En Lozère, incompréhension et colère face à des fermetures de classes envisagées

A Langogne et Marvejols, petites villes de la rurale et montagneuse Lozère, des parents d'élèves, élus et enseignants oscillent entre incompréhension et colère face à la fermeture envisagée de classes, quand le gouvernement...

Manifestation contre la fermeture de classes à Marvejols, le 27 février 2024 en Lozère © Sylvain THOMAS
Manifestation contre la fermeture de classes à Marvejols, le 27 février 2024 en Lozère © Sylvain THOMAS

A Langogne et Marvejols, petites villes de la rurale et montagneuse Lozère, des parents d'élèves, élus et enseignants oscillent entre incompréhension et colère face à la fermeture envisagée de classes, quand le gouvernement fait de l'école "la mère des batailles".

"Non à la fermeture d'une classe. Tous concernés!", proclame une affiche sur la grille de l'école primaire de Langogne, commune de 2.875 habitants aux confins du département, qui devrait perdre 20 élèves à la rentrée prochaine (sur les 137 actuels).

En ce soir de semaine, quelques jours avant un Conseil départemental de l'Education nationale prévu vendredi qui décidera de la carte scolaire 2024-2025, des parents d'élèves sont assemblés autour du maire Marc Oziol.

"On ne peut pas uniquement regarder les choses à travers le prisme du chiffre", plaide-t-il, soulignant que l'école accueille nombre d'élèves ayant des besoins éducatifs particuliers: enfants en situation de handicap ou allophones (nouvellement arrivés et de langue maternelle étrangère), la Lozère hébergeant des familles demandant l'asile.

"Il y a une grande mixité dans cette école, c'est génial pour l'ouverture d'esprit. Ici, les enfants ont un suivi adapté qu'on veut maintenir en gardant tous les postes d'enseignants", défend Sandy Leydier, une mère d'élève. "On a un sentiment d'injustice car le gouvernement dit qu'il ne touchera pas aux territoires ruraux mais on veut nous supprimer une classe", poursuit-elle.

Pour le maire, maintenir les postes sur l'école est crucial pour l'attractivité de son territoire, longtemps vidé par l'exode rural. 

La Lozère a perdu la moitié de ses habitants en un siècle, entre 1890 et 1990, mais "maintient désormais sa population, les arrivées dépassant de plus en plus les départs", souligne l'Insee, et c'est le cas à Langogne.

"L'Education nationale est la seule institution qui ne joue pas le jeu", tempête l'édile. Cette année, la Lozère doit "rendre" trois postes d'enseignants pour renforcer les effectifs dans des zones plus peuplées comme Montpellier.

"Depuis des années, nous privilégions le soutien aux territoires ruraux. La Lozère a perdu beaucoup d'élèves ces dernières années, mais nous n'avons pas repris autant d'emplois", répond la rectrice Sophie Béjean.

Encadrement "satisfaisant

Tout en "comprenant les préoccupations", le directeur académique des services de l'Education nationale (Dasen) de Lozère, Alexandre Falco, insiste: "Ce n'est pas parce qu'il y a trois enseignants en moins que les conditions vont se dégrader, compte tenu qu'il y a une perte de population (d'élèves) chaque année". 

Le taux d'encadrement est "satisfaisant" en Lozère, avec "14,3 élèves par enseignant, contre 22 pour la moyenne nationale", et le restera après les fermetures, assure-t-il.

Au total, la fermeture de six classes est envisagée en 2024-2025. Sur ces six postes d'enseignants, un serait compensé par l'ouverture d'une classe dans une autre commune lozérienne, un deuxième par une nouvelle unité dédiée aux allophones (UPE2A), et un autre par deux demi-postes de référent harcèlement et de chargé de mission territoires ruraux.

"C'est quand même une perte nette de trois postes sur nos 81 écoles, des enseignants vont subir des mutations, peut-être loin de chez eux", regrette Florence Lazès, du syndicat FSU-SNUipp48, évoquant 20 classes fermées depuis 2020.

Sur le taux d'encadrement, elle souligne qu'il est "forcément" plus élevé en Lozère, département où les routes de montagne font que les distances se comptent en temps et non en kilomètres, d'où un réseau d'écoles disséminées, avec des classes plus petites mais souvent multi-niveaux.

"On nous dit que l'enseignement doit être au coeur des priorités et on nous ferme un poste dans une école où l'effectif va rester stable l'année prochaine à 230 élèves", s'étonne de son côté la maire de Marvejols, Patricia Brémond, venue manifester sous la pluie mardi avec une cinquantaine de parents et enfants. 

Au son d'une casserolade, ils ont défilé dans cette ville médiévale de 4.700 habitants, scandant: "Ne fermez pas notre classe, une seule solution, la manifestation".

"Une maîtresse ne peut pas donner la même attention à plus d'élèves", estime Angélique Barro, mère d'un enfant confronté à un handicap. "On a un sentiment de colère et d'abandon", ajoute-t-elle, dans un département où le manque de spécialistes conduit à de longs temps d'attente pour un simple bilan d'orthophonie par exemple.

"On comprend qu'il y ait besoin de plus d'enseignants à Montpellier", souligne une autre mère d'élève, Solène Brassac: "Mais pourquoi l'Education nationale ne crée pas des postes en plus là-bas sans en prendre chez nous?".

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