Création d'entreprises : entre mutation et adaptation de l’écosystème

La création d’entreprises, un secteur mouvant ! Dans sa dernière livraison de sa note conjoncturelle pour la région, l’Insee Grand Est stipule que la création d’entreprise affiche une hausse de + 4,1 % toujours portée par les micro-entrepreneurs. Sur douze mois, elle chute de 1,3 %. Derrière ces chiffres se cache surtout une mutation profonde de la typologie des porteurs de projets aux aspirations nouvelles. Une donne que les professionnels et les réseaux d’accompagnement se doivent de prendre en compte.

16 000 entreprises créées dans la région au 2e trimestre 2022, soit une hausse de + 4,1 % par rapport au trimestre précédent (qui avait lui enregistré une baisse de 4,8 % mais toujours avec un niveau supérieur d’avant crise sanitaire, + 15,7 % par rapport au 4e trimestre 2019). Constat statistique et chiffré réalisé par l’Insee Grand Est dans sa dernière note conjoncturelle trimestrielle parue mi-octobre. «Cette évolution est portée par les micro-entrepreneurs, dont le nombre d’immatriculations progresse de 7,8 % ce trimestre, tandis que les créations d’entreprises hors micro-entrepreneuriat sont en légère baisse (- 1,5 %). À l’inverse, au niveau national, les créations d’entreprises diminuent de 2,6 % bien qu’elles augmentent de 2,2 % hors micro-entrepreneurs», peut-on lire dans cette note conjoncturelle. Côté activités : «les créations d’entreprises sont en hausse dans le commerce, le transport, l’hébergement-restauration (+ 6,9 %), les services (+ 6 %) et sont quasi stables dans l’industrie (- 0,2 %). A contrario, dans la construction, le nombre de créations diminuent fortement (- 9,6 %), la baisse étant plus marquée pour les formes d’entreprises ne relevant pas du micro-entrepreneuriat (- 12,5 %).» Sur un an, la donne est tout autre ! «Le cumul régional des créations brutes sur douze mois (juillet 2021 à juin 2022) diminue de 1,3 % par rapport au cumul mesuré sur avril 2021-mars 2022. Dans ce contexte, les immatriculations augmentent dans seulement trois départements : les Ardennes, le Bas-Rhin et les Vosges. Les créations sont en repli dans le reste de la région notamment dans les départements de l’Aube, de la Meurthe-et-Moselle et du Haut-Rhin (respectivement - 3,2 %, - 2,7 % et - 2,6%). » Bilan des courses, l’esprit d’entreprendre apparaît demeurer farouchement présent dans la région.

Mutation enclenchée

L’écrasante majorité de micro-entrepreneurs révèle surtout une tendance bien présente de ce que certains chercheurs dans le domaine qualifient d’entrepreneuriat de contrainte. «La tendance devrait continuer à s’intensifier ! Pendant la crise sanitaire et après les différents confinements, nous avons vu exploser le nombre de micro-entrepreneurs qui était déjà en hausse importante avant la pandémie. La situation actuelle avec une incertitude économique grandissante ne devrait que renforcer la position des micro-entrepreneurs dans la part des création d’entreprises», explique un chercheur de l’Université de Lorraine. La récession quasi certaine devrait donc de nouveau renforcer le passage vers cet entrepreneuriat de contrainte. Une donne à ne surtout pas négliger même si elle apparaît encore peut palpable mais dont les effets ne sauraient tarder à se produire. Cette mutation certaine est enclenchée depuis plusieurs années et principalement dans la région. Dans une enquête de septembre dernier, l’Insee assurait que quatre entrepreneurs sur dix étaient salariés avant la création de leur entreprise. Un quart d’entre eux sont motivés par un désir d’indépendance mais 17 % sont d’anciens travailleurs précaires et 13 % des créateurs éloignés de l’emploi. L’entreprenariat dit de contrainte n’est pas une nouveauté mais au fil du temps, il apparaît être plus qu’un simple effet à l’instant T. Si le fait d’avoir un grand nombre de micro-entrepreneurs est souvent mis en avant comme un signe positif de l’esprit d’entreprendre, il est aussi révélateur d’un état de fragilité certaine aussi bien économique que social. «Les gens créent leur propre structure pour créer leur propre emploi et leur propre activité. Cette typologie est de plus en plus nombreuses», assure un réseau d’accompagnement de personnes éloignées de l’emploi. Les effets des différentes crises à répétition (peut-on aujourd’hui encore réellement parler de crise ? Certains prônent plutôt pour une mutation générale sociétale et économique) sont multiples et résonnent avec les aspirations sociétales du moment. Cette fameuse quête de sens, qui pouvait faire sourire certains lors des multiples sorties de confinement, apparaît être aujourd’hui un fil rouge général pour une grande majorité de porteurs de projets. «Nous sommes entrés dans une modification socio-économique. L’entrepreneuriat n’échappe pas à cette quête de sens et aujourd’hui la grande majorité des structures d’accompagnement apparaissent un peu perdues face à l’arrivée de porteurs de projets qui cassent tout simplement les codes de la création d’entreprise», assure un observateur du secteur.


