Décarbonation de la vallée de Seine : plus de 7 millions d'euros de l'Etat pour le projet ZIBAC
Le 28 avril à Gonfreville-l'Orcher, le ministre de l'industrie Roland Lescure est venu annoncer le soutien de l'Etat au projet de zone industrielle bas carbone (ZIBAC) de la vallée de Seine. Avec une enveloppe de 7,3 M€.
C'est au son des casseroles martelées pendant près de 4 h par 100 à 150 manifestants que Roland Lescure a visité le 28 avril l'usine Yara de Gonfreville-l'Orcher. Le ministre de l'Industrie, était attendu pour venir annoncer très officiellement le soutien de l'Etat dans le projet de Zone Industrielle Bas Carbone (ZIBAC) sur l'estuaire de la Seine. Une annonce qui avait déjà transpiré, mais qui au vu de l'enveloppe débloquée (7,3 millions d'euros), méritait bien un déplacement. D'autant que, comme l'a souligné le ministre, l'estuaire de la Seine est « un lieu emblématique de ce que l'on souhaite faire. Mon défi majeur, c'est d'accélérer le début de réindustrialisation de la France en route depuis 5 ans. Et la décarbonation est une manière de le faire. »
Sur le terrain (et en faisant abstraction des concerts de casseroles en lien avec la réforme des retraites), on est évidemment ravi de cet engagement de l'Etat. Les élus et les grands acteurs économiques sont en effet tous en ligne sur cette question. L'enveloppe nationale viendra ainsi abonder les 7,5 M€ mis sur la table par les acteurs engagés dans le projet, parmi lesquels Haropa, Exxon, Borealis, Yara et Air Liquide. La Région a aussi annoncé ce 28 avril apporter un soutien qui pourrait aller jusqu'à 2 M€, en mobilisant notamment les fonds européens du Fonds de Transition Juste (FTJ).
Capter le CO2 et le renvoyer en Norvège
De quoi financer la phase d'études en faveur de la décarbonation. Celles-ci exploreront 4 piliers. Le premier serait une approche collective de l'énergie à l'échelle du territoire, avec un management collectif, et la récupération de la chaleur fatale. En second lieu, il s'agit de trouver des solutions pour diversifier le mix énergétique et sortir du tout carbone. Sur ce dossier, on le sait, la vallée de la Seine compte notamment sur l'éolien et sur l'hydrogène. En troisième pilier, l'industrie va aussi étudier l'utilisation de nouveaux produits et coproduits comme l'oxygène par exemple. Une piste de plus long terme mais qui n'a rien de négligeable et pourrait apporter d'important résultat.
Enfin, le 4ème pilier d'étude concerne la capture du carbone pour son utilisation dans de nouveau process industriel, pour sa mise en stockage. « Pour décarboner, il faut capter le Carbone, le stocker, le transporter et le renvoyer en Norvège, là d'où il vient », a résumé Roland Lescure. C'est d'ailleurs l'une des pistes explorée par Yara à Gonfreville-l'Orcher. Sur son unité de production d'ammoniac, l'entreprise capte 100 % du CO2 du gaz naturel "craqué" qu'elle utilise. Mais elle n'en réemploie que 50 % pour la production d'urée. Une unité de liquéfaction du CO2 sur le territoire permettrait de stocker facilement les 50 % restants.
Electricité et formation : de vrais enjeux
Au total, l'espoir au sein de la ZIBAC est de parvenir à économiser jusqu'à 11 Mt de CO2 par an sur l'axe Seine, quand l’industrie du territoire émet aujourd'hui 12 Mt par an. Du moins sur le papier... Car, comme d'autres représentants locaux, Edouard Philippe, président de la Communauté urbaine du Havre, l'a rappelé : « on a quand même quelques sujets devant nous. Le premier c'est l'accès à de l'électricité décarbonée. » Celle-ci est, en effet, indispensable par exemple pour la liquéfaction du CO2, ou la production d'hydrogène, si on veut se passer des énergies fossiles. « Il nous faut un développement rapide et important », a soutenu l'ancien premier ministre. En parallèle, les acteurs du territoire attendent aussi un effort considérable sur la formation et l'attractivité des métiers de l'industrie... « Un enjeu décisif, le carburant de la réussite », a martelé Edouard Philippe.
Le Havre est la troisième ZIBAC soutenue par l'Etat après Fos-sur-Mer et Dunkerque. Reste désormais à conduire les études, et à passer à la phase opérationnelle. « Ce n'est qu'un début, continuons le combat » a lancé, taquin, Roland Lescure en guise de conclusion...
Pour Aletheia Press, Benoit Delabre