Dominique Dupiletpeste contre l’Etat
Traditionnel débat d’orientation budgétaire au conseil général du Pas-de-Calais. Dominique Dupilet, son président, a tenu la plénière du 9 janvier, inquiet mais volontaire pour un budget difficile à boucler en des temps de baisses de recettes et de raréfaction du crédit public.
Avec son milliard et demi de budget, on peut penser que le Conseil général est riche. Mais ses charges toujours plus nombreuses le poussent à économiser sur son fonctionnement (1,315 milliard) tout en cherchant à sauvegarder ses investissements (près de 240 millions d’euros). C’est ces points financiers que l’opposition et la majorité socialiste et communiste ont débattu en ce début d’année. Il y eut pourtant un moment d’unanimité assez rare pour être soulignée : le vote de la motion sur la sauvegarde de l’abeille. Mais restait le plus dur : le débat d’orientation budgétaire. Le président du Conseil général, Dominique Dupilet, s’est d’abord rappelé au bon souvenir de l’Etat en dressant le contexte général du budget pris lors de la mise en application de la réforme territoriale. “Les derniers transferts de compétences et leur encadrement toujours plus strict avaient déjà considérablement renforcé le rôle d’opérateurs de l’Etat des collectivités territoriales. La compensation financière insuffisante aboutit à consacrer une part croissante du budget à l’exercice de missions dont l’objectif comme les modalités échappent à une définition locale. Pour le Conseil général, ces dépenses nouvelles ont constitué une charge nette cumulée depuis 2004 de plus d’un milliard d’euros.” Et d’ajouter plus loin : “Nous avons en réalité financé sur nos fonds propres des politiques décidées au niveau national, tout en parvenant à maintenir notre effort d’investissement.” La collectivité se trouve prise dans un étau où, selon le mot de son président, elle risque de se retrouver dans le rôle d’un “organe déconcentré de l’Etat, mouvement mâtiné de recentralisation déguisée”.
“Contracyclique”. Dilemme pour ses représentants : se recentrer sur leurs compétences obligatoires et ne plus (ou moins) intervenir sur des domaines “facultatifs”. Le Pas-de-Calais s’y refuse : “Ce ne serait qu’abdiquer. Accepter que le gouvernement de l’Etat, jugé en faillite par son premier représentant, entraîne dans sa chute les collectivités. Contexte inédit où l’on demande plus aux collectivités et où on les prive des moyens de le faire en leur reprochant de ne pas se centrer sur leurs missions prioritaires. Situation kafkaïenne où l’on nous fait remarquer la nécessité de répondre à de réels besoins sociaux et où l’on nous dit concomitamment : ‘cessez de vous disperser en gaspillage’ !” Le Pas-de-Calais continuera d’investir : “Il faut assumer d’être contracyclique, maintenir les investissements là où ils se trouvent.” Côté fonctionnement, les dépenses se veulent contenues. L’action sociale représentera toujours la majeure partie du budget avec 912 millions d’euros, les services généraux (101,66 millions) et l’enseignement (71,68 millions). Puis viennent les transports (55,98 millions), la sécurité (54,91 millions) qui passe devant les réseaux et les infrastructures (54,82 millions). A la suite la prévention médicosociale (27,27 millions), la culture, la jeunesse, les sports et les loisirs (18,59 millions), le développement économique (6,46 millions), et l’aménagement et l’environnement (6,35 millions). La collectivité n’a pas donné d’autres chiffres et il faudra attendre mars ou avril pour avoir les projections d’investissement 2012. Côté ressources, la situation ressemble à celle de 2011 : volatile et faiblement dynamique.
Des recettes qui n’évolueront plus qu’à la marge. Selon la dernière (et définitive) notification des différentes composantes qui compensent la perte de la taxe professionnelle, de la taxe d’habitation et de la taxe foncière sur le non-bâti, les recettes 2012 atteindront 511,70 millions d’euros, 103 millions venant de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), 108 millions issus de la taxe spéciale sur les conventions d’assurances (TSCA), 196 millions provenant de la taxe foncière sur le bâti (TFPB), 54 millions en dotation de compensation de la réforme sur la taxe professionnelle (DCRTP), 41 millions qui arrivent du Fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR), 5,8 millions en droits de mutation à titre onéreux (DMTO), 1,7 million d’allocations compensatrices et 1,5 million d’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer). La DCRTP et le FNGIR avaient vocation de rendre financièrement neutre la réforme fiscale. Soit 95,58 millions d’euros par an. Pour Dominique Dupilet, le compte n’y est toujours pas. Le gel de la dotation globale de fonctionnement (DGF) n’y est pas pour rien.