Des besoins de recrutements comme il y en a jamais eu

Pôle emploi vient de délivrer son bilan 2019 et ses perspectives 2020 par département. Cette année, c'est à l'agence de Douai que la direction territoriale a énoncé ses projets dans le Nord, parmi lesquels l'accompagnement renforcé des demandeurs d'emploi longue durée ou en situation de handicap.

Les effectifs de Pôle emploi Nord sont à 70% féminin.
Les effectifs de Pôle emploi Nord sont à 70% féminin.

S’il n’y avait qu’un chiffre à retenir, ce serait celui-là : «Le département est champion national en termes de baisse du nombre de demandeurs d’emploi, soit une diminution de 5,2% en un an», annonce d’emblée, fièrement, Caroline Riffard, directrice territoriale Nord de Pôle emploi Hauts-de-France.

Près d’un chômeur sur deux retrouve de l’emploi après six mois d’inscription

En 2019, le nombre de retours à l’emploi de plus d’un mois s’est chiffré à 166 743, soit une augmentation de 15,1% par rapport à 2015. «Depuis 2018, nous vivons un tournant. La dynamique du tissu économique commence à ressembler à celle d’avant 2008. La situation est telle qu’il y a des besoins de recrutement comme il y en a jamais eu !», affirme Caroline Riffard. Si bien que 46% des demandeurs d’emploi accèdent à l’emploi dans les six mois suivant leur inscription.

L’ambition aujourd’hui, et ce, jusqu’en 2022, est d’aller plus loin dans les statistiques, notamment en s’occupant des personnes fragiles qui n’ont pas trouvé de travail après plus de douze, voire vingt-quatre mois d’inscription. «Ce sont des personnes qui ont perdu de l’estime de soi. Avec eux, il a certes un travail à faire sur le plan professionnel, mais aussi sur le plan social», explique la directrice territoriale.

Plusieurs dispositifs vont d’ailleurs être mis en place pour renforcer cet accompagnement des profils fragiles. La journée «Réussir sans attendre», qui existait déjà l’année dernière, va cette fois s’étendre sur une semaine entière, en avril prochain. Le principe : mêler acteurs sociaux, formateurs et recruteurs au même endroit. «On s’est aperçu que les demandeurs d’emploi étaient motivés pour beaucoup d’offres, mais n’avaient pas la formation pour, ou pas les moyens pour faire garder leurs enfants par exemple. Ici, on trouve toutes les solutions au même endroit et au même moment», continue Caroline Riffard.

77,4% de satisfaction chez les employeurs

Pour mieux cibler ce type de profils et leurs besoins, les entretiens d’accueil du demandeur d’emploi ne vont plus se faire en une heure mais en deux demi-journées. «C’est plus long, mais le résultat est plus rapide au final», assure Sophie Palisse, directrice de l’agence Pôle emploi de Douai. Le dispositif est déjà en test à Creil et Carvin. Il sera généralisé d’ici la fin d’année.

Si jusqu’alors les demandeurs d’emploi se disaient satisfaits à 71,3% concernant le suivi dont ils ont bénéficié en 2019, les équipes de Pôle emploi espèrent encore faire grimper la tendance.

«Beaucoup d’entreprises ont un système de recrutement vieillissant. Nous les aidons à revoir leur process en laissant la place aux soft skills et aux compétences transférables»

Autre statistique importante : les employeurs s’avouent satisfaits à 77,4%, du traitement de leur dernière opération de recrutement. Car Pôle emploi ne cherche par seulement à rendre service aux demandeurs d’emploi, mais aussi aux entreprises qui recrutent.

L’ accompagnement du recruteur s’effectue dès la publication des annonces. «On se rend compte que beaucoup d’entreprises ont un système de recrutement vieillissant. Nous les aidons à revoir leur process en laissant la place aux soft skills et aux compétences transférables. C’est notamment ce qu’on a appliqué chez Toyota, pour qui nous avons effectué plus de 500 recrutements en deux mois et demi : il faut casser les codes, voir au-delà du CV», explique Caroline Riffard. «Dans les grands groupes, c’est tout de même assez bien géré, parce qu’il y a une équipe RH. Mais les TPE/PME représentent une majorité de recruteurs, et ils sont loin de prendre en compte les capacités en dehors des diplômes. Quand un salon de coiffure exige dix ans d’expérience dans son annonce, on va lui demander pourquoi, et lui expliquer qu’il est nécessaire de baisser la barre, quitte à donner accès à une formation en entreprise par la suite», indique Isabelle Kempeneers-Schmieszeck, directrice du Pôle emploi de Somain. En 2020, ces actions seront renforcées grâce à l’ajout d’un conseil supplémentaire par agence. Le délai moyen d’accompagnement d’un recruteur pour mener à bien son annonce est actuellement de 44 jours, l’objectif d’ici 2020 sera de passer à 30 jours.

Cap sur les emplois longue durée

Pour autant, les conseillers cherchent à donner accès à un emploi durable. «Il y a de moins en moins d’intérim, notamment parce que les recruteurs sont en demande de candidats. Les demandeurs d’emploi, eux, ont des compétences dormantes. Ils ont enfin l’occasion de les mettre à profit et n’acceptent alors que les meilleures offres, c’est-à-dire les CDD de plus de dix-huit mois et, au mieux, les CDI», décrypte Sophie.

Dernier chantier pour l’année à venir : Pôle emploi compte également mettre l’accent sur l’accompagnement des demandeurs d’emploi en situation de handicap. «Encore beaucoup de dirigeants préfèrent être sanctionnés plutôt qu’embaucher des personnes en situation de handicap comme la loi l’impose», avoue péniblement Carole Riffard. D’ici 2021, un lieu unique Pôle emploi-Cap emploi devrait être présent sur chaque territoire pour débloquer la situation.