Domaine public et domaine privé : un sujetpréoccupant pour les collectivités locales

L’association des Directeurs généraux et cadres supérieurs territoriaux des arrondissements d’Avesnes-sur-Helpe, Cambrai, Douai et Valenciennes, présidée par Jacques Thibaux, a organisé dernièrement son assemblée générale d’automne. S’en est suivie une conférencedébat, animée par Me Paul-Guillaume Balay, avocat au barreau de Lille. Le thème portait sur les distinctions – lourdes de conséquences pour les collectivités – à faire entre le domaine public et le domaine privé1. Un sujet préoccupant, au quotidien, pour les collectivités locales.

En préambule, Jacques Thibaux a déploré le manque d’engagement de certains directeurs généraux et cadres supérieurs territoriaux dans l’association et le président et directeur général de s’interroger : “Sommes-nous devenus des ‘super’ chargés de mission ? Notre statut nous empêche-t-il de prendre du temps pour participer activement aux ateliers de travail, entre autres rendezvous, de l’association ?” Il a remercié ensuite la quarantaine de DGS et cadres supérieurs qui avaient fait le déplacement à l’hôtel de ville d’Anzin. Ils ont pu assister et participer à la conférence de Me Paul- Guillaume Balay. Comment distinguer le domaine public du domaine privé, quelles sont les conséquences concrètes de cette distinction, comment classer ou déclasser un bien sans illégalité, comment vendre légalement un bien communal, à quel prix vendre ou acheter un bien, ou encore comment exploiter le domaine privé ou public (baux, autorisation) : tels ont été les thèmes développés par le spécialiste du droit public et du droit de l’urbanisme.

Désaffecter puis déclasser. De nombreuses questions ont été posées à Me Balay et ont trouvé réponse. Ainsi, un directeur général se demandait comment agir pour sortir un bien du domaine public – la commune possède une ancienne école : comment la désaffecter puis la déclasser pour pouvoir la vendre ? La réponse de l’avocat est claire : “Il faut déclasser le bien immobilier affecté au domaine public. Même si l’école est inoccupée depuis des décennies, elle ne tombe pas automatiquement dans le domaine privé, et cela c’est un piège à éviter, et ce, même si le public n’y est plus accueilli depuis longtemps. Il faut tout d’abord désaffecter le bien, dès lors qu’il est affecté au domaine public, puis déclarer lors d’un conseil municipal le déclassement. Il faut toujours procéder en deux temps”, insista Me Balay. Ce dernier a pu donner des informations très pratiques concernant les permis de stationnement (exemple des pots de fleurs sur le trottoir devant le fleuriste) et les permis de voirie (terrasse de café en dur). “Attention, a-t-il prévenu, si vous refusez le permis de voirie à un patron de café et que vous avez donné un permis à un autre, vous devrez dans ce cas motiver votre refus. Enfin, sachez qu’il n’existe pas de baux commerciaux dans le domaine public. S’ils existent, ils sont nuls et inopposables.

Un “bien sans maître”. Autre question sensible : comment acquérir un “bien sans maître” ? L’avocat a fait la distinction entre “immeuble en péril” et “bien sans maître”. “Sachez qu’un bien sans maître est un bien sans propriétaire connu et pour lequel aucune contribution financière n’a été perçue depuis trois ans. Si, passé un délai de six mois, le propriétaire ne s’est pas fait connaître, l’immeuble est présumé sans maître et peut être acquis. L’incorporation du bien présumé sans maître dans le domaine communal est décidée par une délibération du conseil municipal et constatée par arrêté du maire. Dans ce cas, conformément aux termes d’une circulaire du 8 mars 2006, il suffit, pour procéder au transfert de propriété, que l’assemblée délibérante communale prenne une délibération autorisant l’acquisition par le maire d’un bien sans maître revenant de plein droit à la commune. Vous n’êtes pas tenus, lors d’une vente, de vendre au plus offrant. En premier lieu, il faut suivre l’avis des Domaines. L’un des effets méconnus de la loi de décentralisation réside dans cette possibilité désormais offerte aux communes de pouvoir prendre possession de biens qualifiés de sans maître.
Cette possibilité permettra de résoudre dans certains endroits la problématique de biens à l’abandon, sans dépendre du fonctionnement parfois lourd de l’administration nationale. On assiste aujourd’hui à de véritables tentatives de conciliation entre, d’une part, la volonté de protéger traditionnellement le domaine public et, d’autre part, la volonté de valoriser économiquement ce dernier d’où l’intérêt de maîtriser la gestion du domaine public.