Corrosia : prendre soin des ponts pour maintenir la sécurité et le lien social
La société roubaisienne entretient les structures métalliques qui nous entourent telles que les ponts. Un secteur peu connu, où la concurrence n’est pas légion !
Victor Rodriguez a choisi de quitter sa Galice natale, en Espagne,
pour s’installer à Roubaix et y fonder son
entreprise, Corrosia. Cette dernière, forte de dix salariés, est
spécialisée dans la protection anti-corrosion des structures
métalliques. Un domaine de niche, ou seulement «quatre ou
cinq autres sociétés sont présentes dans toute la France».
Ces concurrents n’en sont d’ailleurs pas vraiment. Victor
Rodriguez les voit plutôt comme «des partenaires».
Si
les entreprises de ce type sont si peu nombreuses, c’est que les
agréments pour exercer sont compliqués à obtenir. «Il faut
non seulement avoir des agréments spécifiques pour la personne,
mais également pour l’entreprise, sinon nous ne pouvons pas
intervenir. Moi-même, je les ai», explique le dirigeant. De
surcroît, les agréments s’obtiennent également avec un certain
nombre d’années d’expérience, ce qui ajoute de la complexité à
leur obtention. Les contrôles sont donc assez stricts, car sans ces
agréments, «EDF ou Total ne vont pas compter sur vous».
Les
grandes entreprises font partie des clients de Corrosia, à l’instar
des collectivités territoriales, la Métropole européenne de Lille
ou le Grand Paris Express. Mais l’entreprise n’est pas uniquement
présente en France. Ses techniciens sont appelés partout en Europe,
mais aussi dans le monde, comme en Turquie ou sur le continent
africain, de par son intégration au Groupe Institut Soudure en 2023,
qui permet à Corrosia de passer un cap pour travailler de manière
beaucoup plus solide à l’international, de continuer de recruter
et d’être solide au niveau financier». C’est d’ailleurs
l’objectif affiché de Victor Rodriguez, qui souhaite passer de 10
à 25 salariés et d’un chiffre d’affaires de 1,2 million d’euros
à 3 millions d’euros en 2030.
Un
impact au-delà de la structure
Le travail réalisé par Corrosia consiste donc à expertiser les structures métalliques sur demande «afin de comprendre la nature du problème», avant d’inspecter et de contrôler ces mêmes structures. Par exemple, l’entreprise roubaisienne a inspecté la passerelle Saint-Michel, qui relie le continent au Mont-Saint-Michel. «Nous sommes également assistance technique pour le stade Pierre Mauroy de Lille. Nous faisons les contrôles des structures métalliques du stade ainsi que le contrôle et l’inspection des travaux de maintenance. De cette façon, le stade garde la pérennité des structures», souligne le dirigeant. Parmi les chantiers les plus passionnants, Corrosia a travaillé sur l’expertise d’un chimiquier (navire transportant des produits chimiques, ndlr) et des plateformes offshore.
En
plus de cette partie expertise, Corrosia a un laboratoire où sont
analysées des pièces envoyées par des entreprises pour effectuer
différents tests et vérifier si elles sont bien conformes aux
demandes et aux normes de sécurité.
Car en cas de non-conformité, ce n’est pas un simple «patch» qu’il faut mettre sur la structure d’un pont ou d’un bâtiment. Il faut tout changer. Et les coûts peuvent vite grimper. «Pour un pont au-dessus d’un canal dans le département du Nord, la rénovation va se situer entre 500 000 et 800 000 euros en moyenne», explique Victor Rodriguez. Une fois terminée, la structure va ensuite durer dans le temps, entre 15 et 30 ans, mais les coûts financiers restent important. Surtout que ces travaux ne se font ni aisément ni rapidement. «Couper un pont, ça a aussi un impact au niveau socio-territorial, même dans un village de 200 personnes. Les gens qui devaient faire 500 mètres pour aller à la boulangerie, doivent ensuite faire 15 km. L’impact social est très important, et je suis très attaché à ça par rapport à mon métier. Un pont métallique, c’est plus que de la corrosion, c’est un axe d’union sociale et démographique entre deux peuples», souligne fièrement le dirigeant.
C’est
cette expertise qui permet à Corrosia de travailler avec des grands
groupes aussi bien privés que publics, et pour des contrats de plusieurs centaines de milliers d’euros, comme
c’est le cas actuellement avec RTE. Pour ce contrat, qui concerne
le Nord et la Normandie, Corrosia va contrôler les pylônes
électriques présents sur les routes. De quoi voir, dorénavant,
chaque structure métallique d’un œil différent.
Une application aidée par l’IA pour identifier la corrosion
La détection de la corrosion sur les structures métalliques se fait avec l’œil humain, qui peut avoir des failles et laisser passer quelques détails. Pour accompagner les personnes ne connaissant pas forcément ce domaine, comme les agents territoriaux par exemple, Corrosia développe une application avec l’intelligence artificielle «pour identifier de manière automatique la corrosion sur les structures», explique Victor Rodriguez. En plus d’identifier de manière automatique la corrosion sur les structures métalliques, il sera également possible d’«expertiser et d'inspecter des espaces difficiles d’accès ou des espaces confinés. Grâce à ce projet, vous allez pouvoir identifier et cartographier tous les défauts», ajoute le dirigeant. Actuellement, le projet est encore en développement et n’est donc pas encore commercialisable ni monétisable. L’application a été reprise par le pôle innovation du Groupe Institut Soudure afin de continuer le développement.