Douceur de lait à Éplessier : une production 100% locale
Dans la ferme familiale d’Éplessier, la famille Avet transforme une partie de son lait en fromages et autres yaourts. La première mimolette picarde vient de voir le jour dans ce village de la Somme.
De la musique, des rires qui fusent… pas de doute, au sein de l’EARL du Pont Neuf de la famille Avet, c’est la bonne humeur qui prime. Ici, depuis cinq générations, on produit du lait. Il y a quatre ans, afin de permettre à leur fils Tristan, alors bachelier, de venir travailler sur l’exploitation, Claire et Yannick Avet ont sauté le pas de la valorisation de leur production de lait : à cette occasion, ils ont fait construire un bâtiment dédié de 180 m² qui abrite notamment un magasin, une salle de transformation, deux chambres froides et deux caves.
Douceur de lait
« Vivre à trois sur 60 hectares, cela aurait été impossible, confie Tristan Avet, 22 ans, sous le regard protecteur de ses parents. De la viande, beaucoup en font déjà. On avait déjà testé la fabrication de fromages, de beurre et de yaourts à la maison. Nous avons suivi des formations près de Lille dans des fermes qui faisaient déjà de la transformation ». Aujourd’hui, près d’un tiers des 600 000 litres récoltés chaque année sont dédiés à cette activité sous la marque Douceur de lait, la majorité alimentant la laiterie Sodiaal à Airaines.
L’EARL du Pont Neuf, qui emploie trois salariés à plein temps, un à mi-temps et un apprenti, est réputée pour son gage de qualité… les différents fromages sont très appréciés. En voici des exemples : le Pavet (pâte molle à croute lavée, comme le maroilles), la tomme (ail des ours, piment, poivron, cumin, safran…), le Pont Neuf de quatre kilos (affiné trois mois), le triple crème (fromage blanc très égoutté, affiné une à deux semaine) et la petite dernière… la mimolette, sortie fin juin, dont le succès dépasse l’équipe de Douceur de Lait. « J’ai appris à en faire en formation dans le Nord car c’est une spécialité répandue, explique Tristan Avet. Je ne connais pas d’autre fabricant en Picardie. Il y a trois stades : la jeune (trois mois d’affinage), la demi-vieille (six mois d”affinage) et la vieille (un an d’affinage). Ce n’est pas le même fromage. À trois mois, il est tendre. Plus on avance, plus la mimolette est friable et dure. En même temps, le goût est plus fort, des cristaux de sel commencent à se former. C’est un fromage qui plaît à beaucoup de monde, dont les enfants. »
25 parfums de yaourts
Chaque semaine, 120 kilos de beurre (doux et demi-sel) sont commercialisés. À cela, s’ajoutent 25 parfums différents de yaourts, une dizaine de desserts lactés, de la crème fraîche, du fromage blanc… Pour cet hiver, l’équipe projette de se lancer dans la production de glaces : « Nous avons été formés et ma mère en fait déjà à la maison, raconte Tristan Avet. Les clients sont en attente de ce produit. Cela demande des investissements mais nous pensons que ce sera un bon complément. Nous voulons faire un produit de qualité. Notre équipe est motivée d’autant que nos autres productions fonctionnent bien. Nous voulons proposer des nouveautés pour changer les habitudes des clients. »
« Durant cette période, nous avons fait trois à quatre fois plus de ventes »
Dans les pâtures juste derrière leur ferme, une centaine de vaches de race Prim’Holstein broutent tranquillement. À côté, un troupeau de trente Jersiaises, une race anglo-normande, attend son heure. Ces vaches ont été inséminées et, en mars, elles remplaceront une partie des Prim’Holstein. Venues du Danemark en février, elles sont très proches de l’homme et s’approchent sans complexe : « D’ici quatre ans, il n’y aura plus qu’elles sur l’exploitation, informe Tristan Avet. Elles donnent moins de lait mais il est plus riche en protéines et en matières grasses. C’est parfait pour nos fromages. Rustiques, elles resteront au maximum dehors, soit du 15 mars au 1er novembre. Ensuite, elles mangeront du foin, de l’ensilage, du maïs, des petits pois… Elles mangent un tiers de moins que les Prim’Holstein. Le lait va nous être acheté plus cher par la laiterie. En général, la traite débute vers 5 heures. Une heure après, en semaine, la production de yaourts et de fromages commence. »
Point de vente
Très vite, après le début de l’activité fin 2016, le magasin, ouvert le mercredi et le vendredi, a connu un beau succès chez les particuliers et les professionnels, comme des restaurateurs par exemple. La famille Avet travaillait alors de 5 heures à 22 heures. La belle aventure se poursuit donc. Tristan Avet est présent sur trois marchés : Corbie, Flesselles, Hangest-sur-Somme. Un quatrième, à Molliens-Dreuil, est assuré le samedi matin par un salarié : « Je transforme, donc c’est bien d’être au contact des gens, assure t-il. Ils nous posent beaucoup de questions. Nous faisons attention à leurs remarques. Ils n’hésitent pas à dire ce qu’ils pensent. Cela nous permet de nous améliorer même si 99% des clients sont satisfaits. »
« Nous voulons proposer des nouveautés pour changer les habitudes des clients »
Autres débouchés dans la Somme pour Douceur de lait : les collectivités (Ephad, collèges, lycées…), la vente sur Internet grâce à La Ruche qui dit oui, les restaurateurs (Auberge de la forge à Caulières, le restaurant du Coq Gaulois à Morvillers-Saint-Saturnin, le restaurant du Canard à Hangest-sur-Somme), les revendeurs comme le magasin Locavrac à Abbeville ou encore les maraîchers et les bouchers.
Durant le confinement, l’activité a explosé pour passer à 10 000 yaourts fabriqués par semaine. La production a diminué de moitié mais l’intérêt des consommateurs ne faiblit pas : « Durant cette période, nous avons fait trois à quatre fois plus de ventes. Même si ça a baissé, nous avons gardé 15% des clients que nous avons séduits durant cette période. »