Collectif Cap Créa

Une adaptation nécessaire pour tenter de comprendre les nouvelles aspirations des porteurs de projets. «Nos méthodes d’accompagnement ont évolué, c’est une évidence mais il nous faut aujourd’hui capter ses porteurs de projets», constate le délégué général d’une structure d’accompagnement. Capter les porteurs de projets, l’un des chevaux de bataille de l’ensemble de la chaîne d’accompagnement régionale. Les différents salons GO de la création et reprise d’entreprise annoncés dans plusieurs départements de la région en ce mois de novembre remplissent cette mission de faire connaître les différentes aides et solutions d’accompagnement présentes. D’après certains chiffres, dont notamment ceux de Bpifrance, moins de 20 % des créateurs d’entreprises en France ont bénéficier de l’aide d’un réseau spécialisé d’accompagnement. L’ensemble de ces réseaux d’accompagnement assurent doubler leur effort d’ici cinq ans pour faire face à cette affluence certaine de porteurs de projets. En octobre dernier, une trentaine d’entre eux (100 000 entrepreneurs, 60 000 rebonds, Action’elles, Adie, AJE, BGE, My Creo Academy, Enactus, Entreprendre pour Apprendre , Entrepreneurs dans la Ville - Femmes des Territoires - Fondation Entreprendre - Force Femmes, France Active, France Angels, Initiative France, Union des Couveuses, Groupement de Créateurs, Les Déterminés, Les Entrep’, Les Premières, Moovjee & Réseau Mentorat France, Pépite France, Positive Planet, Réseau Entreprendre, Second Souffle) ont signé avec Bpifrance un manifeste commun. Le collectif Cap Créa est né ! Cinq objectifs majeurs sont mis en avant : favoriser l’esprit et l’envie d’entreprendre, mieux informer les futurs entrepreneurs sur les offres d’accompagnement et de financement, les accompagner et les orienter avec un parcours personnalisé et des solutions adaptées dans tous les territoires, doubler le nombre de créatrices et créateurs d’entreprises afin de générer un million d’emplois pérennes supplémentaires et faire avancer l’économie de demain en intégrant l’impact social et environnemental de chaque projet. Reste à le décliner en région, c’est en marche, histoire d’inventer l’entreprise et le monde de demain. Joli programme…

Salons en novembre

Novembre c’est création et reprise d’entreprise ! Les différentes chambres consulaires proposent des salons ciblés. Les Vosges ouvrent le bal au centre des congrès d’Épinal le 9 novembre avec le salon de la création et reprise d’entreprises. Un speed dating cédants-repreneurs est programmé. À Nancy, la CCI Grand Nancy Métropole 54 organise le 17 novembre au Palais du Gouvernement Go 2022 : le salon de la création-reprise et de la jeune entreprise. À Metz, c’est dans les locaux de la CMA que se tiendra le 25 novembre le Salon Go avec une conférence sur l’entrepreneuriat en franchise. Toute la semaine du 21 au 25 novembre des webconférences seront proposées.