responsabilité Sociale d’Entreprise.
De ce point de vue aussi, la démarche est intéressante pour les entreprises : à chaque opération, nous produisons une attestation des émissions de CO2 évitées par le client, lequel peut ainsi le déduire de son bilan carbone. Pour l’instant, nous n’avons pas encore de clients du secteur public. Mais la loi AGEC [Anti-gaspillage pour une économie circulaire] qui leur impose d’acheter 20% de fournitures issues du réemploi va changer la donne.
Scop 3 est une toute jeune société qui est parvenue à se financer. Un parcours du combattant ?
A l’origine, Scop 3 est né du fait que j’ai été confronté à un problème auquel je ne trouvais pas de solution. J’étais dirigeant d’une start-up, à Montpellier, et, en raison du télétravail lié au Covid, nous divisions notre surface de bureaux par deux. Lorsque j’ai voulu me débarrasser du mobilier sans le jeter, je me suis heurté à un mur !
Avec Sophie Scantamburlo-Contreras, mon associée, nous avons lancé Scop3, sous forme d’entreprise à mission à l’été 2021. Dès le mois de mars 2022, nous avons réalisé une première levée de fonds et obtenu 1,8 million d’euros auprès de différents acteurs dont Irdi Soridec, un fonds régional, Bpifrance et le groupe Nicollin, un important acteur de la gestion des déchets... Ce n’était pas évident, puisqu’à l’époque notre chiffre d’affaires était de zéro euro. Toutefois, nous arrivions à un moment favorable : les projets à impact viables comme le nôtre étaient très demandés et encore rares. Par ailleurs, j’étais bien intégré dans l’écosystème local. A l’époque, j’étais président de French Tech Méditerranée et j’avais déjà l’expérience des start-up avec la fondation de Matooma dans les télécoms.