Covid-19 : un site d’autoévaluation et d’orientation des patients
L’Alliance digitale contre le Covid-19 lançait le 18 mars dernier sa plateforme numérique «maladiecoronavirus.fr». Le site permet aux Français qui pensent être contaminés par le virus d’évaluer leurs symptômes, pour les orienter ensuite vers la marche à suivre. Référencé par le ministère des Solidarités et de la Santé, il a été mis en place suite à l’initiative de la start-up lilloise Kelindi.
Incubée à Eurasanté depuis mai 2019, la structure a été officiellement créée en 2020. Fabrice Denis, médecin au Mans, et Florian Le Goff, ingénieur informatique, en sont les deux fondateurs. «Grâce aux algorithmes de modélisation biomédicale, nous sommes en mesure de proposer des outils adaptés à la détection précoce des maladies», explique ce dernier. Avant le début de la crise sanitaire actuelle, Kelindi travaillait en effet sur le développement de projets tels que les maladies chez l’enfant ou celles dites chroniques pour les patients âgés.
Cependant, dès le début de l’année 2020, les responsables de Kelindi commençaient déjà à orienter progressivement une partie de leurs efforts vers une nouvelle direction. Suite à la veille continue des publications scientifiques qu’ils pratiquaient, ils s’inquiétaient en effet de la propagation du Covid-19 en Chine. «En janvier, le JAMA (Journal of the American Medical Association) tirait déjà la sonnette d’alarme», raconte Florian Le Goff. Ils ont alors commencé à adapter leur algorithme à la nouvelle maladie, sous l’égide de l’AP-HP, des CHRU de Rennes, Lille et Angers, et de l’Institut Pasteur, avec la participation de plusieurs médecins et spécialistes du sujet.
Une alliance qui se mobilise
Plusieurs acteurs se sont rapidement ralliés à l’initiative. Kelindi a approché en premier lieu «Dernier Cri», une agence lilloise spécialisée dans le développement digital. Cette dernière a mobilisé 25 développeurs pour sortir le projet en quelques jours seulement. «Docaposte, la filiale numérique du groupe La Poste, nous a pour sa part soutenus au niveau technique. Elle a alors mis à notre disposition ses serveurs pour héberger, gérer les données collectées», précise l’ingénieur spécialisé dans les dispositifs médicaux.
Le cabinet d’avocats De Gaulle Fleurance et Associés s’est quant à lui occupé du volet juridique de la création de l’Alliance digitale contre le Covid-19, l’entité qui réunit désormais tous les acteurs engagés dans le projet, tandis que la société d’assurances Allianz France a apporté son soutien financier.
Quinze membres font aujourd’hui partie de l’Alliance. Il s’agit de : Adobis Group, AG2R La Mondiale, AstraZeneca, CompuGroup Medical, Groupama, Groupe Aésio, Groupe Klesia, Groupe VYV, Johnson & Johnson, La Banque postale assurances, La Mutuelle générale, Malakoff Humanis, Meetic, MesDocteurs et Withings.
D’une idée de laboratoire à un site de référence
Répondant à un besoin urgent d’une grande partie de la population, «maladiecoronavirus.fr» a rencontré un succès fulgurant dès sa mise en ligne. Dans ce sens, quelque 600 000 connexions ont été enregistrées en trois jours seulement. «Grâce à un test anonyme et gratuit, les utilisateurs sont conseillés vers les mesures qu’ils doivent prendre», étaye Florian Le Goff. Rester confiné, consulter son médecin traitant ou appeler le SAMU, telles sont les préconisations possibles selon les réponses fournies aux 22 questions de l’exercice. En plus des symptômes de la maladie (toux, fièvre, courbatures, perte du goût ou de l’odorat, gêne respiratoire, etc.), les antécédents médicaux, l’âge ainsi que l’indice de masse corporelle doivent également être renseignés afin d’évaluer correctement l’état de santé de la personne. «En analysant les données collectées, on se rend compte que beaucoup de Français ont besoin d’être rassurés. Grâce à notre plateforme, nous avons réussi à soulager la pression exercée sur le 15. Seulement 16% des cas avaient en effet besoin d’être orientés dans ce sens», explique le cofondateur de Kelindi. Le site Web et mobile est par ailleurs mis à jour régulièrement suivant les dernières recommandations scientifiques disponibles.
Les données collectées sont quant à elles enregistrées de manière anonyme et sécurisée avant d’être transférées à l’Institut Pasteur dans un objectif de recherche et d’évaluation de l’évolution de la pandémie.
Des leçons pour l’avenir
Grâce à cette expérience inédite, Kelindi envisage l’avenir sereinement. «Nous nous sommes rendus compte que les Français ne sont pas réticents à discuter avec une machine de leur état de santé», estime Florian Le Goff. «D’autre part, nous avons appris comment générer des millions de visites en quelques jours seulement», poursuit-il. Kelindi prévoit par ailleurs de procéder à une levée de fonds d’ici fin 2020, afin de recruter notamment une équipe spécialisée pour mener à bien ses projets futurs.