Décès de Naomi Musenga: un an avec sursis pour l'opératrice du Samu

L'opératrice du Samu qui avait raillé fin 2017 au téléphone Naomi Musenga, jeune femme de 22 ans décédée peu après à l'hôpital, a été reconnue coupable de non assistance à personne en danger et condamnée à un an de prison...

Photo non datée prise par un membre de la famille Musenga, diffusée le 10 mai 2018, de Naomi Musenga lors d'un défilé de mode, dans un lieu non précisé © Catherine FABING
Photo non datée prise par un membre de la famille Musenga, diffusée le 10 mai 2018, de Naomi Musenga lors d'un défilé de mode, dans un lieu non précisé © Catherine FABING

L'opératrice du Samu qui avait raillé fin 2017 au téléphone Naomi Musenga, jeune femme de 22 ans décédée peu après à l'hôpital, a été reconnue coupable de non assistance à personne en danger et condamnée à un an de prison avec sursis jeudi par le tribunal correctionnel de Strasbourg.

Le tribunal est allé au-delà des réquisitions du parquet, qui avait demandé 10 mois avec sursis.

La mère de la victime, Honorine Musenga, a fait part de son "soulagement" que la responsabilité de l'opératrice soit reconnue et que celle-ci ait exprimé des excuses. "Aujourd'hui c'est ce qui nous permet, nous, je pense, d'avancer", a dit sa fille Louange. 

"Je pense que ça prouve aussi qu'il y a des failles dans le système médical aujourd'hui et qu'il faut les traiter", a ajouté Louange Musenga.

"Il me semble que jamais, jusqu'à aujourd'hui, une opératrice du Samu n'avait été condamnée devant un tribunal correctionnel", a aussi réagi leur avocat, Jean-Christophe Coubris, soulignant la "décision équilibrée" du tribunal.

Graves négligences

Corinne M., l'opératrice âgée de 60 ans, est également condamnée à verser 15.000 euros à la famille de Naomi Musenga au titre des frais d'avocats. Elle a dix jours pour faire appel, "10 jours à espérer qu'on ne fera pas subir une nouvelle épreuve à cette famille", a souligné Me Coubris. 

"Dès lors que la décision sera définitive", l'avocat compte saisir le tribunal administratif. "Pour nous, ça fait partie du combat et il me semble que ça aura un sens de faire aussi condamner l'hôpital qui était l'employeur de cette opératrice."

La procureure, Agnès Robine, avait réclamé une "sanction de principe, claire, pour rappeler la loi et le devoir d'humanité de chacun des citoyens".

La procureure avait insisté sur les "graves négligences" commises par la régulatrice lors des appels passés le 29 décembre 2017 par Naomi Musenga, soulignant qu'elle disposait pourtant d'une "solide expérience" professionnelle depuis huit ans qu'elle exerçait à ce poste, après avoir été ambulancière.

"A aucun moment elle n'essaie de savoir ce que Mme Musenga a comme symptômes, alors qu'elle lui dit qu'elle va mourir", a souligné la magistrate.

Froid dans le dos

"Je ne peux pas vous aider parce que je ne sais pas ce que vous avez", a-t-elle cité  de l'enregistrement de la conversation entre la jeune femme souffrante et l'opératrice. "Cette phrase fait froid dans le dos", a souligné la procureure. "C'était l'essence même de sa mission que de poser les questions aux appelants."

"Une bande sonore comme celle-ci, j'ose espérer que de ma vie je n'en entendrai jamais plus", a appuyé Me Coubris.

Au moment de son décès, Naomi Musenga avait un enfant âgé de 18 mois.

Marie Juras, avocate de l'ancien compagnon de Naomi Musenga, a souligné que son client était "venu chercher des réponses. Un jour sa fille lui posera des questions, elle entendra cet appel audio et il sera seul en face d'elle pour lui répondre".

Thomas Callen, avocat de Corinne M., avait plaidé la relaxe, estimant que même si sa cliente avait manifesté un "manque d'empathie" et un "défaut d'humanité", elle n'avait pas "la conscience d'un péril" pour la vie de son interlocutrice.

Corinne M. s'est excusée auprès de la famille de Naomi Musenga en ouverture des débats jeudi matin, des excuses accueillies avec bienveillance par la mère de Naomi qui "pardonne" à l'opératrice. 

Sa fille est décédée le 29 décembre 2017 à l'hôpital de Strasbourg après avoir été prise en charge avec "un retard global de près de 02H20", selon un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas).

Selon l'enquête, son décès n'est pas lié au retard de prise en charge. 

Après la mort de Naomi Musenga, une première expertise, dénoncée par sa famille, avait conclu à un décès consécutif à une "intoxication au paracétamol absorbé par automédication sur plusieurs jours". 

Mais une deuxième expertise avait réfuté ces conclusions, évoquant un accident vasculaire digestif ayant entraîné une hémorragie.

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