Entreprendre sans être seul et construire autrement

Lancée en 2013, cette coopérative réunit 37 professionnels. Elle offre à la fois couveuse et portage salarial. A ses clients, elle propose de rénover, d’agrandir, de construire «en sortant des chantiers battus».

Lors du Bio-Forum, les visiteurs étaient invités à mettre la main à la pâte sur un chantier éphémère associant ossature bois et ballots de paille bien tassés.
Lors du Bio-Forum, les visiteurs étaient invités à mettre la main à la pâte sur un chantier éphémère associant ossature bois et ballots de paille bien tassés.
D.R.
Le stand de la coopérative Toerana habitat au Bio-forum de Cambrai. A droite, Benoît Boulnois, le gérant.

 

La dernière apparition «publique» de Toerana habitat, c’était au Bio-forum de Cambrai, les 12 et 13 mars, où elle tenait un stand. Durant tout le week-end, cette coopérative basée à Lille a proposé informations, sensibilisation et démonstrations, notamment sur la façon de construire un mur associant une ossature en bois et une isolation en bottes de paille, qu’on le termine avec des plaques de plâtre ou un enduit à la terre.

La nature du Salon donnait l’occasion de mettre en avant les vertus de la paille. Comme l’expliquait Vincent Lalande, «la paille, c’est massif, ça donne de l’inertie. Elle stocke l’humidité et la rejette, selon la saison, tout en isolant, y compris sur le plan acoustique. Ce n’est pas cher, mais il y a un temps de mise en œuvre». D’où, souligne-t-il, l’invitation lancée aux visiteurs à mettre la main à la pâte dans ce chantier éphémère.

 

Un manque à combler. Benoît Boulnois est le gérant salarié de la coopérative depuis 2013, à la tête d’une petite équipe. Son parcours professionnel l’a notamment amené à participer à la création de l’association A petits pas, dans le Pas-de-Calais, qui accompagne les créateurs d’entreprise en milieu rural, en leur proposant notamment le régime de la couveuse.

«A la base, dit-il, je suis agent de développement local. C’est la rénovation du site d’A petits pas qui a amené à se poser des questions sur la façon de soutenir des créateurs dans le domaine de la construction.»

Une couveuse classique, précise-t-il, propose un hébergement juridique et social, prête son SIRET, mais ne peut pas héberger ce type de créateurs, notamment parce qu’elle ne peut pas assurer la garantie décennale.

 

Un modèle à Grenoble. «On a réfléchi et pris des contacts avec la Région, poursuit-il. On a aussi observé des expériences, ailleurs. C’est la coopérative Cabestan, à Grenoble, créée en 2003, qui nous a inspiré. Sous statut SCOP, elle propose aux professionnels du bâtiment une alternative à la création d’entreprise.»

C’est ainsi, à la fois pour soutenir la création et des pratiques différentes du métier, qu’est née Toerana habitat, dont le siège est à Lille mais qui rayonne sur la région du Nord, du Pas-de-Calais et de Picardie. Aujourd’hui, elle compte 37 professionnels : 8 qui sont salariés et 29 qui sont en couveuse, sous contrat d’appui au projet d’entreprise (CAPE).

 

Portage salarial. Autre originalité de cette coopérative : une fois le passage en couveuse arrivé à son terme (trois ans maximum), l’entrepreneur couvé a le choix entre créer sa propre entreprise ou opter pour un portage salarial. C’est la formule de la coopérative d’activités et d’emploi (CAE).

Benoît  Boulnois explique : «La coopérative présente plusieurs avantages. Elle reconnaît l’autonomie du professionnel mais le libère de tâches incombant à un chef d’entreprise. Elle s’occupe du service comptable, dispose de la garantie décennale, des certifications RGE, apporte un pilotage à la gestion, accompagne la formation et la prévention des risques liées aux métiers du bâtiment.» A cette mutualisation, s’ajoute la capacité à proposer une offre globale, une coordination des travaux sur un même chantier.

Tous les métiers (de l’ingénierie à la mise en œuvre) sont représentés et ceux qui ont accepté de devenir des associés s’engagent à partager une «intelligence collective», des valeurs communes et une éthique vis-à-vis de leurs clients. 

 

Quels chantiers ? Benoît Boulnois précise que si Toerana habitat affectionne, bien sûr, les matériaux sains et écologiques, la démarche «d’auto-réhabilitation accompagnée», voire l’autoconstruction sortant des «chantiers battus», elle peut aussi proposer des prestations plus classiques. Tout dépend des goûts et du budget des clients. Et aussi de son envie de mettre la main à la pâte. «A ce jour, indique-t-il, 95% des clients sont des particuliers en rénovation ou en extension.» Dans ses projets, la coopérative vise aussi − et s’y prépare − le conseil et les interventions sur des opérations publiques.

Plus d’infos sur www.toerana-habitat.fr