Crèches: la ministre Aurore Bergé visée par une enquête pour faux témoignage
La ministre Aurore Bergé est visée par des investigations de la Cour de justice de la République (CJR) pour avoir nié tout lien personnel avec une lobbyiste des crèches privées devant une commission parlementaire, des propos remis en...
La ministre Aurore Bergé est visée par des investigations de la Cour de justice de la République (CJR) pour avoir nié tout lien personnel avec une lobbyiste des crèches privées devant une commission parlementaire, des propos remis en cause dans un livre et des messages.
La CJR a ouvert mardi une information judiciaire pour "faux témoignage", a annoncé vendredi dans un communiqué Rémy Heitz, procureur général près la Cour de cassation.
"Nous prenons acte de l'ouverture d'une instruction qui est la suite naturelle de la saisine de la CJR", a réagi auprès de l'AFP Me Jade Dousselin, avocate d'Aurore Bergé. La ministre "répondra évidemment à toutes les demandes qu'aura cette dernière pour mener à bien son instruction", a-t-elle ajouté.
Ces investigations font "suite à un signalement émanant du bureau de l'Assemblée nationale" le 9 octobre 2024 après "des déclarations faites sous serment devant une commission d'enquête parlementaire le 30 avril 2024" par la ministre, précise Rémy Heitz, qui exerce les fonctions de ministère public à la CJR.
Le 23 janvier, la commission des requêtes de la CJR, qui filtre les plaintes et signalements, "a émis un avis favorable à la saisine de la commission d'instruction de cette Cour pour instruire contre Mme Aurore Bergé, en sa qualité de ministre, du chef de faux témoignage", précise le procureur général.
Cette commission d'instruction, composé de trois magistrats, agit comme un juge d'instruction et va donc enquêter.
Des députés de La France insoumise et du groupe Ecologiste et Social avaient demandé que le bureau de l'Assemblée nationale, plus haute instance exécutive de la chambre, composée de 22 députés (à majorité à gauche), engage une "procédure pour parjure" contre Aurore Bergé.
Après un vote de dix voix contre neuf le 9 octobre, le bureau de l'Assemblée nationale avait saisi la justice.
Les députés de gauche la suspectaient d'avoir passé sous silence des relations avec les lobbys devant une commission d'enquête parlementaire sur le modèle économique des crèches.
Auditionnée par cette commission le 30 avril, Aurore Bergé, alors ministre chargée de l'Egalité, avait affirmé sous serment n'avoir aucun "lien personnel, intime ou amical, ni d'accointances" avec la déléguée générale de la Fédération française des entreprises de crèches (FFEC), Elsa Hervy.
Une copine
Or, dans son livre-enquête paru début septembre, "Les Ogres" (Flammarion), sur les dérives et la "voracité" de certains groupes privés de crèches, le journaliste d'investigation Victor Castanet évoque un "pacte de non-agression" qui aurait été conclu entre Mme Bergé, à l'époque où elle était ministre des Familles (juillet 2023-janvier 2024) et Elsa Hervy.
Aurore Bergé, alors députée Ensemble pour la République (EPR) - elle n'avait pas été renommée dans le gouvernement Barnier -, avait rejeté les accusations et porté plainte en diffamation contre Victor Castanet.
En réponse, le journaliste avait rendu publics des documents attestant selon lui d'"une entente entre Aurore Bergé et Elsa Hervy".
L'un de ces documents est un courriel adressé le 8 août 2023 par la ministre à sa directrice de cabinet, où elle dit à propos de Mme Hervy: "C'est surtout une copine :) Elle sera très aidante avec moi".
Selon Victor Castanet, qui a publié une capture d'écran de messagerie, Mme Bergé a qualifié les membres de la FFEC de "meilleurs alliés". Enfin, dans un troisième message, Elsa Hervy écrit à une personne identifiée par le journaliste d'investigation comme un collaborateur de la ministre: "J'obéis", en parlant de la mise en place d'un plan de communication.
Mme Bergé avait déposé une plainte pour le vol de sa correspondance et une enquête est en cours depuis le 22 octobre à Paris. Elle a été entendue la semaine dernière en tant que plaignante.
Issue de LR, Aurore Bergé a été ministre des Solidarités et des Familles (juillet 2023 à janvier 2024), puis en charge de l'Egalité entre les femmes et les hommes dans le gouvernement Attal.
Privée de maroquin sous Michel Barnier, elle a retrouvé le ministère de l'Egalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations le 23 décembre.
La CJR est la seule juridiction habilitée à poursuivre et juger les membres du gouvernement pour des infractions commises dans l'exercice de leurs fonctions.
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